Incohérence et panique.
Maintenant qu’il est candidat, M. Valls est contre le 49.3 qu’il a pourtant dégainé deux fois pour imposer la « loi Travail ». S’il était cohérent, l’ex Premier ministre ajouterait à son programme électoral le retrait immédiat de cette loi et se mobiliserait sans tarder pour défendre les syndicalistes et citoyens poursuivis devant des tribunaux pour avoir tenté de s’opposer aux méthodes autoritaires d’un gouvernement organisant une régression sociale majeure.
Mais ne demandons pas à nos dirigeants politiques d’être cohérents. Dépassés par une situation qu’ils ne maîtrisent plus, une forme de panique les gagne. Ils font alors n’importe quoi en cédant en général aux injonctions du Capital, faute d’être encore capables d’imaginer une autre voie. Dans le fond, l’élaboration subite, puis la mise en place rapide et coercitive de la loi El Khomri accompagnée d’une vigoureuse répression de ses opposants, et suivi pour finir d’un repentir ridicule du principal artisan de la « réforme » en quête désespérée de voix, sont autant d’épisodes qui illustrent le désarroi dans lequel nos « élites » sont plongées.
Statut de voyous pour ceux qui résistent
En Alsace comme ailleurs, l’appareil judiciaire est entraîné dans ces tourbillons délirants où la décadence idéologique revêt les oripeaux de la répression. En l’occurrence, et dans l’immédiat, ce sont des militants qui trinquent, traités par la « justice » comme on traite des voyous. Et, pour avoir tenté de résister face à des libéraux déjantés et à leurs chiens de garde, ils risquent – ne s’appelant pas Lagarde – des peines dont ils ne sont pas susceptibles d’être dispensés, eux !…
Dans un article paru en juillet dernier : À Haguenau (et Mulhouse), des manifestants contre la « loi Travail » menacés on révèle qu’à Mulhouse il était envisagé que des édiles locaux – tous de chauds partisans de la « loi Travail »-, en partenariat avec la justice, aient la possibilité de donner une leçon de morale politique à un jeune de « Nuit debout », opposant à cette « loi Travail » en le forçant à suivre un « stage de citoyenneté » que l’intéressé aurait dû, en plus, financer. Il a refusé ces procédés où ce sont les fauteurs de trouble qui s’octroient tous les droits. Y compris celui de faire diversion pour occulter leurs responsabilités, ou comme celui de définir le contenu d’une sanction à l’encontre de ceux qui leur résistent. (pour plus de détails sur ces singuliers et arrogants procédés, reportez-vous à l’article mentionné ci-dessus). Conséquence du refus de l’opposant : la « justice » le convoque le mercredi 18 janvier prochain. « Nuit debout » appelle à le soutenir à partir de 8h devant le tribunal, avenue Robert Schuman à Mulhouse.
Goodyear, SNCF…
Dans un communiqué diffusé par le comité de soutien aux 8 de Goodyear (qui organise un déplacement en bus lors du jugement en appel le 11 janvier 2017 ; pour plus de renseignements sur ce déplacement, téléphonez au 06 61 87 08 57 ou écrivez à l’adresse mail suivante : francoise.ruch@yahoo.fr), on rappelle que, à la SNCF, d’après SUD-Rail, il y aurait 400 militants à être sous le coup d’une procédure disciplinaire (une centaine du syndicat SUD-Rail et environ 300 de la CGT).
Les sanctions sont de plus en plus sévères : maintenant, on passe directement à la comparution devant un conseil de discipline pour “faute lourde” ou “faute grave”, au lieu de recevoir un blâme ou un avertissement comme dans le passé. La SNCF veut sanctionner ceux, syndicalistes ou grévistes, dont l’action s’oppose à leur politique de réforme ferroviaire, l’équivalent de la loi travail à la SNCF.
A Mulhouse, Mathieu Relin conducteur de train à la SNCF, est menacé de licenciement pour des faits non avérés, survenus dans le train Paris-Strasbourg lors du retour de la manifestation Parisienne le 14 juin 2016 contre la loi travail. (voir l’article : SNCF : Qui porte atteinte à l’image de l’entreprise ? (novembre 2016))
L’inspection du travail a refusé le licenciement de Mathieu, montrant par là que les arguments de la direction étaient sans fondement.
Une pétition, mise en place par le collectif contre la radiation de la SNCF de Mathieu sur Change.org, a déjà réuni plus de 6150 signatures. [http://www.ulinks.fr/12jv2]
Le cas des « Six de Haguenau »
Dans l’article de juillet dernier, le cas des « Six de Haguenau » poursuivis en justice pour avoir participé aux initiatives de la journée nationale de grève et de manifestations du 19 mai pour le retrait de la « loi Travail » a aussi été évoqué. Pour eux, une audience initialement prévue le 9 novembre n’aura servi qu’à les informer que leur jugement aura finalement lieu le mardi 17 janvier 2017 à 8h 30 !… (1)
En effet, au TGI de Strasbourg le 9 novembre dernier, l’ « audition » des six militant-e‑s de la CGT, de FO, et de Solidaires-Alsace n’aura duré en tout et pour tout que deux minutes ! Le juge, président de la 6ème chambre, a choisi de se dessaisir du dossier – qui a été mal aiguillé, apparemment…
On leur reproche quoi, en fait ?
Le jeudi 19 mai 2016, en tout début de matinée, a eu lieu sur la zone industrielle à la limite de Schweighouse-sur-Moder, une opération de barrage filtrant d’un rond-point, aux bretelles d’entrée et de sortie de la rocade de contournement de Haguenau.
A l’appel de six organisations de salariés et de lycéens, près de 200 personnes avaient pris part à l’action. Il est bon de rappeler le contexte : dans ce mouvement social engagé alors depuis plus de deux mois la détermination était intacte, renforcée par l’utilisation du 49.3 la semaine précédente et les appels des confédérations et des fédérations syndicales nationales.
Y avait-il un appel des organisations visées au travers de ces militants à occuper cette rocade de contournement ? Non. Cette action improvisée lors d’un rassemblement de 200 personnes ne faisait que traduire l’exaspération de millions d’autres contre la « loi Travail » et l’arbitraire du gouvernement. Il est donc absolument inacceptable que certain-e‑s puissent être tenu-e‑s pour responsables en leur nom propre d’actions collectives décidées sur le vif.
Y a‑t-il eu des dégâts ? Aucun ! Tout s’est déroulé dans le calme et sans incident. Les militants incriminés ont-ils commis un acte individuel quelconque passible de poursuites ? Non.
Alors pourquoi poursuivre et juger ces militants ?
C’est le Procureur de la République qui a décidé d’engager les poursuites. Il s’agit donc d’une décision prise au plus haut niveau de l’Etat contre des syndicalistes agissant dans le cadre de leur mandat ! S’agit-il d’une « punition collective » pour fait de manifestation ? S’agit-il d’intimider le mouvement syndical et de « faire des exemples » ?
À l’arbitraire du 49.3, à l’injustice d’une loi ne servant que les intérêts patronaux, le gouvernement entend ajouter la brutalité d’une répression judiciaire – tout ceci est d’une exceptionnelle gravité.
Venez donc nombreux soutenir les « Six de Haguenau » devant le TGI de Strasbourg, 1, quai Finkmatt, mardi 17 janvier 2017, à partir de 8H30. Et signez la pétition pour leur soutien : http://soutien6haguenau.wesign.it/fr
(1) L’essentiel du texte et des informations qui suivent cette note ont été fournies par des militants de SUD Education-Alsace.
Voir aussi les articles connexes :
À Haguenau (et Mulhouse), des manifestants contre la « loi Travail » menacés (juillet 2016)
Coupable mais pas condamnable… (décembre 2016)
SNCF : Qui porte atteinte à l’image de l’entreprise ? (novembre 2016)