L’attachée de presse qui nous répond explique que l’action est menée depuis ce matin dans Kin­ger­sheim, mais que si nous venons vers 14 heures devant la mai­son de la citoyen­ne­té, nous aurons de bonnes oppor­tu­ni­tés pour fil­mer ou photographier. 

Arri­vée donc devant la mai­son de la citoyen­ne­té à l’heure. Une bonne cen­taine de mani­fes­tants se répar­tissent par petits groupes dans le parc Finck, juste en face du lieu prévu. 

30 minutes passent, et rien ne se passe. Enfin si, quelques détails amu­sants : un mani­fes­tant qui s’élève d’un groupe, puis fouille dans sa besace et en sort une tige en acier. Bâton téles­co­pique ? Non, perche à sel­fie ! Une ving­taine de per­sonnes s’agglutinent alors devant l’objectif du rétro-pho­to­graphe qui a mis un genou à terre pour cadrer en contre-plon­gée la petite foule souriante. 

Un cri rai­sonne au milieu de la mêlée: « qui a les clés du com­mis­sa­riat » ? Quelques rires étouf­fés émergent. 

Un grand écha­las se lève au milieu d’une dizaine de per­sonnes. Mine ren­fro­gnée, il porte une cas­quette mili­taire et un tee-shirt noir sur lequel est écrit « sécu­ri­té » en gros carac­tères blancs devant et derrière. 

De petits groupes pré­parent leur bar­da puis s’en vont. Le tiers a dis­pa­ru en quelques minutes. 

Après 45 minutes, on toise un gar­çon à l’air éga­ré por­tant un tee-shirt Alter­na­ti­ba (co-orga­ni­sa­teur de l’évènement).

  • C’est pour quand l’action de masse ?
  • Ah, ben c’est fait. C’est passé. 
  • Ah ? Il n’y a rien eu ici, alors qu’on m’a don­né ren­dez-vous à 14h 
  • C’est nor­mal, ça se pas­sait plus tôt et dans divers endroits de la commune !

Mon nou­vel ami est disert. Il s’assoit spon­ta­né­ment près de moi et m’explique le dérou­le­ment de l’action. Il s’agissait d’un évè­ne­ment paro­dique consis­tant à mettre en scène les grands de ce monde contre des défen­seurs du cli­mat en proie à la « polisse » sti­pen­diée par les domi­nants en question.

Les « grands » ont des noms pas­ti­chés et une poi­gnée de par­ti­ci­pants s’est gri­mée pour res­sem­bler aux diri­geant mon­diaux.  On trouve éga­le­ment des médias et une banque dans le lot. 

Mon voi­sin qui dor­mait sous l’arbre du parc se lève sou­dai­ne­ment et nous rejoint. Il res­semble à un per­son­nage du film « Men in black », tout en noir et lunettes assorties.

  • Ah, vous avez les images de la reconstitution ? 

Il vise mon ami qui me montre les vidéos des comptes paro­diques Twitter. 

  • Moi je n’ai rien vu parce que j’ai pas de télé­phone portable. 
  • C’est vrai que c’était mal fou­tu cette orga­ni­sa­tion, moi je n’ai pas pu tout voir et beau­coup d’autres sont res­tés exclus. Il fau­dra en par­ler ce soir au débrief !
  • Moi je n’ai pas à me plaindre : j’étais l’un des gardes du corps de « Manu Patron » ! (voir ci-des­sous). J’ai même gar­dé son discours !

Je devais rece­voir une série de codes, via le compte face­book du jour­nal, conte­nant des liens vers des pho­tos et vidéos paro­diques dis­po­nibles sur tweeter. 

Les scé­nettes sont inégales. Cer­taines sont drôles et le détour­ne­ment de la pre­mière page du jour­nal « Le Pari­sien » vrai­ment réus­si. De même que le choix des patro­nymes uti­li­sés pour rebap­ti­ser les diri­geants mon­diaux. Par ailleurs, Kin­ger­sheim a été fémi­ni­sée en Quee­ner­sheim !

Mais l’impression géné­rale reste tou­te­fois celle d’une auto-paro­die théâ­tra­li­sée et auto­cen­trée, des­ti­née d’abord à confor­ter, diver­tir, voire raf­fer­mir, les par­ti­ci­pants du camp, avant leur libé­ra­tion. On ne sait pas vrai­ment si c’est déli­bé­ré, mais cer­tains choix semblent mal­adroits, de sorte qu’ils rendent la pres­ta­tion un peu déri­soire. Jugez-en dans les liens four­nis au bas de cet article. 

Tou­jours est-il que la seule véri­table action de masse devant laquelle on assiste n’est pas tan­gible. C’est la bataille de l’opinion. La seule qui compte. Convoyée par le tru­che­ment des canaux de com­mu­ni­ca­tion de masse et le réseau­tage social. 

Un choix incon­tour­nable, à sup­po­ser que c’est là que se trouve celle ou celui qu’il faut séduire et convaincre assi­du­ment. Mais un choix non dénué d’am­bi­guï­té pour autant, qui marque la limite de l’exercice poli­tique et du pro­blème de la cohé­rence avec l’i­déal pro­mu. Ne serait-ce qu’en termes de consom­ma­tion d’énergie glo­bale néces­saire pour ali­men­ter des ser­veurs situés en divers endroits du monde, et en consi­dé­rant l’estomaquant dévi­doir en don­nées per­son­nelles qu’il contri­bue à ali­men­ter goulument. 

Il est vrai que le camp cli­mat a for­mé des par­ti­ci­pants à l’u­sage du logi­ciel libre, grâce à Fra­ma­soft. Mais pas de trace de l’or­ga­ni­sa­tion sur Dia­spo­ra (équi­valent libre de Face­book) ou Mas­to­don (équi­valent de Twitter)… 

« Valeurs fac­tuelles » : « La crois­sance est notre ave­nir. Pro­té­geons là ! » 
https://twitter.com/Queenersheim/status/1160102714753331200?s=20

Les comptes Twee­ter parodiques: 

@OnePlanetSeumit
@Manuel_Patron_
@Queenersheim
@SocieteVenale
@troudenleau
@MarketAngela
@ElisabethBorgn1
@VFactuelles