Je suis abon­né de longue date aux DNA.

Same­di 4 juin, en pre­mière page, une grande pho­to du pré­sident Macron, l’air déter­mi­né, le regard péné­trant, avec ce titre : « Macron dévoile son plan ».

En pages 2 et 3, une « pre­mière grande inter­view » accor­dée à la presse régio­nale, inter­view signée Natha­lie Mau­ret (Groupe EBRA).

Jusque-là, rien de plus nor­mal pour un pré­sident nou­vel­le­ment (et démo­cra­ti­que­ment) élu. Il ne s’agissait bien enten­du pas d’une prise de parole des­ti­née à « relan­cer » une cam­pagne des légis­la­tives en léger manque de dyna­mique pour le par­ti pré­si­den­tiel, comme le sug­gère l’article.

Tou­te­fois, une pre­mière alerte nous vient avec l’édi­to­rial de Franck Buchy, sobre­ment inti­tu­lé : « Refon­da­tion in vivo ».

L’on y apprend que le chef de l’état « se devait d’agir, autant pour sou­le­ver la tor­peur des 5 pre­mières semaines de son second man­dat, que pour revi­go­rer les can­di­dats de la majo­ri­té pré­si­den­tielle en mal de bous­sole dans les cir­cons­crip­tions »

Ah bon ? Il ne s’agissait donc pas de pré­ci­ser les axes du pro­gramme pré­si­den­tiel pour les 5 ans à venir ? C’était donc une prise de parole offi­cielle, forte, (comme toutes les prises de parole de M. Macron), pour ten­ter de relan­cer une cam­pagne électorale.

Et pour ceux qui n’auraient pas bien com­pris, l’éditorialiste des DNA enfonce le clou : « Le Pré­sident reprend la main, plus déter­mi­né que jamais (…) son ambi­tion de refon­da­tion ne l’a jamais quit­té. Il ne pou­vait se taire plus long­temps »

On pou­vait dès lors s’attendre à ce que les DNA (le groupe EBRA) accordent dès le len­de­main 2 pleines pages aux deux prin­ci­paux  groupes n’appartenant pas au mou­ve­ment pré­si­den­tiel, à savoir Madame Le Pen et Mon­sieur Mélen­chon. Avec pour chacun(e) un édi­to­rial sinon com­plai­sant, à tout le moins non dévalorisant.

Connais­sant l’impartialité maintes fois démon­trée des DNA à l’égard du pré­sident Macron, c’est donc avec impa­tience que j’attendais l’édition de ce jour.

Il a fal­lu déchanter.

Le titre en Une : La cam­pagne enfin lancée ?

Et cette pré­ci­sion : « L’entretien (de M. Macron) a réveillé la gauche comme la droite (…) encore une fois, c’est le pré­sident qui mène les débats ».

Je n’avais pas remar­qué que la gauche, unie sous la ban­nière de la NUPES, était endor­mie. Mais puisque les DNA le disent…

En page 2, sous un for­mat de 2/3 de page seule­ment cette fois-ci, un article qui certes, cite quelques réac­tions d’opposants (Alexis Cor­bières pour LFI, Fran­çois Xavier BELLAMY pour LR, …) et soyons juste, le der­nier tiers de la page est par­ta­gé entre Mélen­chon et Bar­del­la pour le RN.

Mais un article qui glo­ba­le­ment, reste  assez flat­teur pour M. Macron, y déve­lop­pant com­plai­sam­ment  ses posi­tions, y com­pris ses attaques les plus dures contre Mélen­chon et Le Pen, accu­sés de « conduire un pro­jet de sou­mis­sion et de désordre ».

Au pas­sage on apprend que « la ques­tion du pou­voir d’achat avait  été éclip­sée par la polé­mique sur le chaos au stade de France », et que heu­reu­se­ment, grâce à M. Macron et à sa cam­pagne « éclair » (c’est de sai­son, les orages) le sujet est remis à l’ordre du jour.

Mer­ci M. Macron, on avait oublié en effet que depuis de longs mois, une cer­taine équipe autour de M. Mélen­chon  bataillait sur le thème, pré­ci­sé­ment, du pou­voir d’achat, avec le SMIC à 1500€ etc…

L’éditorial de Fré­dé­ric VEZARD, titré « un Macron et ça repart ! » nous apprend, igno­rants que nous sommes, « qu’il a suf­fi que le pré­sident prenne la parole pour que sou­dain, l’on se sou­vienne qu’une cam­pagne élec­to­rale est en cours ».

Et pour faire bonne mesure, l’éditorialiste impar­tial dis­tri­bue les mau­vais points au RN, à LR, gar­dant pour la fin la NUPES, « cet objet poli­tique indé­fi­nis­sable, qui pas­sé de l’effet « waouh » ini­tial, cache ses frac­tures idéo­lo­giques et son pro­gramme ten­ta­cu­laire der­rière la figure unique et omni­pré­sente de Jean-Luc Mélen­chon ».

On ne pour­ra pas repro­cher aux DNA et à son édi­to­ria­liste de cacher leur jeu…

Une ques­tion reste posée, à mon avis : Y a‑t-il un « temps de parole » ou d’interview qui soit comp­ta­bi­li­sé par une quel­conque auto­ri­té de contrôle, qui aurait pu accor­der une sur­face au moins équi­va­lente aux 2 pages d’interview de M. Macron ce same­di, aux oppo­si­tions de gauche et d’extrême droite ?

Pierre Tho­mann, ouvrier syn­di­ca­liste retraité

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