Dimanche 25 jan­vier: aéro­port d’A­thènes, 17 h.

Titres de la presse inter­na­tio­nale:  « Syri­za favo­rite », « Dra­ghi et Tsi­pras: les nou­veaux visages de l’Eu­rope » « La Grèce vote contre l’aus­té­ri­té », « Le temps de Syri­za », « Le diable est à la porte », mais de nom­breux jour­naux – sur­tout anglais – n’é­voquent pas les élec­tions en pre­mière page et l’E­quipe en reste à « L’O.M ne répond plus ».

 Tra­jet aéro­port centre ville en bus :

Grand calme, peu de cir­cu­la­tion, très peu de ban­de­roles,  forces de police qua­si absentes.

18 h. place Syn­tag­ma:

Quelques dizaines de per­sonnes ras­sem­blées, quelques stands; ni ban­de­roles, ni dis­cours; un grand écran sur la place, nom­breux véhi­cules tech­niques de trans­mis­sion télé.

A 300 mètres devant un bâti­ment du minis­tère de l’E­co­no­mie le stand des femmes d’en­tre­tien licen­ciées par le Minis­tère (500 per­sonnes « licen­ciées Troï­ka » dit-on ici) depuis près de deux ans pour rai­sons d’é­co­no­mies; ban­de­roles avec slo­gans et image du « Che » peints.

Une tren­taine de 30 femmes pré­sentes, plus des mili­tants belges qui  évoquent leur gou­ver­ne­ment « d’ex­trême droite » avec nous.

Entre­tiens, échanges, grâce à eux et à une petite équipe anglaise qui réa­lise un repor­tage docu­men­taire; les licen­ciées  attendent les résul­tats élec­to­raux devant un petit poste de T.V.

Elles se relaient depuis 595 jours et elles  disent  « qu’ici bat le cœur de Syriza ».

 19h:

Pre­mières esti­ma­tions des résul­tats élec­to­raux: on me dit « c’est très bon et ce sera peut être la majo­ri­té abso­lue pour Syri­za »; calme dans les rues, sur la place, au stand…

 19h.30 à 23 h:

Déam­bu­la­tions en centre ville; arrêt devant un stand de « Nou­velle Démo­cra­tie », grande per­dante du scru­tin, grand écran et nom­breuses télé­vi­sions; une cen­taine de personnes?

Inter­view par une T.V (laquelle ?); je dis ma convic­tion de  l’im­por­tance pour la Grèce et l’Eu­rope de la vic­toire de Syri­za; jour­na­liste un peu sur­prise par cette ardeur, moi qui suis  pour­tant « Fran­çais et   démo­crates » dit- elle ; inter­view diffusée ?

23h. siège de Syriza:

300 per­sonnes peut être, peu expan­sives mal­gré quelques applau­dis­se­ment à la sor­tie de res­pon­sables poli­tiques connus;  dra­peaux de Syri­za et télévisions.

En atten­dant  la sor­tie de Tsi­pras dis­cus­sion avec un jeune Fran­çais qui a de la famille grecque et vit à Athènes quelques mois par an depuis des années; il fait par­tie de ces nom­breux jeunes  qui « taguent » sys­té­ma­ti­que­ment  sur tous les murs et devan­tures de la ville  (bâti­ments publics, immeubles pri­vés, églises  même…)  le centre d’Athènes est un gigan­tesque mur tagué.

Il  dit l’at­ten­tisme des gens, le désen­chan­te­ment géné­ral et sur­tout de la jeu­nesse, la cor­rup­tion, le clien­té­lisme chro­nique, l’im­plo­sion sociale, l’im­por­tance de l’en­traide fami­liale, l’é­co­no­mie au noir, les petits bou­lots, raconte  les pour­suites et vio­lences  police et jeunes (bri­gade del­ta sur­tout )  – mais pas pour les tags dont les poli­ciers se dés­in­té­ressent; il dit aus­si le scep­ti­cisme par­ta­gé  devant le chan­ge­ment annon­cé  et le vote de ce jour, mais  il dit aus­si qu’en cas d’é­chec ce sera « Aube dorée » et qu’ « il faut que ça marche ».

Il s’in­quiète de l’im­por­tance des nom­breux cadres du Pasok qui ont rejoint Syri­za et qui sont d’a­bord des pro­fes­sion­nels de la politique.

 Tsi­pras sort du siège de Syri­za et part direc­te­ment en voi­ture; applau­dis­se­ments, quelques klaxons de voi­tures qui passent, ambiance joyeuse être  mais sur­tout grave…

 Vers minuit: de nou­veau place Syntagma

Tsi­pras vient de finir son allo­cu­tion; 3000 per­sonnes ? Nom­breux dra­peaux de Syri­za, quelques  dra­peaux ita­liens, espa­gnols, un fran­çais, quelques pan­cartes anti – Mer­kel,  « Ban­dié­ra Ros­sa » au Hit parade, l’In­ter­na­tio­nale enten­due, une fois,  chants grecs, danses, pétards, peu de slo­gans, grillades, joie tran­quille et profonde…

Tsi­pras a fait son dis­cours à quelques dizaines de mètres de la sta­tue d’A­thé­na sur une colonne ionique  qui encadre le bâti­ment de l’A­ca­dé­mie voi­sine dont la frise illustre la nais­sance de la déesse; nous savons tous qu’elle était déesse guer­rière mais aus­si déesse de la sagesse, pro­tec­trice d’Athènes.

 Vers  2 heures: centre ville

Résul­tats confir­més, pas de klaxon, pas d’at­trou­pe­ments, les écrans télé des « tavernes » retrans­mettent des émis­sions poli­tiques et des matchs de foot, qua­si à égalité.

 26, 27, 29, 30  jan­vier, dans Athènes :

Ani­ma­tion com­mer­ciale habi­tuelle dans le centre ville,  quelques rares tou­ristes, temps instable, quelques averses.

Au stand des femmes de ménage licen­ciées, tou­jours en place ce 29 jan­vier, on a bien enten­du l’an­nonce faite par le nou­veau  ministre de l’é­co­no­mie de réem­bau­cher 2000 fonc­tion­naires, dont les 500 femmes de ménage licen­ciées il y a deux ans; sourires…

 Same­di  31 jan­vier, retour France et de nou­veau les médias  fran­çais et beau­coup de commentaires…

Mais peut ‑être nos experts  n’ont ils  pas bien pas com­pris ce qui s’est pas­sé en Grèce le 25 avec le vote Syri­za ?  Les  quatre cent plis des jupes des evzones qui sont la garde d’hon­neur  du Par­le­ment et du palais pré­si­den­tiel rap­pellent pour­tant  les quatre cent ans d’oc­cu­pa­tion otto­mane et la ques­tion de la dette  est une constante his­to­rique de l’his­toire grecque depuis  la pre­mière guerre mon­diale (envers la Grande Bre­tagne et l’Allemagne.…).

 Et s’il s’a­gis­sait aus­si (d’a­bord ?) d’une révolte patrio­tique? D’une affir­ma­tion de fier­té, de digni­té et d’in­dé­pen­dance natio­nale ? L’al­liance de Syri­za pour gou­ver­ner avec un par­ti de la droite natio­na­liste va  dans ce sens… et ne jamais oublier qu’en Grèce  on peut voir des sta­tues de reli­gieux armés de mitraillettes devant des monas­tères où flotte le  dra­peau national…

Chris­tian Rubechi