Survivance anachronique des temps médiévaux où les seigneurs finançaient leurs expéditions guerrières en rançonnant de la sorte voyageurs et marchands, l’idée d’un péage visant les voitures particulières pour remédier à l’état défectueux du réseau routier vient d’aboutir à une concrétisation remarquée en Allemagne, et loin d’être consensuelle.

Prolongeant celle déjà instaurée, avec sans doute plus de pertinence, pour les poids lourds en 2005, la « Pkw-Maut » était en discussion depuis 1990, réclamée par plusieurs dirigeants de la droite CDU-CSU à partir de 2010, souhaitée particulièrement en Bavière à l’occasion d’un sondage qui exprimait le sentiment d’incompréhension à devoir payer pour rouler sur les autoroutes suisses et autrichiennes, alors que les ressortissants de ces deux pays alpins circulent gratuitement en Allemagne.

« On paie dans pratiquement tous les pays d’Europe, c’est pourquoi les étrangers devront désormais aussi payer en Allemagne : c’est une question de justice », a beau jeu de dire le social-chrétien Horst Seehofer. Le débat en accompagnait un autre, celui de la privatisation du réseau autoroutier, présentée comme une alternative au péage, mais qui n’est pas pour autant écartée, au contraire : l’instauration de la « Maut » semble bien en être le prélude, sous des formes plus ou moins rampantes. D’ailleurs, les recettes issues de la taxe sur les poids lourds des camions financent bel et bien des projets autoroutiers privés.

La chancelière y était opposée un temps, les juristes du Bundestag ont estimé le dispositif contraire aux dispositions européennes, nombre de Länder frontaliers, dont ceux voisins d’Alsace et de Lorraine, n’en voulaient pas, conscients des retombées négatives pour les échanges de proximité, mais rien n’y a fait : la Bavière, gros contributeur financier fédéral, a joué de son poids jusqu’au chantage, la droite allemande a troqué la taxe routière contre l’instauration du salaire minimum.

Et voici la Pkw-Maut prévue au 1er janvier 2019, grâce à l’abstention décisive de la Thuringe.

Mais ce qui fâche, c’est que les conducteurs allemands pourraient récupérer la taxe versée grâce à un dispositif de crédit d’impôt (Zkf-Steuer) selon le degré d’émission polluante de leur automobile. De ce fait, ne sont pleinement concernés que les usagers étrangers, ce qui pose problème en termes d’égalité au sein de l’Union européenne (les étrangers ne paieraient cependant qu’en empruntant les autoroutes).

Pour cette raison, les députés autrichiens et luxembourgeois du Parlement de Strasbourg ont protesté, et l’Autriche envisage de saisir les instances ad hoc de l’UE.

Pour la « Süddeutsche Zeitung » du 7 avril dernier, ce sont bel et bien « de nouvelles frontières qui se dressent en Europe », et la mesure est en effet susceptible de contrarier de manière significative la circulation transfrontalière qui, pour des raisons commerciales, touristiques ou culturelles, s’est développée en direction de l’Allemagne ces dernières années.

Ainsi, entre autres, l’intérêt du Pass-Musées, cette brillante idée de la Coop bâloise, pourrait s’en voir diminuer, alors que, de Nancy à Berne et de Stuttgart à Besançon, elle était parvenue à dessiner dans ce coin d’Europe une carte originale de mise en commun culturelle pan-nationale.

En est-ce fini du Rhin supérieur comme « les deux pages d’un livre ouvert » selon l’image de René Schickele ?

Daniel MURINGER

“Initiative citoyenne alsacienne” (ICA) vient de lancer une pétition contre la vignette (Maut) allemande (voir le texte ci-dessous). Nous vous proposons de la signer. Pour ce faire, utiliser le lien ci-dessous :


https://www.change.org/p/initiative-citoyenne-alsacienne-ica-p%C3%A9tition-ica-contre-la-vignette-maut-allemande?recruiter=105606630&utm_source=share_petition&utm_medium=email&utm_campaign=share_email_responsive

Vous pouvez aussi signer sur le site : www.ica2010.fr  colonne de droite, Pétition ICA contre la vignette allemande” :

La vignette allemande pour les voitures va arriver. Et elle sera chère pour les usagers Alsaciens (jusqu’à 130 € l’an), qui pour des raisons de travail, d’achats, de tourisme et de loisir ou pour toute activité économique franchiront la frontière. Tiens, il existe donc encore des frontières. Cette « PKWMaut » est discriminatoire, parce qu’elle est fondée sur la nationalité. Elle est contraire au droit européen, en ce qu’elle privilégie les usagers allemands. En effet, ces derniers, également soumis à la « Maut », profiteront d’une ristourne fiscale et n’auront donc pas, en la matière, de charges supplémentaires à supporter.

À notre connaissance plusieurs députés européens, mais pas des Français, ont à ce sujet alerté la Commission européenne. Il en est de même pour plusieurs pays européens ayant une frontière commune avec l’Allemagne, à l’exclusion de la France. L’Autriche, par exemple, menace l’Allemagne d’un recours devant la justice européenne. On s’étonne du silence français et de l’inaction de nos députés européens, comme de celui de la classe politique et du monde économique en général. Personne en Alsace pour défendre les intérêts alsaciens ? Il est vrai que désormais « l’Alsace n’existe plus », selon les propos du président Hollande. Pour la faire exister, il nous faut, nous citoyens Alsaciens, nous solidariser et nous mobiliser pour faire apparaître de fortes demandes de défense des intérêts alsaciens !

Nous, signataires de la présente pétition, demandons au gouvernement français et aux députés français au Parlement européen, à la classe politique et au monde économique en général de se soucier des frontaliers alsaciens et d’entreprendre toutes les démarches possibles pour qu’au moins dans les espaces transfrontaliers soit mise en place une disposition exonérant les usagers des routes allemandes ou une ristourne fiscale à leur profit.