« Avec un plan comp­table en tête, on va loin dans la vie ! »

Alterpresse68: Mon­sieur Jor­dan, vous comp­tez par­mi les 72 signa­taires de la tri­bune en sou­tien à Emma­nuel Macron, publiée le 9 juin par le Jour­nal du dimanche, sous le titre « La Répu­blique des maires et des élus locaux ». Vous y êtes de tous le moins connu. 

Fabian Jor­dan: C’est nor­mal, j’ai beau avoir inven­té la « jour­née citoyenne », je ne suis qu’un citoyen ordi­naire, que l’on fête une fois l’an, et se couche à 22h30. C’est dire dans quel ordi­naire état je la ter­mine ! En véri­té, je suis la cau­tion inco­gni­to du macronisme.

AP68: En effet, à point tel que l’on a reti­ré votre fiche Wiki­pé­dia, pour insuf­fi­sance de renommée !

F.J. Je sais, c’est bien regret­table. Mais les trom­pettes de la renom­mée ne sont pas mon fort. Je pra­tique davan­tage l’accordéonisme poli­tique. On me plie, on me tord, mais je conti­nue à ven­ti­ler ma petite musique. La vie ne tient qu’à un souf­flet, je ne le sais que trop depuis ma pré­si­dence de M2A !

AP68: Vous dites qu’à l’origine de votre « jour­née citoyenne » se trouve le constat de l’insuffisance des liens sociaux face à une socié­té repliée sur elle-même, de plus en plus indi­vi­dua­liste. Pen­sez-vous que mani­fes­ter votre sou­tien à une équipe gou­ver­ne­men­tale qui exa­cerbe des choix poli­tiques et sociaux favo­ri­sant l’individualisme est cohé­rent de ce point de vue ? 

F.J. Oui, bien sûr. Tout se tient. Comme la corde le pen­du ! Plus il y aura d’individualisme, plus les jour­nées citoyennes, pen­dant les­quelles les com­munes font tra­vailler gra­cieu­se­ment les admi­nis­trés vont gran­dis­santes et se multiplient !

AP68: Plus que la dimen­sion sociale, vous recon­nais­sez donc la fonc­tion éco­no­mique de votre initiative ? 

F.J. Je vous répète ce que j’ai déjà dit par ailleurs : « Au début, je n’ai pas créé la jour­née citoyenne dans un but finan­cier. Mais les com­munes subissent une baisse de leurs dota­tions. Pour com­pen­ser, nous avons la pos­si­bi­li­té de bais­ser nos frais de fonc­tion­ne­ment. C’est ce que nous per­mettent de faire les jour­nées citoyennes ».

AP68: Et appli­qué à M2A ? 

F.J. L’extension du parc-expo de Mul­house, dont le coût s’élève à 13 mil­lions d’euros. C’est bien trop éle­vé. Elle sera donc finan­cée par une éco­no­mie du per­son­nel inter­com­mu­nal de nettoyage.

AP68: C’est-à-dire ?

F.J. Rott­ner et Lutz devront jouer les éboueurs béné­voles tous les week-ends afin d’expier la quan­ti­té d’ordures qu’ils m’ont balan­cé à la gueule ! Ce sera aus­si leur fête, je vous le promets !

AP68: Vous n’allez pas oser !

F.J. Vous ver­rez bien. Et puis on manque de maitres-nageurs dans l’agglomération. Ils auront donc éga­le­ment la charge du bas­sin de Pierre et Marie Curie !

AP68: Mais vous allez fer­mer la piscine !

F.J. Non, je vais obtu­rer le bas­sin, et en pro­fi­ter pour dis­per­ser les deux maitres-nageurs dans la cou­lée, par la même occa­sion. C’est très différent. 

AP68: Vous n’y allez pas de main morte ! On ne vous connais­sait pas cette poigne. Est-ce donc la vraie rai­son de votre élec­tion à M2A ?

F.J. On ignore de quoi je suis capable. En 2014, à Ber­willer, j’ai dis­per­sé un concur­rent à l’élection muni­ci­pale. Une honte. Il pos­sé­dait un sau­na liber­tin et un club de nudistes ! Je te l’ai fou­tu à poil avant même qu’il ne se présente ! 

AP68: Oui, mais cela n’explique pas votre élec­tion à la tête de l’agglomération !

F.J. Que vou­lez-vous que je vous dise ? Les maires étaient réso­lus à évi­ter Rott­ner pour suc­cé­der à Bockel. Il était temps que la ville centre de gou­gna­fiers soit délo­ca­li­sée dans sa loin­taine péri­phé­rie. C’est tom­bé sur moi, simple maire, accor­déo­niste et comp­table de pro­fes­sion. Vous voyez, avec un plan comp­table en tête, on va loin dans la vie ! Et on finit tou­jours par trou­ver son ins­pi­ra­tion chez un expert-comp­table comme Macron…