Qui dit que les syndicats français ne peuvent s’entendre ? Le tract (voir illustration) distribué à Mulhouse porte les sigles de (par ordre d’apparition sur la feuille…) la CGT, de la CFE-CGC, de la CFTC, de la FSU, de FO et des Retraités de la Fonction publique… Seule manque la CFDT. On se demande bien pourquoi ! Ils donnent rendez-vous à tout(es) les retraités le 28 septembre à 11, place de la Bourse à Mulhouse pour un grand rassemblement de protestation.

tract

Le pou­voir d’achat en berne !

E. Macron l’a dit : avec 1.200 euros bruts de pen­sions, on est favo­ri­sé ! Et il faut donc  faire payer les heu­reux béné­fi­ciaires ! Pre­mière étape: 1,7% d’augmentation de la CSG que les 0,8% d’augmentation des retraites en sep­tembre ne com­ble­ra que très par­tiel­le­ment. Alors, des nan­tis, les retraités ?

 Depuis les réformes Bal­la­dur en 1993, les retraites ont per­du 30% de leur pou­voir d’achat. Depuis avril 2013, elles n’ont plus été reva­lo­ri­sées alors que les prix conti­nuaient de grim­per. Résul­tat : une perte de pou­voir d’achat de 6% en quatre ans !

Le Secours Popu­laire Fran­çais publie annuel­le­ment, avec l’institut IPSOS, un baro­mètre sur la pau­vre­té. Dans l’édition 2017, il appa­raît que 49% des retrai­tés ont connu la pré­ca­ri­té ou la redoutent. 31% peinent à payer une mutuelle, 39% renoncent à des actes médi­caux mal remboursés.

Le pays des « nan­tis » n’est visi­ble­ment pas là !

Le baro­mètre révèle éga­le­ment que de plus en plus de retrai­tés sont contraints de reprendre une acti­vi­té pour com­plé­ter leurs reve­nus sou­vent dans des emplois  style « petits bou­lots  pénibles ».

Une autre inquié­tude appa­raît dans cette enquête SPF-IPSOS porte sur les retrai­tés qui touchent entre 1.200 et 2.000 euros de pen­sion. 68% aident leurs proches, 67% sou­tiennent des asso­cia­tions et 27% s’occupent d’une per­sonne dépen­dante ! Devant la dégra­da­tion de leur condi­tions de vie avec les diverses hausses (CSG) mais aus­si la baisse des APL, seront-ils en mesure de conti­nuer à assu­rer ces aides ?

La réforme Macron des pensions

Déci­dé­ment notre pré­sident va lais­ser son nom col­ler à des lois de reculs sociaux de grande ampleur ! Si les retrai­tés seront dans la rue le 28 sep­tembre, ce n’est pas uni­que­ment pour pro­tes­ter contre l’augmentation de la CSG.

Un dan­ger bien plus grave pèse sur eux et sur les futures retrai­tés que nous sommes tous ! Le pré­sident de la Répu­blique veut ins­tau­rer un nou­veau sys­tème de retraite. Pour le jus­ti­fier, M. Macron affirme que « pour un euro coti­sé, chaque per­sonne devrait tou­cher le même mon­tant de pen­sion », et pour y arri­ver il veut créer le sys­tème de comptes « notion­nels », c’est-à-dire virtuel.

Le prin­cipe du sys­tème de comptes notionnels

Ce compte vir­tuel est ali­men­té par les coti­sa­tions retraites sur les salaires. Au moment du départ en retraite, ce compte déter­mine un capi­tal, divi­sé par le nombre d’années d’espérance de vie pour cal­cu­ler la pen­sion annuelle.

Ce cal­cul crée une pre­mière injus­tice : pour tou­cher plus pen­dant l’ensemble de son temps de retraite, il vaut mieux avoir béné­fi­cié de meilleures condi­tions de tra­vail et vivre plus long­temps, être cadre plu­tôt qu’ouvrier (dont l’espérance de vie reste infé­rieure de 5,5 ans).

Ce sys­tème met fin aux soli­da­ri­tés puisque celui ou celle qui ne cotise pas n’alimente pas sa retraite. Il fait dis­pa­raître la majo­ra­tion de durée de coti­sa­tions pour le temps de mater­ni­té, l’éducation des enfants, le chô­mage même indem­ni­sé, la pré­ca­ri­té et le temps par­tiel… et la pen­sion de réversion.

Les inéga­li­tés accrues

Le cal­cul de la pen­sion n’est plus effec­tué sur le der­nier salaire ou les meilleures années, en éli­mi­nant les plus mau­vaises, mais sur l’ensemble de la car­rière, ce qui péna­lise les pré­caires, les per­sonnes ayant connu de mau­vaises années, du temps par­tiel impo­sé… Ce sys­tème pro­longe et ampli­fie les inéga­li­tés de la vie active.

Le cal­cul sur toutes les années de la car­rière prend en compte les pre­mières années de tra­vail, très sou­vent infé­rieures aux sui­vantes, ce qui tire vers le bas la pen­sion, ce chan­ge­ment de règles de cal­cul abou­tit mathé­ma­ti­que­ment à une dimi­nu­tion du mon­tant des retraites.

De plus, dans une période où les papy boo­mers sont encore vivants, le nombre de pen­sions aug­mente et l’équilibre finan­cier n’est pos­sible qu’en bais­sant chaque pension.

Cette baisse incite à recu­ler l’âge de départ : lorsque le futur retrai­té encore en emploi ver­ra la faible pen­sion attri­buée en cas de départ dans l’année, il repous­se­ra spon­ta­né­ment son départ en retraite.

Mieux vaut être riche et en bonne san­té que pauvre et…

Pour mettre en évi­dence l’indécence qui consiste à pré­sen­ter les retrai­tés, voire une par­tie d’entre eux, de « pri­vi­lé­giés », il faut par­ler des vrais pri­vi­lèges. Et les cal­culs de l’OFCD publiés par l’ONG Oxfam sont explicites.

Grâce à la réforme fis­cale du gou­ver­ne­ment de M. Macron, les 10% les plus riches vont gagner en moyenne 1.193 euros par an… Et les 10% les plus pauvres vont, eux, perdre 337 euros ! A l’échelle des 1% les plus riches les inéga­li­tés appa­raissent encore plus impor­tantes : la réforme de l’impôt de soli­da­ri­té sur la for­tune (ISF) fait gagner 15.000 euros par mil­lion pos­sé­dés. Pre­nons M. Arnault qui a une for­tune de 46,1 mil­liards d’euros, il pour­rait empo­cher 553,2 mil­lions de cadeaux fiscaux !

Les recettes des impôts sur les socié­tés ont bais­sé de 9 mil­liards en dix ans… Comme quoi, M. Macron pour­rait dire « c’est pas moi qui ai commencé ! ».

Alors, nan­tis les retrai­tés ? Qu’ils se nan­tissent d’une bonne paire de grolles pour battre le pavé jeu­di 28 sep­tembre… juste pour ne pas s’appauvrir un peu plus.

Michel Mul­ler