Inauguré en 1946, l’aéroport issu de la coopération franco-suisse a bien grandi, à tel point qu’il est aujourd’hui le premier aéroport du Grand Est et le 3ème de Suisse (après Zurich et Genève). Avec près de 8 millions de passagers par an, c’est un pôle économique incontournable de l’Alsace. Cependant, derrière la réussite économique se cachent de nombreux points d’ombre.
Des mesures pas très précises.
Ainsi, alors que tout le monde parle de pollution et de transition énergétique, pour l’Euroairport, le compte n’y est pas. C’est l’ADRA, l’association de défense des riverains de l’aéroport Bâle-Mulhouse qui a attiré notre attention sur diverses irrégularités et faiblesses dans la gestion de cette problématique incontournable pour la région. En effet l’Euroairport se classe 5ème parmi les cinq plus gros pollueurs industriels d’Alsace et les analyses effectuées par ATMO Grand Est, l’organisme en charge de surveiller les dépassements, ne reflètent pas efficacement la pollution réelle dans villages alentours, peut-être et malheureusement, à cause du manque de moyen de la structure. Les chiffres ne peuvent que susciter la curiosité. Entre 2009 et 2015, les émissions de NOx ont diminué de 34% alors que les mouvements ont augmenté de 29% !
Bruno Wollenschneider, le président de l’ADRA, nous explique qu’il existe plusieurs méthodes pour calculer la pollution et que c’est la plus favorable à l’Euroairport qui a été retenue. Par exemple, si la moyenne journalière de relevé des niveaux de pollution est basse, ce n’est pas le cas quand on analyse le niveau de pollution heure par heure. La présence de certaines particules nocives peut décupler selon les vents et le moment de la journée. Il manque aussi des capteurs capables de compter les particules ultra-fines produites en grand nombre par les avions et dont les effets sur la santé sont très graves. Les analyses ne reflètent donc pas la réalité et l’ADRA demande à ce que l’Euroairport remédie à ces manquements pour que les riverains soient correctement informés.
De l’argent mais rien pour l’environnement.
Soulignons aussi que malgré un chiffre d’affaires impressionnant (140 millions d’euros) et donc une balance commerciale positive, l’aéroport de Bâle-Mulhouse n’a toujours pas mis à l’ordre du jour la modernisation de ses équipements pour diminuer la pollution, comme c’est le cas dans les 2 tiers des aéroports français, avec l’absence de convertisseurs électriques 400Hz nécessaires à l’extinction des turbines auxiliaires, très bruyantes et polluantes. En comparaison avec Zurich et Genève, Bâle-Mulhouse est très en retard sur les standards en matière de traitement des données sur la pollution. L’ADRA demande aussi le plafonnement du nombre de vols et la fermeture de l’aéroport entre 23h et 6h au lieu de minuit-5h, des mesures qui auront peut-être un impact sur les bénéfices de l’EAP mais qui permettraient surtout d’améliorer la qualité de vie des habitant.e.s de Blotzheim, Saint-Louis, Bartenheim et d’autres villages proches.
On peut s’inquiéter du manque d’investissement de l’Euroairport concernant la lutte contre la pollution mais aussi de l’absence de réflexion des élus locaux sur ce sujet puisqu’ils en viennent même à soutenir la création pour 250 millions d’euros d’une voie de chemin de fer pour encourager toujours plus le transport aérien.
Augmenter le trafic aérien, un objectif irresponsable !
Avec une projection d’augmentation du trafic aérien de 4% par an pour atteindre +50% d’ici 2030, faut-il vraiment se féliciter de cette croissance qui met en danger la santé de nos concitoyen.ne.s ? Alors que le dérèglement climatique est de plus en plus visible, ne faudrait-il pas plutôt développer des alternatives à l’aviation ? Au contraire, l’avion est devenu en quelques années le concurrent direct du train pour les trajets de courtes et moyennes distances. Les impacts sanitaires, qu’il s’agisse de bruit ou de particules fines, augmenteront avec le trafic, même avec des améliorations du système. Enfin, 70% des trajets à l’aéroport de Saint-Louis sont effectués par des compagnies low-cost avec toutes les questions éthiques que cela soulève.
Mais soyons clairs : même avec des avancées techniques et des aménagements, l’aviation est devenue un véritable problème pour l’humanité. Son poids sur la qualité de l’air, nous la subissons tou.te.s, que l’on soit ou pas usagers de ce mode de transport. C’est donc l’usage de l’avion qui doit être complètement repensé dans une perspective plus écologique et sociale. Le mouvement qui se dessine pour le 17 novembre a le mérite de remettre dans le débat la fameuse taxe sur le kérosène, encore inexistante, alors qu’un avion pollue jusqu’à 30 fois plus que le train, mais aussi la dimension sociale de la transition énergétique puisque les personnes qui prennent l’avion appartiennent principalement aux classes sociales moyennes et supérieures.
Une enquête portant sur de nombreuses années a été réalisée par l’Institut Tropical Suisse et de Santé Publique avec notamment la surveillance des particules fines et ultra fines il faudra bien surveiller les revues scientifiques pour avoir les conclusions sur la région de Bâle.