N’ayez pas un pépin de santé à Thann dans les prochaines semaines ! Car le service des Urgences de l’hôpital est fermé pour six mois (au moins) à partir du 7 novembre… Pourquoi ? Officiellement en raison d’une pénurie de personnel médical. 

Après avoir fonc­tion­né avec des inté­ri­maires depuis des mois, la direc­tion a impo­sé une nou­velle orga­ni­sa­tion du tra­vail dans laquelle il ne res­tait qu’un seul méde­cin urgen­tiste la nuit alors qu’ils étaient deux jusqu’à pré­sent. Avec rai­son, les méde­cins ont refu­sé : trop dan­ge­reux, trop ris­qué. Et comme il y a un manque de pra­ti­ciens en France, ils ont vite retrou­vés un poste dans un autre hôpital.

Par sa déci­sion, l’Agence régio­nale de San­té, agence qui super­vise l’organisation des soins,  oblige donc les malades ou acci­den­tés d’appeler le 15… Qui déci­de­ra de la prise en charge adap­tée et, si besoin, orien­te­ra la per­sonne vers l’hôpital d’Altkirch, Gueb­willer ou Mul­house… Quand on sait com­bien la rapi­di­té d’intervention est sou­vent un gage de sur­vie ou de gué­ri­son en cas de pro­blèmes graves, l’errance sur les routes haut-rhi­noises à la recherche d’un urgen­tiste peut s’avérer fatale…

Mais bon, la direc­trice géné­rale de l’Agence a fait ses comptes : « Il n’y a que trois per­sonnes en moyenne qui viennent la nuit. Est-ce la peine d’avoir cinq urgen­tiste à Thann ? » ! Madame fait des comptes là où il est ques­tion de san­té, d’égalité de soins sur tout le ter­ri­toire… C’est donc le ratio « méde­cin-malade » qui ne serait pas bon… Un tan­ti­net « bou­ti­quière », la direc­trice. Mais tota­le­ment dans l’esprit du ministère.

Car ces der­niers mois, la conta­gion de la fer­me­ture à tou­ché de nom­breuses urgences : à Carhaix, à Mont­bart, à Cha­mo­nix, à l’Hôtel-Dieu à Paris… la liste est fort longue.

La chi­rur­gie et la mater­ni­té déjà visées par le passé

Et puis Thann, avait déjà connu un pro­blème de ce genre, en 2013 : la même Agence régio­nale de San­té, l’ARS, vou­lait fer­mer les ser­vices de chi­rur­gie et de mater­ni­té à l’hôpital afin de réduire les défi­cits. Après une mobi­li­sa­tion de la popu­la­tion, ces deux ser­vices de proxi­mi­té ont non seule­ment été main­te­nu, mais en plus l’hôpital de Thann a béné­fi­cié d’investissements pour les développer.

En cher­chant un peu la cohé­rence de ces inco­hé­rences, on tombe assez rapi­de­ment sur la Loi San­té que la ministre Mari­sol Tou­raine a fait votée début 2016. Selon les experts, cette loi est dans le droit fil de celles déjà votées sous la pré­si­dence Sarkozy…

Cette nou­velle loi san­té pré­voit une grande restruc­tu­ra­tion du sys­tème hos­pi­ta­lier fran­çais. Cela se tra­dui­ra entre autre, par la créa­tion de Grou­pe­ments Hos­pi­ta­liers de Ter­ri­toire. Ain­si, au 1er juillet 2016, les quelques 1000 éta­blis­se­ments de san­té actuels seront regrou­pés dans 170 GHT, en fonc­tion de leur loca­li­sa­tion géographique.

Et la CGT de rap­pe­ler per­fi­de­ment : « Ca y est, les outils sont aujourd’hui en place  pour mettre en œuvre les 16 000 sup­pres­sions de lits et les 22 000 sup­pres­sions de postes». Car évi­dem­ment, pas­ser de 1.000 éta­blis­se­ments à 170 regrou­pe­ments ne se fera pas sans casse. Et donc des fer­me­tures d’hôpitaux ou de ser­vices : car il faut ren-ta-bi-li-ser !

Les consé­quences, c’est l’UFC Que Choi­sir qui les décrit : « Fin juin, 3 mil­lions de per­sonnes vivaient dans un désert médi­cal, et l’accès à un méde­cin pou­vait être pro­blé­ma­tique pour 15 mil­lions de Fran­çais. » pour conclure : « Ce qui est à redou­ter ce sont les consé­quences en termes de qua­li­té de soins et de sécu­ri­té des patients ». Et cela aus­si à un coût que les dog­ma­tiques de la réduc­tion des défi­cits ne prend en compte : quand des « éco­no­mies » aggravent le coût in fine, on marche légè­re­ment sur la tête !

Il y a donc de l’émoi dans la val­lée ! Les élus s’offusquent… même ceux qui ont voté toutes les lois pré­voyant la réduc­tion des bud­gets de l’Etat et sin­gu­liè­re­ment du minis­tère de la San­té. Hypo­cri­sie et dupli­ci­té quand tu nous tiens !

Si on veut être utile, il y a mieux à faire. Thann, c’est une jolie petite ville, une superbe col­lé­giale, d’agréables rues à visi­ter. Allez‑y, il y a deux dates très oppor­tunes : les 5 et 8 novembre, des ras­sem­ble­ments auront lieu devant l’établissement pour exi­ger le main­tien des urgences. Ce qui a été réus­si avec la chi­rur­gie et la mater­ni­té doit bien être pos­sible avec les urgences… Ne lais­sons pas les Than­nois tout seuls, des fois que vous fas­siez des ran­don­nées sur les som­mets aux alen­tours, qui sait si vous n’aurez pas, un jour ou une nuit, besoin d’un bon urgen­tiste… Evi­dem­ment, je ne vous le sou­haite pas, mais ne vaut-il pas mieux pré­ve­nir que guérir !

Michel Mul­ler