La fameuse gifle que Manuel Valls a encaissé en Bretagne a fait couler beaucoup d’encre. Entendons nous bien, la gifle n’est évidemment pas une méthode, ni pour l’éducation des enfants, ni pour un premier ministre. Malheureusement ce sont plus souvent les enfants qui en sont destinataires plutôt qu’un ancien premier ministre.

Mais d’autres faits, bien plus impor­tants, qui dénote une autre vio­lence grave, se sont pas­sés récem­ment et n’ont pas conduit à tant de titres ou de commentaires.

Par exemple, la démis­sion de 11 méde­cins urgen­tistes sur les 15 de l’hôpital de Dreux. Comme les 13 sur 26 à l’hôpital d’Avignon en octobre dernier.

Cela fait des mois que les pra­ti­ciens de Dreux avaient aler­té leur tutelle sur les mau­vaises condi­tions de tra­vail, sur le manque de moyens, le manque de per­son­nel, le manque de consi­dé­ra­tion, bref, un manque de tout.

Et ils avaient même fait grève durant l’été 2015, pour les mêmes rai­sons. Ce n’est pas rien, une grève aux urgences d’une ville impor­tante : pour­tant, il ne s’est rien pas­sé. Les auto­ri­tés, la direc­tion de l’hôpital, le minis­tère lui-même, se sont sûre­ment dits que les méde­cins sont sen­sibles aux souf­frances des malades et revien­dront dans le rang après avoir éta­lé leurs états d’âme.

20 h sur un brancard !

Et c’est vrai qu’ils ont repris leur bou­lot dans des condi­tions de plus en plus dures : dans le jour­nal régio­nal, L’Echo Répu­bli­cain, ils s’expliquent : « La semaine der­nière nous avons des patients qui ont atten­du jusqu’à dix heures, une femme de 97 ans a pas­sé 20 heures sur un bran­card, on ne trouve plus de lits en aval, parce qu’ils ont été fermés. »

La direc­trice de l’hôpital s’étonne, elle ne com­prend pas ! Et c’est vrai qu’elle ne com­prend rien appa­rem­ment à la lec­ture de sa réac­tion dans le même quo­ti­dien : «  Je ne vois pas ce qui expli­que­rait ces éven­tuelles démis­sions alors que des choses ont été faites aux urgences depuis un an. Je devais d’ailleurs avoir une réunion de négo­cia­tion sur le temps de tra­vail avec les urgen­tistes dans quinze jours ». 

Mais, chère Madame, les urgen­tistes ne vous parlent pas de temps de tra­vail, ils vous parlent du temps que passe une dame de 97 ans sur un bran­card, ils vous parlent de fer­me­ture de lits en aval, ils vous parlent de la pré­ca­ri­té galo­pante qui pousse les malades à aller plu­tôt aux urgences que de voir leur géné­ra­liste, parce que les urgences, c’est gratuit…

Voyez-vous Madame, du haut de votre fonc­tion et du sale bou­lot qu’on vous fait faire en exi­geant des éco­no­mies à tour de bras, vous mépri­sez des femmes et des hommes qui gèrent les souf­frances phy­siques et bien sou­vent morales.

Vous gérez, Madame, sans que cela semble vous trou­bler, avec les belles méthodes dignes de l’ultralibéralisme à laquelle votre tutelle s’est convertie.

Et les urgences de Thann ?

Cela me rap­pelle un autre dos­sier, ici, dans le dépar­te­ment, celui des urgences de Thann. Rap­pe­lez-vous, cela date de quelques mois : les urgences de l’hôpital de Thann, dont des méde­cins avaient démis­sion­né eux-aus­si, devaient être fer­mées durant 6 mois à par­tir du 7 novembre. Cela avait fait du bruit car élus, syn­di­cats, popu­la­tions s’étaient for­te­ment oppo­sés à cette fer­me­ture, ils avaient même mani­fes­té pour cela.

On a beau­coup moins par­lé de la déci­sion de l’Agence régio­nale de san­té du Grand Est du 19 décembre qui a déci­dé que la fer­me­ture ne durait pas que 6 mois mais qu’elle était défi­ni­tive. Toute une val­lée n’avait plus droit à un ser­vice d’urgence 24 h sur 24. A la place, « un centre de soins non pro­gram­més, per­met­tant de prendre en charge en jour­née les urgences non vitales, devrait voir le jour. » « Devrait », on note le conditionnel.

Com­ment peut-on dès lors s’étonner que le dis­cours poli­tique n’ait plus aucune cré­di­bi­li­té. Les fausses pro­messes, le pas­sage en force pour impo­ser des mesures impo­pu­laires à un pays qui n’en veut pas, la répres­sion contre ceux qui exercent leur droit de grève et de mani­fes­ta­tion comme cela fut le cas hier au tri­bu­nal cor­rec­tion­nel de Stras­bourg qui veut condam­ner six syn­di­ca­liste à de fortes amendes pour avoir manifester.

Alors, il est vrai que la gifle à l’ancien pre­mier ministre n’était pas la bonne manière, mais souf­frez que, dans notre France actuelle, il y a quand même des coups de pieds au c… qui se perdent…

MM