La mai­son de la citoyen­ne­té mon­diale de Mul­house accueillait jeu­di 20 sep­tembre 2018 une confé­rence de presse orga­ni­sée par le col­lec­tif « Non au RSA contre bénévolat ».

André Bar­noin, Laurent Schnei­der et Roger Win­te­rhal­ter, membres du col­lec­tif, y expo­saient les motifs de la colère du réseau d’association inter­ve­nant dans le domaine de l’exclusion.

Troubles bipo­laires

André Bar­noin contex­tua­li­sa son inter­ven­tion en sou­li­gnant les dif­fi­cul­tés crois­santes ren­con­trées par les asso­cia­tions inter­ve­nant dans le champ social et l’aide aux chô­meurs (alors même que 70 000 emplois aidés dis­pa­raî­tront en 2019).

Celles-ci répondent à des injonc­tions sociales mul­tiples, les pou­voirs publics leur deman­dant tou­jours plus sans se sou­cier des causes pro­fondes et des moyens à mettre en œuvre pour ten­ter d’agir dura­ble­ment sur ces causes. Comble du cynisme, elles sont accu­sées par cer­taines ins­ti­tu­tions publiques d’entretenir un cli­mat d’assistanat ! Tan­dis que les auto­ri­tés dépar­te­men­tales prennent des mesures de bric et de broc, rien n’est fait pour agir sur le long terme.

Pro­messes non tenues

Laurent Schnei­der rap­pelle les pro­messes non tenues par les poli­tiques sur le sujet de la pau­vre­té, notam­ment par le dépu­té de la 6e cir­cons­crip­tion du Haut-Rhin (LREM) Bru­no Fuchs, à l’occasion d’une ren­contre orga­ni­sée l’année der­nière dans la salle du PAX. Et de sou­li­gner com­bien le dis­cours poli­tique actuel, qui vou­drait que cha­cun soit per­son­nel­le­ment res­pon­sable de sa situa­tion, ajoute encore aux dif­fi­cul­tés des asso­cia­tifs. Il sou­ligne la néces­si­té d’un reve­nu de base pour tous, et la pro­mo­tion de l’éducation populaire.

Dis­cours opaque de transparence

Ces don­nées limi­naires s’ajoutent aux troubles liées au dis­cours ambi­gu du Conseil dépar­te­men­tal quant au rap­port entre béné­vo­lat et droit au RSA. Bien que l’institution dépar­te­men­tale pré­tende que les allo­ca­taires n’y sont pas tenus (notam­ment depuis la déci­sion du Conseil d’E­tat, décryp­tée dans cet article), la pla­te­forme béné­vo­lat créée à l’intention des allo­ca­taires du RSA (outil ouvert à tous, selon le dépar­te­ment) est tou­jours opé­ra­tion­nelle sur le site de l’institution, fai­sant ain­si dou­blon avec d’au­then­tiques réseaux spé­cia­li­sés dans le béné­vo­lat, tel la FFBA (fédé­ra­tion fran­çaise du béné­vo­lat asso­cia­tif), ou le réseau « Alsace mou­ve­ment asso­cia­tif » !

Roger Win­te­rhal­ter indique que la confiance n’est pas réta­blie avec les auto­ri­tés dépar­te­men­tales. Il s’agit de les inter­pel­ler en ques­tion­nant les choix poli­tiques qui pri­vi­lé­gient l’argent au détri­ment du bien être de la population.

1 mul­hou­sien sur 3 sous le seuil de pauvreté

Laurent Schnei­der conclut en rap­pe­lant qu’il s’agit d’abord de se battre contre le mythe de la réus­site indi­vi­duelle, donc de tous contre tous. Réin­ven­ter un ave­nir col­lec­tif est plus que jamais néces­saire, à l’heure où 1 mul­hou­sien sur 3 vit sous le seuil de pauvreté !

Appels et sou­tien international 

Par ailleurs, les « Asso­cia­tions Unies 68 », col­lec­tif d’association qui inter­vient notam­ment dans le domaine du loge­ment, appelle à une réorien­ta­tion de la poli­tique d’insertion du Conseil dépar­te­men­tal du Haut-Rhin, contre « la fausse bonne idée » du RSA contre béné­vo­lat, les visions régres­sives à l’égard des plus fra­giles, le retour de « la police des pauvres » et des « tra­vaux gra­tuits », « la déva­lo­ri­sa­tion du tra­vail et du béné­vo­lat », qu’entraîne de telles mesures.

A noter que le col­lec­tif a reçu le sou­tien du syn­di­cat alle­mand Ver.di de Stutt­gart, au tra­vers de Syl­via Wize­mann, membre de la com­mis­sion chô­mage du syn­di­cat, qui dans une décla­ra­tion de soli­da­ri­té, fus­tige « l’obligation de faire du béné­vo­lat », et rap­pelle le besoin de créer des « emplois néces­si­tant des coti­sa­tions sociales à par­tir des­quelles nous pou­vons vivre, et pas de tra­vail for­cé (y com­pris le tra­vail volon­taire, l’emploi pré­caire, etc.) de 0 euro à des salaires insuffisants ! ». 

Plan pau­vre­té, pauvre plan !

A l’instar du MNCP (mou­ve­ment natio­nal des chô­meurs et pré­caires) les inter­ve­nants s’interrogent sur les conclu­sions issues du plan pau­vre­té annon­cé par Emma­nuel Macron. En omet­tant de reva­lo­ri­ser les mini­ma sociaux pour 9 mil­lions de pauvres, en dimi­nuant les moyens alloués à l’économie sociale et soli­daire, que vau­drait un reve­nu uni­ver­sel d’activité, dont l’appellation relève de l’oxymore, ou un ser­vice public de l’insertion, alors par exemple que le volume des contrats aidé conti­nue sa décrue ?

Agir

Pour ten­ter de peser sur le débat public, et exi­ger l’abandon du pro­gramme RSA contre béné­vo­lat, le col­lec­tif orga­nise avec le MNCP, les asso­cia­tions unies du 68, diverses asso­cia­tions, des par­tis poli­tiques et des syn­di­cats de sala­riés, un ras­sem­ble­ment devant le siège du Conseil dépar­te­men­tal du Haut-Rhin, à Col­mar, le 27 sep­tembre 2018 à par­tir de 14 heures.

Une péti­tion contre le prin­cipe du RSA condi­tion­né à du béné­vo­lat est éga­le­ment dis­po­nible ici