La dette française se serait encore accrue cette année 2018. En cause – officiellement – le coût exorbitant des services publics. Alors que ceux-ci se réduisent à peau de chagrin, que le nombre de postes de travail est aujourd’hui maigrichon, le régime imposé au service public doit perdurer afin qu’à terme il n’en reste que le squelette. Dette oblige ! Pour ce faire, dans les tuyaux depuis des années, notamment dans le Haut-Rhin, la fermeture de deux maternités (dites de proximité), celle d’Altkirch et celle de Thann.
La population de cette dernière avait déjà, il y a un an, porté son refus de voir disparaître le service des urgences de cet hôpital civil. Celui-ci est ré-ouvert, mais uniquement aux heures de journée, avec des moyens restreints.
Pendant qu’un député LREM affirme aux téléspectateurs, « gilets jaunes » (1) qu’il n’y aura plus de fermeture de proximité, la réalité dévoile le mensonge.
Hypocrisie et naïveté
Mensongères également, les déclarations tonitruantes des élu-e‑s de droite, venu-e‑s fort nombreux, lors de la manifestation regroupant près d’un millier de personnes (salarié-e‑s, habitant-e‑s, « gilets jaunes »…) sur le parvis de l’hôpital ce 24 novembre. Mensonger en effet : en particulier l’engagement du député Raphaël Schellenberger (LR), dont le lexique anti-Macron avait de la résonance, forte mais creuse, suivant celle de son mentor, Michel Sordi, maire de Cernay et député sortant LR de 2002 à 2012. Mensonges, car quasi tous ces élu-e‑s suivent les directives du sommet de la pyramide… Mensonges encore lorsqu’ils affirment que la vraie responsable est l’ARS (agence régionale de santé), alors qu’elle n’est qu’aux ordres de l’État, ainsi que de Macron qui entérine le projet. Mensonges toujours, d’affirmer que « nos » élus se battent au quotidien pour préserver les services publics dans nos vallées : quid de la disparition de bureaux de poste, de la sous-préfecture, de bureaux de la sécu, des impôts, etc. Quid d’un transport collectif de plus en plus boiteux ? Silence radio. Peu se sont bousculés pour dénoncer ces suppressions.
Puéril aussi, ce syndicaliste de FO, qui ordonne de ne pas critiquer les élus tonitruants (sic). Alors que justement, l’application unilatérale du néolibéralisme, dont presque tous ces mandatés se gargarisent, est de désertifier les campagnes – mais pas « notre » vallée – afin de favoriser les « pôles de compétitivité », institués lors des mandats présidentiels précédents. Puéril encore, et égoïste, ce « syndicaliste » qui considère que seuls la population de proximité et « ses » élus peuvent mettre un frein au projet de fermeture, alors qu’aucune prise de parole n’a explicitement appelé à unir les forces avec Altkirch, où ce même jour, une manifestation devant « sa » maternité réunissait un demi-millier de personnes.
Le Mœnchsberg accouche d’une maternité
Car il s’agit bien de cela ; unir les oppositions à ce projet déjà bien ficelé. A Mulhouse, l’hôpital civil Émile Muller du Mœnchsberg remplace peu à peu l’ancien, le Hasenrain, qui accueillait la maternité jusqu’en avril 2018. La nouvelle maternité, appelée Pôle femme-mère-enfant comportant un service gynécologique, la maternité, la pédiatrie, aura coûté 71 Millions d’euros (et le reste ?).
A ce tarif, il conviendrait donc de fermer les maternités de proximité, les emprunts à rembourser pour la nouvelle construction sont à ce prix. Cette impasse politique n’a pas sensibilisé les tonitruants orateurs pour la défense de la maternité de Thann, qui plaignaient la future maman du fond de la vallée, devant parcourir 60 km, les commerces locaux qui vont en pâtir…
Mais, quid de l’empreinte carbone pour un transport à rallonge ? Ou, en cas de décision urgente, le Mœnchsberg qui, avec son hélicoptère, transportera la maman en plein accouchement ou lors d’une complication durant la grossesse. Merci pour la CPAM et son trou ! Du jeune papa qui après avoir quitté son travail (s’il n’est pas chômeur) devra faire des kilomètres supplémentaires pour une visite à l’hosto. S’il est sans emploi, il devra tout de même débourser pour son transport, ou, pire, ne pas y aller.
Quid des salarié-e‑s de la santé de proximité ? Quid des relations humaines entre patientes et personnels ? A Mulhouse, la nouvelle et toute belle maternité (car neuve) a une fonction industrieuse, les patientes sont des numéros, le service roule pour une santé ambulatoire, les soins se font non pas en fonction des besoins mais de la gestion (emprunt douteux oblige !). Du coup, les personnels sont payés au rabais, sous pression productiviste due à un management corseté. Enfin l’hospitalisation est largement plus onéreuse qu’à Thann et Altkirch.
Cerise sur le gâteau, les malades, les consultants, les visiteurs, devront très bientôt s’acquitter d’un ticket pour « bénéficier » du parking. Quand on connaît les centaines de mètres à parcourir de l’un des parkings jusqu’à l’accueil, puis ceux nécessaires pour atteindre le service concerné, attendre la consultation… et le retour au parking. Bonjour le racket au moment de payer le stationnement ! Le Mœnchsberg n’est pas au cœur de la ville, mais en pleine brousse… Alors, franchement, qui chercherait à abuser de l’usage de ces parkings, s’ils étaient gratuits ? Décidément, la gestion mulhousienne, depuis l’époque Bockel (2) ne s’apparente plus qu’à un tiroir-caisse.
Pôle de compétence contre proximité
Depuis des années, l’État ferme petit à petit l’ensemble des services publics des petites villes, partant du principe que la compétitivité oblige à des sacrifices. C’est la logique de ceux qui prétendent, ainsi, défendre le service public.
Une des armes de ladite compétitivité est la création de « pôles de compétence » qui favorisent les grandes cités, permettent de « gagner des marchés », au détriment des campagnes. Ainsi, le qualificatif de proximité est antinomique avec le gigantisme des pôles de compétence.
Or, pour que les campagnes de France aient les moyens financiers pour vivre dignement, il convient déjà de mettre au panier cette logique de « pôles », qui participe au déclin de la médecine de proximité, et qui concentre l’investissement – payé par les contribuables – au profit des seuls grands « pôles de compétence » et jettent au diable, la proximité !
Qu’en pensent les élus, notamment de la vallée de Thann ? Qu’il ne faut pas trop politiser les sujets sociaux !
(1) https://www.france.tv/actualites-et-societe/info-meteo/830321-gilets-jaunes-la-france-en-crise.html
(2) Jean Marie Bockel, ancien du PS, Blairiste, Membre de l’UDI (centre droit) ex maire de Mulhouse, ex ministre, ex sénateur, président de M2A (la Comcom), le père du tram-train (gouffre financier) qui rame douteusement, a « donné » son mandat de maire à Jean Rottner, aujourd’hui président du Grand Est, et qui a lui aussi « donné » son poste à Michelle Lutz, l’actuelle cheffe de la ville. A Mulhouse, les élections municipales : une option. Une municipalité de gauche passe à droite sans élections.
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Afin de maintenir la maternité thannoise ouverte, une association est créée : « Pour la RE-naissance des Services hospitaliers Thannois (REST) ». Pour tout contact : https://www.association-rest.org/accueil REST adhère à la COORDINATION NATIONALE des Comités de Défense des Hôpitaux et Maternités de Proximité http://coordination-defense-sante.org/ |
Rectification: JM BOCKEL est toujours Sénateur (et non ex). Par contre, il n’est plus Président de M2A (l’actuel depuis janvier 2017 est Fabien JORDAN), mais est resté Conseiller Communautaire.