Nouvelle publication de l’entretien réalisé par Jean-Marie Stoerkel pour la rédaction de L’Alterpresse68, avec l’historienne et citoyenne engagée Marie-Claire Vitoux, maître de conférence fraîchement retraitée de l’Université de Haute-Alsace, spécialiste de l’histoire industrielle et de condition ouvrière au XIXe siècle à Mulhouse.
Jean-Marie Stoerkel (J‑M.S) : Ce qu’on pourrait appeler la particularité mulhousienne en Alsace et dans la région du Rhin Supérieur commence-t-elle pour vous il y a cinq siècles, quand en 1515 la cité a quitté la Décapole, cette ligue des dix villes libres d’Alsace dans le Saint-Empire romain germanique, pour devenir une petite république alliée à la Confédération suisse ? Mulhouse a ensuite adopté la Réforme protestante à l’exemple de la majorité des cantons helvétiques, et a chassé hors des murs de la ville les catholiques et les juifs.
Marie-Claire Vitoux (M‑C.V): L’alliance en 1515 de Mülhausen avec les cantons suisses est un événement au sens historique, un événement-tournant qui oriente le cours de l’histoire…Le choix de 1515, qui se clôt en 1798, ouvre près de trois siècles d’indépendance de la Cité-État. La spécificité mulhousienne encore perceptible de nos jours doit beaucoup à ce choix fait il y a 500 ans.
Cette position d’entre-deux (puissances) permet à la Ville de s’enrichir durant la Guerre de Trente Ans (1618–1648) par ailleurs si dévastatrice pour les États allemands. Elle lui permet ainsi d’accumuler des capitaux qui seront disponibles pour l’industrialisation un siècle plus tard. Plus fondamentalement, cette obligation de décider par soi-même entre Royaume de France et Saint-Empire romain germanique apporte à la Ville l’un de ses caractères politiques fondamentaux et durables : la capacité à ne compter que sur soi-même, à ne pas attendre de Paris (ou de Berlin ou d’ailleurs) la solution à ses problèmes et la capacité aussi à inventer des solutions de façon pragmatique.
J‑M.S : Considérez-vous que la révolution industrielle s’est développée d’abord à Mulhouse quand trois jeunes bourgeois, Jean-Jacques Schmalzer, Samuel Koechlin et Jean-Henri Dollfus, y ont fondé en 1746 la première manufacture d’impression sur étoffe, parce que la production d’indienne était à l’époque interdite dans le royaume de France, dont l’Alsace faisait partie depuis 1648 et dans lequel la République de Mulhouse n’était qu’une enclave protestante, jusqu’à sa réunion à la France en 1798 ?
M‑C.V : Les historiens se sont longtemps « étripés » sur les causes de la révolution industrielle, et même sur le sens du terme « révolution ». Posons d’abord que Mulhouse est bel et bien un exemple de Révolution industrielle (au sens de transformations radicales et rapides du procès de production et de la société urbaine) et que, de ce point de vue, le cas mulhousien est plus manchestérien que français. En effet, les historiens français ont pu parler pour la France d’ « industrialisation sans révolution » au sein des anciennes structures artisanales de production, alors que le modèle manchestérien-mulhousien, c’est le passage à la grande usine mécanisée avec dissociation capital-travail.
En ce qui concerne les causes de l’industrialisation à l’anglaise, le débat a été aussi très vif entre historiens. Longtemps, selon un modèle marxisant, l’accent a été mis sur les facteurs matériels comme éléments déclencheurs de la révolution industrielle. Il est évident que l’accumulation du capital à Mulhouse pendant la guerre de Trente Ans, capital en surplus et inemployable dans les activités traditionnelles qui n’en avaient pas besoin, a été l’un des facteurs incitant les trois jeunes mulhousiens à se lancer en 1746 dans une activité nouvelle qui, même si elle s’avérait un échec, ne les aurait pas ruinés.
Par ailleurs, n’oublions pas que le statut politique et commercial de la Cité-État protégeait leur entreprise. Les historiens actuels considèrent cependant que les facteurs matériels ne suffisent pas à provoquer le take off économique (le démarrage) : ils insistent maintenant sur le facteur culturel, cet enterprising spirit (esprit d’entreprise) qui, depuis les travaux du sociologue allemand Max Weber, est trouvé dans l’esprit protestant. Il est vrai que la foi protestante (« la foi seule sauve ») de la bourgeoisie mulhousienne a été un puissant facteur de libération des envies d’entreprendre, d’autant plus qu’elle a nourri la certitude que la réussite sur terre de toute entreprise était voulue par Dieu (la doctrine dite de la prédestination chez Calvin). Aussi la réussite de l’aventure industrielle à Mulhouse, aventure qui commence par l’initiative de 1746, est-elle due à la combinaison de facteurs matériels (capital, législation commerciale, etc.) et de facteurs culturels (religion réformée, indépendance politique en particulier).
J‑M.S : Les filatures, avec notamment DMC, et les constructions mécaniques avec la SACM, ont fait connaître un formidable développement économique et démographique à Mulhouse qu’on appelait le Manchester français. Le patronat était protestant et franc-maçon. Dans une nouvelle, l’écrivain Didier Daeninckx, l’a même qualifié d’éclairé. Il était aussi paternaliste.
Quand ce patronat a créé en 1853 les premières cités ouvrières, c’était aussi une façon de garder près des usines une main‑d’œuvre, de la maintenir dépendante et de contrôler sa vie sociale, non ? Cela n’est pas sans rappeler le paternaliste, dont ont fait preuve plus tard les frères Schlumpf avec les ouvriers de l’usine de Malmerspach, en même temps qu’ils créaient secrètement leur fabuleuse et coûteuse collection automobile à Mulhouse. En 1840, un fameux rapport du docteur Villermé soulignait déjà des conditions de vie et de travail révoltantes chez les ouvriers des manufactures de Mulhouse.
M‑C.V : Comme historienne de la prise en charge par le patronat de la question ouvrière (c’est-à-dire, soyons clair(e) de la misère ouvrière), je préfère le terme « philanthropie » à celui de « paternalisme ».
Avant de m’en expliquer, il faut rappeler en quelques mots ce qu’est la situation du monde ouvrier durant le XIXe siècle. Dans les années 1830, les dictionnaires français accueillent un nouveau mot, « paupérisme » qui est un transfert littéral de l’anglais pauperism. Pourquoi un nouveau mot ? C’est parce que les contemporains avaient conscience du changement de nature de la pauvreté depuis la fin du XVIIIe siècle. La pauvreté n’est plus individuelle, elle est massive ; elle n’est plus accidentelle, elle est le sort normal du travailleur non qualifié même quand il travaille et reçoit un salaire. Elle est donc quantitativement et, surtout, qualitativement très différente de la pauvreté de l’Ancien Régime économique.
À Mulhouse au XIXe siècle, c’est au minimum 10% de la population qui doit être assistée pour survivre dans les années prospères ; dans les années de crise et de chômage, ce sont près de 50% des mulhousiens qui dépendent de l’assistance. Pourquoi ces faibles salaires qui permettent au mieux la survie? Il ne faut pas oublier que l’industrialisation se fait dans le cadre du capitalisme libéral (et non plus, comme avant 1789 en France, 1798 à Mulhouse, dans le cadre du capitalisme règlementé où le travail était organisé et rémunéré selon les règles des corporations-tribus-Zunfte). Dès lors, le salaire est un coût de production comme le charbon ou le coton, et donc, en toute bonne logique libérale, il doit être maintenu le plus bas possible. Cette logique, faut-il le rappeler, restera vraie jusqu’à l’entrée de la France dans la société de consommation (les années 1950) où le salaire devient aussi une promesse de vente.
Notons cependant que les industriels mulhousiens, s’ils s’inscrivent totalement dans la logique du capitalisme libéral, sont à la pointe pour faire voter des lois afin de limiter le travail des enfants : si la Société industrielle ne va pas jusqu’au bout de l’initiative de 1827, elle n’a pas cessé de faire pression pour obtenir la loi de 1841. Celle-ci permettait d’égaliser les conditions de la concurrence et de ne pas pénaliser les entrepreneurs philanthropes qui se « priveraient » de la si rentable main d’œuvre enfantine.
Le patronat mulhousien prend très vite conscience et connaissance du paupérisme ouvrier dans la ville. Les enquêtes de la Société industrielle, la venue à Mulhouse en 1835 de l’enquêteur social Louis-René Villermé, la peur aussi des révoltes populaires, tout pousse les édiles mulhousiens, qui sont aussi les chefs d’entreprise, à développer des actions qu’on appellerait de nous jours des actions sociales. Elles sont doubles : d’une part, l’assistance immédiate, la prise en charge des pauvres malades, mal nourris, mal vêtus, se déploie dans le cadre d’un bureau de bienfaisance municipal réorganisé en 1830 par le maire André Koechlin (fondateur en 1826 de la future SACM).
D’autre part, les maires développent des institutions de prévoyance pour empêcher que les enfants sombrent dans la même misère que leurs parents. L’installation d’une école publique gratuite en 1831 à Mulhouse est un test effectué par les réformateurs sociaux quelques mois avant le vote de la loi Guizot. De même, les autorités encouragent les caisses d’épargne. Ce qui est intéressant dans la « politique sociale » des industriels-maires de Mulhouse, et ce qui fait que je préfère le terme de « philanthropie » à celui de « paternalisme », c’est que le projet patronal vise à émanciper l’ouvrier de la tutelle patronale, vise à ce que les ouvriers n’aient plus besoin de l’assistance et donc deviennent des citoyens libres parce que capables de se prendre en charge seuls.
Cela me semble, au mois intellectuellement, fort différent de la tutelle paternaliste, à visée de contrôle, qu’exerce par exemple un Schneider au Creusot. La tutelle « du berceau à la tombe » se donne là-bas le droit d’exclure le mauvais ouvrier et/ou la « mauvaise tête », des bienfaits dispensés par le patronat. La spécificité mulhousienne se confirme avec la Société de construction des maisons de la Cité à partir de 1853 (SOMCO) : ce qui est original, et unique en France à l’époque, c’est que ces maisons ne sont pas prévues à la location uniquement mais bien à l’accession à la propriété en 15 ans. Il s’agit donc bien là-aussi d’un projet d’émancipation pour faire des « assistés » des « hommes libres ».
J‑M.S : Comment s’est organisée la classe ouvrière face à cela ? Est-ce un hasard si une des premières structures sociales, la MCP Cité, a été créée en 1890 par le chanoine Cetty, curé de la paroisse Saint-Joseph ? Au début du XXe siècle, alors que l’Alsace-Lorraine était redevenue allemande depuis la débâcle de 1870, l’armée du Kaiser a réprimé des manifestations ouvrières devant le palais de la Société Industrielle de Mulhouse.
M‑C.V : La répression des manifestations populaires est une constante, il n’y a pas que le Kaiser pour la pratiquer ! La garde nationale bourgeoise et le corps des sapeurs-pompiers dans la première moitié du XIXe siècle avaient cette fonction-là. À partir de 1847, ce fut un régiment de l’armée stationné à Mulhouse qui prit le relais…
Le monde ouvrier européen ne devient une classe que dans le dernier tiers du XIXe siècle. Qu’est-ce que cela veut dire ? Pour reprendre le concept de classe tel qu’il a été défini par Marx (concept descriptif, donc opératoire et non partisan), la place dans le système de production (posséder le capital, vendre sa force de travail) ne suffit pas à créer une classe : il faut une conscience que les intérêts de son groupe (ouvrier) sont différents de ceux du groupe opposé (patronat). En ce sens, c’est le monde patronal mulhousien qui, le premier, a eu une conscience de classe, développée non pas contre/en opposition au monde ouvrier mais en opposition aux artisans qui refusaient la dissociation capital/travail, c’est-à-dire leur prolétarisation.
Ce sont les artisans et les ouvriers qualifiés qui ont fait les révolutions de 1830, 1831, 1834, puis 1848 et la Commune, pas le monde ouvrier. Ailleurs en Europe, avec de mineures variations de dates et de formes, c’est bien le même phénomène qui se produit.
Ce n’est donc que lorsque la « classe » des artisans a disparu sociologiquement mais surtout politiquement (après l’échec de la Commune en 1871 et la répression du mouvement socialiste « démo-soc »), c’est lorsque la prolétarisation est devenue massive et majoritaire que le monde ouvrier acquiert une conscience de classe.
En Alsace devenue allemande après 1870, cela va se traduire par deux mouvances syndicales fortes, revendicatives, créatrices de sociabilités ouvrières durables. Le syndicalisme « rouge » est animé par les socialistes et syndicalistes allemands avec en particulier l’action de Wilhelm Liebknecht, le père de Karl Liebknecht, acteur majeur avec Rosa Luxemburg du mouvement spartakiste. À noter que ce syndicalisme et socialisme allemands sont au fond réformistes, non révolutionnaires. C’est bien pourquoi, au Congrès de Tours en décembre 1920, lors de la scission entre SFIO et PC, la section mulhousienne suit Léon Blum pour « garder la vieille maison »…
En parallèle, se développe un syndicalisme « noir », le syndicalisme dit chrétien mais en fait catholique. La chanoine Cetty, curé de l’église ouvrière Saint-Joseph, conçoit son organisation de la classe ouvrière comme globale : luttes revendicatives (ce qui permet de faire « d’une pierre deux coups », puisque ce syndicalisme attaque les patrons qui sont protestants..), encadrement des classes populaires par une multitude d’associations (théâtre, sports, etc. : c’est le rôle de la future MCP Cité, le Bangala) toutes soutenues par la paroisse. La concentration du monde ouvrier dans des quartiers populaires facilite la création de la sociabilité ouvrière, forme première, quotidienne, de la conscience de classe.
J‑M.S : Les grands travaux et les usines ont toujours fait venir à Mulhouse des travailleurs étrangers. Cela a commencé au début du XXe siècle par les Italiens pour la construction des casernes allemandes puis pour les mines de potasse et le creusement du Grand Canal d’Alsace, ensuite les Polonais surtout aux MDPA, puis les travailleurs d’Afrique du Nord et les Turcs pour l’usine Peugeot et ses sous-traitants. Peut-on dire sans exagérer que dans sa période de grande prospérité, l’économie de Mulhouse tournait avec des bras immigrés ?
M‑C.V : Mulhouse est l’archétype de la ville fabriquée par les flux migratoires. Au XIXe siècle, cette ville-mouroir ne peut connaître un développement démographique (multiplication par dix de sa population en moins d’un siècle) par accroissement naturel, la mortalité infantile touchant près de 50% des enfants d’ouvriers. La ville est une immense pompe aspirante qui attire d’abord ses voisins du Sundgau, du Pays de Bade, de Suisse (et oui, les flux migratoires se faisaient dans ce sens-là pendant tout le XIXe siècle !). Étaient alors considérés comme non-mulhousiens celui qui était né dans le village d’à côté ! Durant la période allemande, arrivent en particulier des Italiens, ayant une compétence dans les tuileries et la construction : ce sont eux qui construisent les bâtiments de l’époque wilhelmienne, bâtiments publics comme les casernes, les écoles, ou logements populaires en R+2+C (rez-de-chaussée, deux étages et combles). Les Polonais viennent en nombre dans l’entre-deux-guerres en particulier pour travailler dans les mines de potasse. Après 1945 et les combats de la Libération, les Français que sont alors les natifs d’Algérie viennent en nombre travailler dans les usines mulhousiennes. S’il est une ville où la notion d’«appartenance de souche » n’a pas grand sens, c’est bien Mulhouse. Mulhouse n’existerait pas sans cet apport incessant de populations venues y travailler. La prospérité de la ville durant les Trente Glorieuses, comme celle de la France, leur doit beaucoup !
J‑M.S : Le patrimoine qui nous reste de la grande époque industrielle est encore conséquent, malgré des destructions comme celle de la filature DMC que vous avez dénoncée en tant que président du Conseil consultatif du patrimoine mulhousien. Que préconisez-vous pour son devenir ? L’ancienne fonderie devenue bâtiment universitaire n’est-ce pas un bel exemple ?
M‑C.V : Deux raisons me font militer pour la réhabilitation du patrimoine industriel de la ville.
La première est d’ordre identitaire. L’industrie a fait Mulhouse, une industrie dont la production aussi bien métallurgique que textile avait une réputation de qualité et recherchait le beau. L’identité mulhousienne d’aujourd’hui a été façonnée par son passé industriel : c’est une population bigarrée (130 nationalités), une population jeune (record en France et c’est tant mieux !), une population majoritairement à faible pouvoir d’achat, une vitalité associative signe d’une grande capacité à la solidarité et au vivre-ensemble. Cette identité pour s’épanouir doit s’incarner dans des lieux. L’éradication des bâtiments industriels (comme on l’a fait à la SACM, à l’exception de la Fonderie pour laquelle le dur combat mené par les défenseurs du patrimoine a été gagnant), s’accompagne d’un discours de peur des couches populaires (« classes laborieuses, classes dangereuses ») : il faudrait faire venir/faire revenir les classes moyennes à Mulhouse pour espérer pouvoir bâtir la ville de demain. À l’opposé, le choix de conserver les bâtiments de DMC permet de démontrer la capacité de la société mulhousienne à inventer l’avenir (Motoco).
La seconde raison est d’ordre rationnel. Détruire des bâtiments pour en construire des neufs est « has been ». Les friches industrielles comme les friches militaires offrent à Mulhouse des espaces bâtis de qualité, dont la réhabilitation est possible relativement facilement et, contrairement au discours des bétonneurs, à des prix raisonnables. A l’heure où il faut densifier les villes, réduire l’étalement de la tâche urbaine, mettre fin à la « rurbanisation » qui défigure les villages alentours, les friches sont une opportunité qu’il serait stupide de ne pas saisir.
J‑M.S : Du fait de son histoire, Mulhouse est une ville plurielle qui a longtemps joué un rôle important dans les luttes sociales. Depuis le déclin industriel et les crises économiques, ces valeurs sont en recul alors que les idées d’exclusion et d’intolérance de l’extrême droite, avec surtout le vote en faveur du Front national, semblent bien installées. Comment combattre cela ? Est-ce aussi ce phénomène qui explique que la ville, se nourrissant jusque dans un passé récent dans un terreau plutôt de gauche, soit passée politiquement à droite ?
M‑C.V : Vaste question, immense question à laquelle il me faut répondre en historienne (et non pas en citoyenne engagée). Aux yeux de l’historienne que je suis, Mulhouse est un condensé des mutations à l’œuvre au niveau national, qu’elles soient économiques (la désindustrialisation), démographiques (la vitalité de la natalité des premières générations de migrants), sociales et urbaines (la fuite des classes moyennes dans les communes de la périphérie pour « vivre entre soi »), politiques (l’effacement des alternatives politiques Droite-Gauche), éthiques (l’ébranlement des valeurs républicaines). C’est une véritable crise systémique que nous vivons.
L’historienne que je suis peut aussi dire, répéter, marteler qu’aucune restauration du passé n’est possible : la pensée réactionnaire au sens premier du terme a toujours été dans l’histoire inadéquate donc impuissante.
L’historienne de Mulhouse constate que la ville a fabriqué, durant les deux derniers siècles au moins, un certain nombre d’outils (tissu associatif par exemple) et développé des savoir-faire (pragmatisme, dialogue inter-religieux) qui devraient lui permettre de fabriquer des réponses pertinentes au sein du cadre républicain.
L’historienne que je suis doit aussi constater qu’il faut « un chef », non pas un dictateur mais une équipe municipale dont la qualité visionnaire et la capacité à rassembler les « citoyens actifs » autour d’un projet, à bâtir ensemble, de vivre ensemble seront décisives.