Oui pour le gouvernement israélien qui vient d’interdire par la voix de son ministre de la Défense six ONG palestiniennes au motif qu’elles seraient liées à une « organisation terroriste ».
Non! pour l’ «Association française d’Universitaires pour le respect du droit international en Palestine », non pour les 700 membres de la communauté universitaire « Universitaires pour l’Égalité », non pour B’Tselem, association israélienne de défense des droits des Palestiniens, non pour Amnesty international et Human Rights Watch comme pour les 41 associations membres ou observateurs de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, non pour les députés membres de la Délégation pour la Palestine au Parlement européen…
Même le gouvernement américain semble prendre ses distances et l’ONU s’alarme (bureau du Haut – Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme dans les Territoires palestiniens).
Pourquoi déclarer terroristes ces 6 organisations palestiniennes ?
Pourquoi Addameer qui défend les droits de milliers de prisonniers politiques palestiniens dont des centaines condamnés à perpétuité, qui défend les étudiants palestiniens arrêtés sur les campus en Cisjordanie-même par des unités spécialisées dans ces « raids » ?
Pourquoi Defense for Children Palestine (DCI) qui défend et suit des centaines d’enfants détenus dans les prisons israéliennes et dénonce leurs arrestations nocturnes à leur domicile ?
Pourquoi l’Union des comités de travail agricole ? Pourquoi l’Union des comités de femmes palestiniennes ? Pourquoi le Bisan Center pour la recherche et le développement ?
Pourquoi Al-Haq qui a reçu avec B’Tselem (association israélienne) plusieurs reconnaissances internationales, dont le prix pour la défense des Droits humains décerné par la République française en 2018 ?
Depuis des années, et en particulier depuis une loi israélienne de 2016, ces organisations subissent régulièrement raids militaires dans leurs bureaux, mises à sac et vol du matériel, saisie de documents, arrestations et emprisonnements de membres de leur personnel, interdiction à quiconque d’exprimer publiquement un soutien à leurs activités ou de les financer.
La déclaration récente sur leur « terrorisme » vient donc compléter l’appareil de répression israélien.
L’indignation s’amplifie: par communiqué Human Rights Watch et Amnesty international rappellent que « Cette décision déplorable et injuste constitue une attaque du gouvernement israélien contre le mouvement international des droits humains. Depuis des décennies les autorités israéliennes ont systématiquement cherché à museler la surveillance du respect des droits humains et à punir les personnes qui critiquent son régime répressif à l’encontre des Palestiniens … ».
Plus de 20 organisations de la société civile israélienne déclarent dans le quotidien israélien Haaretz que la criminalisation de la défense des droits humains est un acte qui caractérise les régimes autoritaires et répressifs.
Le gouvernement israélien évoque des preuves secrètes « classifiées » pour justifier sa déclaration, « argument » toujours évoqué qui permet notamment l’emprisonnement durant des mois, voire des années, de centaines de Palestiniens sans procès, ni jugement, ni communication de preuves, sous le régime de la détention administrative.
Tout mouvement palestinien qui n’accepte pas le régime d’apartheid officialisé en Israël de puis 2018 (loi dite de « l’État Nation du peuple juif »), qui en appelle à la justice de la Cour Pénale internationale ou au mouvement international de boycott (BDS), est susceptible d’être déclaré « terroriste ».
Toute structure palestinienne d’expression syndicale, culturelle, humanitaire ou civique, est susceptible de voir ses membres accusés d’activités « terroristes ».
Toute manifestation de solidarité publique avec les victimes des exactions violentes de colons qui se multiplient, de dénonciation de la répression permanente, souvent brutale, voire mortelle, de la société civile palestinienne est susceptible de tomber sous le coup d’une accusation de « terrorisme ». C’est ainsi que des dizaines d’étudiants du campus de Bir Zeit viennent de connaître arrestations et détentions dans les prisons militaires après leur visite de solidarité à une famille dont la maison venait d’être démolie par l’armée.
Qui terrorise ?
Celui qui occupe et colonise depuis des décennies.… ? Celui qui mène officiellement une politique d’apartheid, inscrite dans ses lois fondamentales… l’apartheid étant qualifié de crime contre l’humanité par le droit international? Celui qui n’a jamais respecté aucune des résolutions de l’ONU et qui méprise ouvertement le droit international… ? Celui qui bombarde régulièrement depuis des années des populations civiles, cause des milliers de victimes dont des centaines d’enfants… ? Celui qui veut désormais éradiquer toute expression en faveur des droits humains des populations palestiniennes.… ?
Les six ONG palestiniennes menacées sont la moelle épinière de la société civile palestinienne.
L’interdiction d’activité et d’expression qui menace ces organisations condamne toute cette société au silence et à subir l’arbitraire total d’une puissance occupante.