Une atteinte à la liberté d’expression
Sur la place des Victoires, une distribution de tracts avait été fermement interrompue le samedi 7 mai par la police mulhousienne. L’oukase municipale, énoncée avec menaces, visait des « Nuit debout » annonçant par tracts une prochaine manif. Les militant-e‑s présent-e‑s avaient dû faire face, quelques minutes auparavant, à d’autres intimidations proférées par une des responsables du « Starbucks coffe » inauguré il y a quelques semaines sur cette place des Victoires.
Cette atteinte à la liberté d’expression avait donné lieu à deux articles dans L’Alterpresse68 (voir : A Mulhouse, la police municipale fait fort de café ! ainsi que : A Mulhouse, des élus au service de « Starbucks », de « Barclays » et d’eux-mêmes). De plus, une interpellation du maire de Mulhouse a été signée par plusieurs organisations :
La « hiérarchie » devait débarquer fissa…
La liberté d’expression ne s’usant que si on ne s’en sert pas et les manifs succédant aux manifs, les « Nuits debout » – Mulhouse, qui ne lâchent rien, sont de retour au même endroit, pour les mêmes raisons, le mercredi 18 mai. Une voiture de police municipale arrive sur les lieux… pour s’arrêter au beau milieu de la zone starbuckisée, gênant le libre passage des piétons contraints de se faufiler entre le véhicule des forces de l’ordre et les rangées de tables étalées là par la multinationale du café.
Au bout d’un quart d’heure de ce stationnement complice mais commercialement obstructif, un « Nuit debout » s’approche du policier au volant pour lui tendre un tract. L’agent municipal le refuse cordialement et fait savoir avec le sourire que « la hiérarchie » venait d’être consultée par téléphone : de l’aveu même du policier, les articles parus dans L’a (lter) presse – ô combien injuste pour la police et incorrect pour le maire de Mulhouse (!) – l’ont incité à s’informer avant d’agir. Mais le collectif « Nuit debout » était prévenu : la « hiérarchie » allait débarquer fissa.
Mais c’est qui, cette « hiérarchie » ?…
Dans l’attente de son arrivée, la distribution continue, tandis que la voiture de police repart. D’autres policiers, à vélo, passent et repassent, frôlent les militant-e‑s, apparemment sans les voir. Le stock de tracts commençant à s’épuiser, au bout d’une heure, lors d’un nouveau passage de la voiture de police municipale, le chauffeur est interpelé : « Alors, cette « hiérarchie » que vous avez alertée, elle arrive ? Et c’est qui ? ». L’agent municipal répond par une petite leçon, mais une fois encore avec un large sourire : « la « hiérarchie » ?… Pour un policier municipal, vous devriez le savoir, c’est le maire ! ».
Les militant-e‑s « Nuit debout » ont donc failli rencontrer M. le maire ?! Dommage qu’il ait tant hésité à venir. Ils auraient pu lui demander s’il a pris un arrêté pour « légaliser » l’interdiction de distribution de tracts décidée le 7 mai ; ou bien s’il s’est agi alors d’un moment d’égarement autoritaire. Qui serait susceptible, ou non, de connaître des récidives plus ou moins graves ?… L’enquête se poursuit. Peut-être y verra-t-on plus clair si M. le maire répond à la lettre que lui ont envoyée les associations.
« Starbucks », cette inconnue et son monde
Une chose est sûre : M. le maire lit L’Alterpresse68 avec attention. Tant mieux, surtout si cela lui a permis de faire mieux connaissance avec « Starbucks » qu’il se réjouissait tant de voir venir à Mulhouse, au point qu’il s’était exclamé, fin octobre 2015, sur son profil Facebook : « Encore une bonne nouvelle pour le commerce du centre-ville à Mulhouse ».
J. Rottner devrait lire aussi un autre article, mieux documenté encore, paru dans la revue électronique « Rue89 – Strasbourg ». Il y apprendra, en suivant les liens, que ses confrères de Strasbourg : le maire, R. Ries, et le président de l’Eurométropole, R. Herrmann, ont fait mieux que lui en matière de vénération de la multinationale. La lecture de cet excellent article de Rue89, publié le 7 avril 2016, est aussi vivement conseillée aux nuitdeboutistes qui combattent la loi El Khomeri et son monde. Ils pourront constater que les méthodes de « Starbucks » à l’encontre de ses salariés anticipent, depuis fort longtemps, beaucoup d’aspects de la « loi travail ».
On ne saurait que trop conseiller également au maire de Mulhouse, à son adjoint aux finances et au Président de M2A, la lecture de ce texte signalé par Rue89, où les méthodes d’évasions fiscales (dite de « sandwich hollandais » !…) sont précisément décrites. Nos édiles pourront alors réfléchir aux effets de telles pratiques sur un point qui les fait tant râler : la baisse des dotations étatiques aux collectivités locales. Iront-ils jusqu’à informer honnêtement les contribuables de M2A sur les montants éventuels que « Starbucks » « économisera » sur le versement de sa CET (ex TP) du fait que le géant du café rétribue généreusement, et en priorité, sa maison mère – sise aux Pays–Bas avec diverses antennes et filières dans les paradis fiscaux -, dans le but de présenter un bilan déficitaire au moment de régler les impôts locaux et nationaux ? Il est vrai qu’en étant totalement transparent sur ce plan là, nos édiles courent le risque de réveiller la querelle des « pigeons » qui a permis d’entrevoir à qui profitent certains choix budgétaires et fiscaux…
Le 19 mai 2016,
B. Schaeffer