Dimanche 3 juillet 2016 à Mul­house au Parc Sal­va­tor se tenait pour la deuxième année consé­cu­tive le fes­ti­val ALTERNATIBA avec comme thème cen­tral « Chan­geons Le Sys­tème, Pas Le Climat ».

Des mili­tants d’ATTAC68 y ont confec­tion­né un pan­neau avec du maté­riel qu’ils se sont pro­cu­ré sur place et por­tant l’inscription sui­vante : COMMUNE NO « TAFTA » et l’ont dépo­sé à l’entrée du parc.
Le mes­sage est clair : le trai­té de libre-échange (en dis­cus­sion avec les États-Unis) est néfaste pour les citoyens, les sala­riés, les PME, la démo­cra­tie et l’environnement. Les seuls béné­fi­ciaires en sont les grandes mul­ti­na­tio­nales et les inves­tis­seurs financiers.

La contestation gagne du terrain 

La Suisse n’est pas épar­gnée par de telles conven­tions com­mer­ciales puisque ce pays est sujet au TISA(*).
Les villes anti-TAF­TA haussent le ton.
23 avril 2016 – 90 000 mani­fes­tants, selon les orga­ni­sa­teurs, défilent à Hanovre, dans le nord de l’Allemagne, contre le pro­jet d’accord de libre-échange trans­at­lan­tique négo­cié en ce moment entre les États-Unis et l’Union euro­péenne. La mani­fes­ta­tion a lieu la veille d’une ren­contre entre Mer­kel et Oba­ma, invi­té d’honneur de la foire de Hanovre. Le duo doit être rejoint, le 25 avril, par le Fran­çais Hol­lande, le Bri­tan­nique Came­ron et l’Italien Ren­zi, qui cher­che­ront un accord pour le trei­zième round de négo­cia­tions qui ont com­men­cé en 2013. 250 000 per­sonnes avaient déjà mani­fes­té à Ber­lin en octobre contre ce trai­té, mar­qué par le secret qui entoure les pourparlers.
Dès son élec­tion la maire « indi­gnée » de Bar­ce­lone, Ada Colau, avait fait voter en octobre 2015 une réso­lu­tion fai­sant de sa ville une zone anti-TAF­TA, anti-CETA et anti-TISA.
En vue de pour­suivre sur la lan­cée de ce vote sym­bo­lique, la mai­rie cata­lane s’est trans­for­mée, jeu­di 21 et ven­dre­di 22 avril, en caisse de réso­nance des mou­ve­ments sociaux. C’était une pre­mière dans la bataille anti-TAF­TA sur le conti­nent : une ren­contre entre des repré­sen­tants d’une qua­ran­taine de villes, de Vienne à Bir­min­gham, de Gre­noble à l’île grecque de Cor­fou, de Madrid à Cologne, qui se sont décla­rées « zones hors-TAFTA »
Depuis le lan­ce­ment des négo­cia­tions avec les États-Unis au prin­temps 2013, plus de 1600 villes, dépar­te­ments et régions se sont décla­rés « hors TAFTA » à tra­vers le conti­nent. En France, on trouve 650 col­lec­ti­vi­tés, par­mi les der­nières en date la région Lan­gue­doc-Rous­sillon-Midi-Pyré­nées. Pour étu­dier une déli­bé­ra­tion de ces col­lec­ti­vi­tés : docu­ment dis­po­nible ici

Pour les exé­cu­tifs locaux, en par­ti­cu­lier en Espagne, l’un des axes de leur man­dat consiste à “remu­ni­ci­pa­li­ser” des ser­vices de base, comme la ges­tion de l’eau ou le ramas­sage des déchets. Ce qui n’est pas une mince affaire, parce qu’ils doivent sou­vent s’attaquer à des contrats liant l’exécutif qui les pré­cé­dait avec des multinationales…

Gerar­do Pisa­rel­lo, numé­ro deux de la ville de Bar­ce­lone explique :
« Les États ne sont pas à la hau­teur des défis euro­péens. C’est évident dans la crise des réfu­giés, mais aus­si dans les négo­cia­tions com­mer­ciales. Nous avons l’obligation de mon­trer qu’il existe des alter­na­tives à ce genre de trai­tés. Les villes sont en pre­mière ligne dans la ges­tion du quo­ti­dien des gens. Et dans tous ces sec­teurs, du loge­ment à la ges­tion de l’eau, nous devons prou­ver que des poli­tiques alter­na­tives à l’austérité impo­sée par les États membres et Bruxelles existent. »

CETA : JUNCKER contraint de freiner ses ardeurs

Jean-Claude JUNCKER, pré­sident de la Com­mis­sion de Bruxelles sou­hai­tait accé­lé­rer les pro­cé­dures de rati­fi­ca­tion du trai­té de libre-échange négo­cié avec le Cana­da (CETA) sans pas­ser par la rati­fi­ca­tion des par­le­ments natio­naux du continent.
C’était la posi­tion expri­mée lors du Conseil Euro­péen du 28 juin 2016 en accord d’ailleurs avec le com­mis­saire fran­çais Pierre Mos­co­vi­ci qui était sur la même ligne, celle d’une rati­fi­ca­tion express, esti­mant qu’il ne fal­lait « pas dif­fé­rer » l’application de ce qu’il consi­dé­rait être un « bon accord avec un pays ami ».
Les auto­ri­tés bruxel­loises redoutent que la vague de rati­fi­ca­tions, hémi­cycle par hémi­cycle, ne tourne au désa­veu, une fois encore, pour la machine bruxel­loise, tant les inquié­tudes des citoyens sur le ter­rain semblent fortes à l’encontre de ces trai­tés de libre-échange. Ceux-ci incarnent aux yeux d’une par­tie de plus en plus impor­tante de la popu­la­tion tout ce qu’elle rejette dans l’Union : le libé­ra­lisme, l’austérité, le nivel­le­ment par le bas des normes, la mon­dia­li­sa­tion débri­dée, l’opacité de négo­cia­tions inter­na­tio­nales menées sans contrôle démocratique…
Mal­gré tout, Jean-Claude JUNCKER a été contre­dit par les prin­ci­paux diri­geants européens:
La chan­ce­lière Ange­la MERKEL et le vice-chan­ce­lier Sig­mar GABRIEL ont pré­ve­nu le 28 juin : « Nous deman­de­rons l’avis du Bundestag »
Fran­çois HOLLANDE est d’accord avec Ange­la MERKEL : « Je suis pour cet accord, entre l’Union euro­péenne et le Cana­da, mais je pense que c’est néces­saire qu »il y ait des dis­cus­sions qui puissent s’engager dans cha­cun des par­le­ments natio­naux. C’est vrai que c’est plus long, j’en mesure les consé­quences, mais cela fait par­tie de ce que l’on doit offrir comme contrôle démocratique ».
C’est ain­si que le mar­di 5 juillet à Stras­bourg le col­lège des com­mis­saires a fait marche arrière par la décla­ra­tion de la com­mis­saire au com­merce, Céci­lia MALMSTROM : « La Com­mis­sion consi­dère tou­jours que c’est un accord qui ne concerne que les com­pé­tences de l’Union euro­péenne. Mais nous pro­po­sons de le rati­fier comme s’il s’agissait d’un accord « mixte » parce que nous consta­tons qu’il n’y a pas d’accord sur ce point ».

La pro­cé­dure de rati­fi­ca­tion du CETA s’annonce donc très longue. Il fau­dra d’abord le feu vert des ministres du com­merce des 27 (ou 28 ?), sans doute en octobre. Cette étape ne devrait être qu’une for­ma­li­té, même si la Rou­ma­nie et la Bul­ga­rie ont l’intention de faire mon­ter les enchères, en exi­geant d’Ottawa un assou­plis­se­ment, en paral­lèle, de l’octroi des visas pour leurs citoyens.
Ensuite, ce sera au tour du Par­le­ment euro­péen de se pro­non­cer, d’abord en com­mis­sion com­merce exté­rieur, ensuite en plé­nière, sans doute d’ici à la fin de l’année.

À par­tir de là, le CETA pour­rait entrer en vigueur de manière pro­vi­soire dans la fou­lée du vote au Par­le­ment euro­péen – par exemple dès le prin­temps 2017 – pour les dis­po­si­tions rela­tives aux com­pé­tences euro­péennes. Soit une très grande par­tie du trai­té. C’est d’ailleurs ce qui inquiète de nom­breuses ONG et cer­tains parlementaires.
C’est par exemple le cas du groupe de la gauche uni­taire du par­le­ment européen.
La mobi­li­sa­tion contre le CETA doit et peut s’amplifier.

(*) Pour l’explication du terme lire notre pré­cé­dent article sur le même thème ICI ou écou­ter l’émission de L’Alterpresse68 un autre son de cloche LA