Domi­nique Jacques Roth, membre du col­lec­tif GCO Non Mer­ci, nous livre trois remarques rela­tives à la prise de parole de Nico­las Hulot dans sa der­nière inter­view publiée par Reporterre :

N. Hulot : « Sur le grand contour­ne­ment ouest de Stras­bourg, les pro­cé­dures ont eu lieu et je ne peux pas reve­nir des­sus. C’est comme pour les déchets radio­ac­tifs : ils sont là, je ne peux pas les faire disparaître ».

Cette phrase pro­non­cée par N. Hulot dans l’interview « Repor­terre » est incom­pré­hen­sible au regard des faits, car si les déchets nucléaires sont bien là, le GCO à ce jour en revanche, n’existe pas !

NH : « Je ne peux pas prendre des mesures rétro­ac­tives qui nous condui­raient à des indem­ni­tés ou à des conten­tieux très lourds ».

Cette allu­sion exacte au regard du réel des PPP (Par­te­na­riats Pri­vé Public) ne com­porte en revanche aucune cri­tique à l’é­gard de pra­tiques fai­sant som­brer nombre de col­lec­ti­vi­tés publiques (com­munes, hôpi­taux, Palais de jus­tice etc…) dans un endet­te­ment struc­tu­rel. En par­ler ain­si la bouche en coeur, ava­lise (taci­te­ment) ces pratiques.

Ces pro­grammes élec­to­ra­le­ment payants déve­lop­pés par J. Chi­rac, N. Sar­ko­zy et F. Hol­lande se trouvent en faillite à court moyen terme en rai­son des inté­rêts rédhi­bi­toires dus au bout de deux ou de trois années d’é­chéances à des taux nor­maux empê­chant de finan­cer les pro­chains pro­grammes prio­ri­taires au pro­fit de quelques grandes entre­prises et des banques avec la com­pli­ci­té du législateur.
Ces contrats trans­forment le ser­vice public en pro­duits finan­ciers déri­vés dont le risque sera sup­por­té par les contri­buables. La rup­ture de ces contrats qui coûtent des indem­ni­tés à hau­teur de dizaines, voire de cen­taines de mil­liers d’Euros à l’Etat (donc au contri­buable) et consti­tuent de véri­tables bombes à retar­de­ment finan­cières dans tous les pays du monde ou la pra­tique des PPP a cours.
NH : « On a sus­pen­du avec Eli­sa­beth Borne tous les pro­jets qui n’étaient pas per­ti­nents et cran­tés juri­di­que­ment et financièrement ».
Ce der­nier pas­sage mécon­naît que le pro­jet GCO est aus­si « cran­té » juri­di­que­ment car au-delà de l’a­vis du CNPN que la ministre semble appe­ler de ses voeux mani­fes­tant ain­si sa volon­té d’al­ler au bout du pro­jet, la DUP n’est pas pas encore renou­ve­lée. « Cran­té » finan­ciè­re­ment aus­si, car il n’est pas avé­ré à ce jour que Vin­ci béné­fi­cie­ra des sub­ven­tions néces­saires pour mener ce pro­jet à terme. En consé­quence de quoi, il pour­rait faire l’ob­jet d’un mora­toire a minima.

Retrou­vez l’article de Repor­terre : Nico­las Hulot : « Un ministre n’est pas un élec­tron libre » : https://goo.gl/mQpctb

Julien WURTZ

La vacance de M. Hulot

hulot

On se sou­vien­dra de cette pho­to dans Paris-Match : le ministre Nico­las Hulot, tête basse, parle à la presse flan­qué sur sa gauche de Sébas­tien Lecor­nu,  secré­taire d’Etat qui le cha­pe­ronne pour le compte de Bru­no Lemaire, et sur sa droite de Brune Poir­son, ancienne de Véo­lia, elle aus­si secré­taire d’Etat et l’œil de Macron pour sur­veiller Hulot. Car il en est ain­si dans ce gou­ver­ne­ment : chaque ministre a auprès de lui un ou une « envoyé spé­cial » du Pré­sident de la Répu­blique char­gé de veiller au grain.

 Et der­rière le trio, le porte-parole du gou­ver­ne­ment Cas­ta­ner, ten­du comme un arc, sur­veillant chaque syl­labe que le Ministre Hulot exprime.

 Et que dit-il le Ministre éco­lo­giste : que la France ne pour­ra pas appli­quer la loi sur la réduc­tion de la part du nucléaire dans la pro­duc­tion éner­gé­tique fran­çaise à 50% en 2015.

 Et on com­prend la crainte du trio qui sur­veille Nico­las Hulot : faire dire à quelqu’un le contraire de ce qu’il a pro­fes­sé pen­dant des années de mili­tant pur et dur de l’écologie, com­porte quelque risque. Il est vrai que ce risque dépend for­te­ment de la force des convic­tions du mili­tant et plus encore des gages qu’il a dû don­ner pour deve­nir Ministre d’Etat. A 62 ans, c’était peut être la der­nière occa­sion de connaître les ors de la République.

 Mais à quel prix ! « La pre­mière ligne rouge, c’est l’instant où je me renie­rai », a décla­ré récem­ment Hulot au Monde. Pour l’heure, il affirme ne pas tra­hir ses convictions.

Que lui faut-il donc ? S’il y a un ministre qui n’arrête pas d’avaler son cha­peau, c’est bien lui ! A part des pro­messes qui ver­ront le jour aux calendes grecques, il n’a fait que recu­ler sur ses enga­ge­ments pas­sés. Le gly­pho­sates ? Lui qui pré­ten­dait l’interdire, il accepte que cela se fera (sans garan­tie) dans trois ans seulement.

Lui qui était un farouche com­bat­tant de l’accord euro-cana­dien CETA, accepte que son gou­ver­ne­ment l’applique avant même que l’assemblée natio­nale ne donne son avis… Appa­rem­ment, la crainte de voir des OGM défer­ler sur l’Europe par des pro­duits venant du Cana­da qui n’interdit pas ses salo­pe­ries, ne l’habite plus.

Et à pré­sent, le nucléaire. C’était pour­tant pré­vi­sible : avec un pre­mier ministre qui fut le direc­teur des Affaires Publiques d’Areva, entre­prise phare du nucléaire, de 2007 à 2010, pou­vait-on s’imaginer qu’un gou­ver­ne­ment allait à l’encontre du lob­by du nucléaire ? Il est pré­sent au sein même des struc­tures de l’Etat. Nico­las Hulot pou­vait-il ne pas le savoir ?

Et c’est sur la foi d’un rap­port de Réseau de Trans­port de l’Electricité (RTE), filiale à 100% d’Edf, que le Ministre Hulot décrète qu’on ne peut arri­ver aux objec­tifs fixés par la loi et qu’il faut recu­ler le délai de 10 à 15 ans. Et à lire le fameux rap­port, ce serait plu­tôt 2035 que 2030.

L’élec­tri­ci­té pro­duite en France pro­vient pour 77,0 % du nucléaire, pla­çant ain­si notre pays au 2e rang des pro­duc­teurs d’éner­gie nucléaire au monde après les États-Unis, et au 1er rang pour la part du nucléaire dans la pro­duc­tion d’électricité.

 Le reste de la pro­duc­tion d’élec­tri­ci­té est assu­ré à par­tir de sources d’éner­gie renou­ve­lables : 15,7 % et de cen­trales ther­miques : 7,3 %.[]

Nous sommes loin de l’ob­jec­tif fixé par l’U­nion Euro­péenne, soit 20% d’i­ci à 2020. C’est en Suède que la part des éner­gies renou­ve­lables est la plus éle­vée, puis­qu’elles contri­buent à plus de la moi­tié (52,6%) de la consom­ma­tion finale, devant la Let­to­nie et la Fin­lande (38,7% cha­cune), l’Au­triche (33,1%) et le Dane­mark (29,2%).

La plu­part des experts rap­pelle que ce retard de la France est essen­tiel­le­ment dû au fait que la France a tout misé sur le nucléaire et a uti­li­sé son entre­prise EDF pour en être le maître d’œuvre. Et bien évi­dem­ment, celle-ci n’a pas inves­ti dans les éner­gies renou­ve­lables pour pré­ser­ver les parts de mar­ché du nucléaire qui devait per­mettre à notre pays d’exporter son savoir-faire en la matière.

En 2030, sur les 58 réac­teurs nucléaires, il y en aura 48 qui auront plus de 40 ans. A l’é­chéance à 2030, la qua­si tota­li­té de notre parc nucléaire sera au-delà de sa date de péremp­tion et les risques d’accident se mul­ti­plient au fur et à mesure des années qui passent.

Force est de consta­ter que le fait d’avoir un Ministre de l’environnement et de la tran­si­tion éco­lo­gique venant des rangs du mou­ve­ment éco­lo­giste n’est pas de nature à chan­ger l’orientation de l’Etat sur le nucléaire… ni sur d’autres pro­blé­ma­tiques envi­ron­ne­men­tales comme Notre-Dame des Landes, le Grand contour­ne­ment ouest de Stras­bourg, Sto­ca­mine, Bure…

De tels renie­ments valent-ils un poste de Ministre d’Etat ? Et de fou­ler aux pieds trente ans d’engagement et de respectabilité…

Michel Mul­ler