Lors de la grève des fonctionnaires du 19 avril dernier la présence d’une petite délégation du collège François Villon n’a pas manqué de marquer les esprits avec un cercueil et plusieurs pancartes jouant sur le RIP anglais (Rest in peace) et le REP+ (réseau d’éducation prioritaire) en lettres noires.
Au cœur de la colère des enseignants, la réforme de la carte scolaire décidée par la mairie de Mulhouse sans aucune considération pour la mixité sociale. Mais avant de nous plonger dans cet aspect, revenons à ce que sont les REP et REP+, sigle accolé tristement à tous les collèges publics de Mulhouse. Le dispositif permet à des collèges « sensibles » de subvenir à des besoins précis : encadrement des élèves renforcé, dispositifs de remédiations adaptés aux élèves, dotations pour certains projets… et surtout, le réseau permet de lier des écoles primaires à un collège de secteur et de faciliter le passage sensible du primaire au collège. Par exemple, pour le collège Saint-Exupéry, ce sont les écoles de Nordfeld, Le Sellier et Drouot qui composent la majorité des futurs élèves de 6ème.
La pression démographique sur Mulhouse oblige les décideurs à revoir la carte scolaire. Presque tous les collèges sont en tension sur le nombre délèves et se pose donc la question de comment re-répartir les élèves sur le secteur pour éviter la surpopulation. Lors de réunions entre le rectorat, les chefs d’établissement et la mairie de Mulhouse, plusieurs projets ont été proposés pour pallier à ce problème.
Le projet qui nous intéresse, celui porté et même imposé par la mairie de Mulhouse, a pour objectif de sortir l’un des collèges mulhousiens du dispositif REP+ pour en faire un collège de ville, bien côté et bien fréquenté. Le choix de la ville s’est porté sur le collège Kennedy où, pourtant, le taux d’évitement (comprenez les demandes de dérogation, les inscriptions dans des établissements privés) avoisine les 35%. Pour remplir le Kennedy avec de « bons » élèves, la ville a décidé de remodeler la carte scolaire en lui attribuant les quartiers traditionnellement plus aisés. Cela pourrait être une bonne idée car l’objectif de la mairie de Mulhouse, depuis longtemps, n’est pas de faire au mieux avec ce qu’elle a mais de faire venir des personnes extérieures (villes alentours, Allemands, Suisses, comprenez principalement des personnes aisées) pour enrichir la ville.
Le gros problème de cette stratégie, c’est qu’on met de côté les populations paupérisées de Mulhouse et qu’on dit adieu à la mixité sociale. Alors qu’au collège François Villon on pouvait faire se rencontrer des classes moyennes et des classes populaires, le public qui arrivera dans l’établissement concentrera davantage de classes populaires. Le cas est aussi flagrant pour le collège Saint-Exupéry qui accueillait des enfants du quartier Nordfeld et qui se repliera désormais principalement sur le Drouot, Barbanègre et une petite partie de Lefèvre.
Enfin, comme l’ont souligné les grévistes du collège Villon, c’est la fin du réseau d’éducation prioritaire. Avec la nouvelle carte scolaire, les élèves d’une école primaire seront dispatchés selon leur lieu de résidence dans différents établissements, rendant plus difficile les rencontres et les projets qui font le cœur d’une REP+.