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Le pri­vé tisse sa toile en favo­ri­sant la ségré­ga­tion sociale

Il est aisé d’ob­ser­ver dans les tableaux ci-des­sus que le pri­vé inté­resse d’a­bord le second degré. A peine 3% des écoles du 1° degré sont des éta­blis­se­ments pri­vés sous contrat, contre 25% pour l’en­semble des éta­blis­se­ments du second degré. 

De même que la part de la sco­la­ri­sa­tion dans le pri­vé ne s’est pas accrue ces der­nière années en Alsace, à tout le moins en termes d’offre sco­laire. De nou­veaux éta­blis­se­ments sous contrat (soit ceux qui se conforment au pro­gramme de l’Éducation Natio­nale et dont le trai­te­ment des per­son­nels est pris en charge par l’État) ne sortent pas de terre régu­liè­re­ment en Alsace. Sauf excep­tion périodique. 

Mais exa­mi­ner la pré­gnance de l’é­cole pri­vée au détri­ment du public, c’est néces­sai­re­ment poser la ques­tion de la mixi­té sociale. Et dans ce contexte, il est pos­sible de sou­te­nir que la ségré­ga­tion sociale est bien ins­tal­lée dans les éta­blis­se­ments catho­liques, comme le montre un article de Pierre Merle dans un article du « Café péda­go­gique » de 2016. Les don­nées sta­tis­tiques minis­té­rielles montrent ain­si ce dont on se doute depuis longtemps :

Le recru­te­ment social des col­lèges publics et pri­vés est sen­si­ble­ment dif­fé­ren­cié à deux titres. D’une part, les élèves d’origine popu­laire sont deux fois plus pré­sents dans les col­lèges publics que pri­vés (41% contre 19,5%) ; d’autre part, la pro­por­tion d’élèves d’origine aisée est net­te­ment plus forte dans les col­lèges pri­vés que publics (35,8% contre 19,3%).

Un blog péda­go­gique nan­tais dont un article est inti­tu­lé « L’enseignement catho­lique découvre la mixi­té sociale » indique que : de 2002 à 2012, le recru­te­ment social des col­lèges publics et pri­vés se carac­té­rise par un mou­ve­ment de dua­li­sa­tion sociale des deux sec­teurs. Sur les années 2002–2012, le recru­te­ment social du sec­teur public est res­té stable alors que le sec­teur pri­vé a connu un mou­ve­ment de dépro­lé­ta­ri­sa­tion (24% des élèves sont d’origine popu­laire en 2002, seule­ment 20% en 2012). Sur la même période, le sec­teur pri­vé s’embourgeoise : la part des enfants des caté­go­ries aisées passe de 30 à 36% de 2002 à 2012.

Un phé­no­mène de ségré­ga­tion sociale qui s’ac­cé­lère donc un peu par­tout du fait de la dua­li­té du sys­tème sco­laire fran­çais, nota­ble­ment dans le second degré, et bien enten­du éga­le­ment en Alsace. 

La situa­tion des langues : mar­queurs iden­ti­taires ou économiques

Les don­nées qui suivent ne sont pas pour sur­prendre : 82,5% des 179 642 élèves du 1° degré pra­tiquent la langue alle­mande, à rai­son de 3 heures par semaine, et 16,8%, soit 30 138 élèves, connaissent un ensei­gne­ment pari­taire bilingue. Un effec­tif qui a dou­blé en 10 ans. 

Les effec­tifs ont éga­le­ment dou­blé au col­lège, mais seuls 7,3% des élèves de l’enseignement pri­maire ont pour­sui­vi en 6ème de collège. 

Mais l’in­té­rêt de l’en­quête réside plu­tôt en ceci :

Plu­sieurs élé­ments sont remar­quables dans cette illus­tra­tion : si près d’un élève sur 5 pra­tique une troi­sième langue, sou­vent option­nelle, le choix peut être signi­fi­ca­tif. L’es­pa­gnol est de toute évi­dence la 3ème langue que l’on apprend par défaut, plus qu’on ne la choi­sit, car elle est pro­po­sée dans tous les éta­blis­se­ments publics. 

Mais des poches révé­lant la pra­tique d’une langue mino­ri­taire semblent en dire long sur les prio­ri­tés sociales des élèves, ou même sur leur ori­gine familiale !

L’i­ta­lien par exemple, en tant que 4ème langue d’enseignement, est par­ti­cu­liè­re­ment pré­sente dans les anciens bas­sins ouvriers où de nom­breux immi­grés ita­liens ont effec­ti­ve­ment vécu, et où leur des­cen­dance conti­nue vrai­sem­bla­ble­ment de vivre. Thann, Gueb­willer, Mul­house bien sûr, mais aus­si Séles­tat. La langue semble ici maté­ria­li­ser éga­le­ment un vec­teur de réap­pro­pria­tion ou de sur­vi­vance cultu­relle originelle. 

D’autres langues, comme le chi­nois, pra­ti­qué par près d’un mil­lier de col­lé­giens et lycéens alsa­ciens, sont signi­fi­ca­tives de la récep­ti­vi­té à la donne éco­no­mique inter­na­tio­nale. Langue d’af­faires avant tout, elle est logi­que­ment ensei­gnée dans les 3 grands centres urbains et/ou tou­ris­tiques de la région, que sont Stras­bourg, Mul­house et Colmar. 

La sexua­tion pour­sui­vie de l’o­rien­ta­tion professionnelle 

La lutte pour l’é­ga­li­té réelle entre filles et gar­çons a encore quelques batailles devant elle : 

Aux filles la sen­si­bi­li­té et aux gar­çons la rai­son scien­ti­fique ? La cari­ca­ture machiste semble être auto­réa­li­sa­trice, et pos­sé­der une indé­crot­table valeur aux yeux de la popu­la­tion lycéenne, et sans doute auprès des parents d’é­lèves, en Alsace comme ailleurs en France. 82% des bache­liers lit­té­raires alsa­ciens sont des bache­lières, et à peine 48% par­mi elles se risquent en série scien­ti­fique, alors même que les études montrent depuis fort long­temps que les filles sont au moins aus­si per­for­mantes, sinon plus, en mathé­ma­tiques et sciences que les garçons !

On retrouve cette répar­ti­tion sexuée des rôles dans le choix d’un ensei­gne­ment pro­fes­sion­nel : 92% des for­ma­tions indus­trielles (STI2D) sont trus­tées par des gar­çons, et 89% des for­ma­tions vouées aux domaines social, à la san­té (ST2S), au desi­gn ou aux arts (STD2A) sont sui­vies par des filles… 

Pour le reste des items pré­sen­tés, l’é­tude ne montre pas de par­ti­cu­la­rismes notables entre l’A­ca­dé­mie de Stras­bourg et le reste de la France. 

Vous pou­vez la consul­ter en tota­li­té ici.