En pho­to, le Pré­sident de la Répu­blique Vincent AURIOL (1947–1954), entou­ré de quelques réci­pien­daires haut-rhi­nois du cer­ti­fi­cat d’études primaires

Le mer­cre­di 15 avril 2020, le méde­cin de garde de l’Ehpad où demeure ma mère Denise WEISSER âgée de 83 ans, situé à Bant­zen­heim dans le Haut-Rhin m’a appe­lé à 10H30 pour me dire que ma maman avait contrac­té le virus du Covid-19. Elle avait été aus­cul­tée vers 5H30 du matin, avec les symp­tômes d’une fièvre à 38° et une toux per­sis­tante. Avec un taux d’oxygène à 85%, elle a été mise sous res­pi­ra­teur. Le méde­cin m’a indi­qué que seul des soins pal­lia­tifs lui étaient don­nés. Il m’a ras­su­ré en disant que ma maman était ali­tée dans sa chambre paisiblement.

Cette annonce bru­tale pour ma maman qui allait bien encore la semaine der­nière m’a lais­sé dans un désar­roi total avec une réflexion liée aux infor­ma­tions concer­nant la ges­tion de la crise sani­taire en France et la situa­tion de ma maman.

Ma pre­mière réflexion concerne les tests. Ma mère comme l’ensemble des pen­sion­naires et des per­son­nels des EHPAD du Haut-Rhin ont fait l’objet tar­di­ve­ment d’un dépis­tage du Covid-19 le mar­di 14 avril 2020. Le méde­cin m’a indi­qué que pour ma mère les résul­tats du test PCR n’était pas encore connu mais les symp­tômes étaient ceux du Covid-19.

Pour­quoi les auto­ri­tés publiques n’ont pas pra­ti­qué dans des délais rai­son­nables et notam­ment dans le Haut-Rhin pre­mier épi­centre du foyer de la pan­dé­mie en France, des tests dans les mai­sons de retraites hauts lieux à risque pour les per­sonnes âgées ? Dès la pre­mière quin­zaine du mois de mars la pan­dé­mie a flam­bé dans le Haut-Rhin. Il a fal­lu attendre plus d’un mois soit le 14 avril pour avoir des tests d’envergure dans les Ehpad du dépar­te­ment alsacien.

Concer­nant la conta­mi­na­tion dans l’Ehpad, ma maman était depuis de nom­breuses semaines ali­tée avant le confi­ne­ment et ne sor­tait plus de sa chambre. Seul un membre du per­son­nel dans le cadre de ses fonc­tions a pu entrer en contact avec ma maman et trans­mettre le virus. En effet, depuis début mars plus aucunes visites exté­rieures n’étaient pos­sible. Si les per­son­nels de la mai­son de retraite avaient pu être dépis­tés et avaient pu por­ter des masques, ma maman n’aurait pas été infec­tée par le virus du Covid-19.

Ma seconde réflexion concerne les soins appor­tés aux malades âgées atteintes du virus du Covid-19. Aucun trai­te­ment médi­cal n’est don­né aux per­sonnes âgées autre que les soins pal­lia­tifs. Avant de pro­di­guer des soins en réani­ma­tion dont on connaît les risques sur les per­sonnes âgées, il y a des soins alter­na­tifs avec notam­ment des anti­vi­raux et des trai­te­ment non inva­sifs pos­sibles dans les pre­miers jours de l’infection. Avec une autre ges­tion de la crise sani­taire m’a maman confi­née dans sa chambre n’aurait jamais été conta­mi­née et aurait pu béné­fi­cier de soins appro­priés le cas échéant si elle avait été dépis­tée dans les pre­miers jours de l’infection virale.

Ma troi­sième réflexion concerne les per­son­nels de la mai­son de retraite où vit ma mère. Une grande huma­ni­té règne dans cette mai­son de retraite de vil­lage et ma maman a tou­jours été bien accom­pa­gnée depuis ces nom­breuses années par le per­son­nel. Je pense à ces per­son­nels qui depuis tou­jours sont aux petits soins des pen­sion­naires et se retrouvent aujourd’hui dans une situa­tion au plan éthique très dif­fi­cile. Ain­si des per­son­nels faute de dépis­tage vont trans­mettre le virus. Ain­si les soi­gnants face aux pen­sion­naires infec­tés de la mai­son de retraite se retrouvent dans l’impossibilité de pro­di­guer les soins appro­priés pour sau­ver les malades.

Après avoir écrit ces pre­mières lignes en début d’après-midi, j’ai appris en fin jour­née de ce 15 avril, le décès de ma maman sans avoir eu la pos­si­bi­li­té d’avoir un der­nier contact avec elle. Le 15 mai 2020, soit un mois jour pour jour, ma maman aurait eu 84 ans.

Je retiens d’elle sa joie de vivre lorsqu’on lui ren­dait visite et ses chan­sons d’enfance en alsa­cien. Je retiens aus­si qu’en 1949 elle avait ter­mi­né 1ère de cer­ti­fi­cat d’études pri­maires dans le Haut-Rhin et avait été reçue avec les nomi­nés des autres dépar­te­ments fran­çais par le Pré­sident de la Répu­blique Vincent AURIOL (voir pho­to, 5ème jeune fille en par­tant de la droite). Je retiens aus­si sa mai­trise par­faite de la langue fran­çaise, alsa­cienne et allemande.

J’aurais aimé qu’elle puisse par­tir entou­rée de sa famille, en dehors de cette tem­pête virale qui en une jour­née à empor­ter ma maman.

Comme a dit ma plus jeune fille Jeanne, « j’espère qu’elle repose en paix » !

Fait à Blo­del­sheim, le 15 avril 2020.

Gabriel WEISSER

PS. J’ai déci­dé de pour­suivre devant la Jus­tice l’ancien direc­teur de l’ARS du Grand Est Mon­sieur Chris­tophe LANNELONGUE notam­ment pour l’absence de dépis­tage mais aus­si pour l’absence de masques de pro­tec­tion. J’ai déci­dé aus­si d’engager devant la Cour de Jus­tice de la Répu­blique, une action contre le Ministre de la San­té Oli­vier VERAN pour « mise en dan­ger de la vie d’autrui » et « défauts de soin ayant entrai­né la mort » en vue de pour­suites pénales.