Photo de Martin Wilhelm
C’était assez attendu. Les opposants au vaccin contre le covid, dont les rassemblements déclinaient gentiment en fin d’année dernière, au point même que les organisateurs s’interrogeaient sur leur continuité, peuvent sincèrement remercier le Président de la République, devenu désormais au moins aussi ordurier que banquier, pour leur avoir redonné des ailes afin de renouer avec une dynamique populaire.
A Mulhouse, nos témoins estiment en effet à plus de 2500, voire 3000 personnes, le nombre de participants. Une situation qui n’était plus survenue depuis quelques semaines.
Mais la chose est également vérifiable à Colmar, avec près de 2000 personnes, surtout liguées contre le maire Eric Straumann et le préfet du Haut-Rhin, et à Strasbourg, avec 1500 participants, une première depuis de longs mois.
Évidemment, le mouvement n’a pas plus d’emprise ou de relais politique qu’auparavant. Mais avec la donne électorale qui prévaut, l’impact des manifestations risque de peser bien davantage sur l’opinion publique ces prochaines semaines.
Avec l’imminence de la campagne pour l’élection présidentielle, pour peu que celle-ci ne soit pas reportée, et l’entrée en lice du favori du scrutin, quasiment assuré de l’emporter, tant son socle électoral lui est solidement acquis, et les oppositions morcelées ou divisées, c’est une période de tous les dangers qui pourrait advenir.
Chauffés à blanc par son chef de file, devenu un pyromane assumé, les soutiens et électeurs de la majorité, tout comme une fraction suiviste de la population, n’hésitent plus à multiplier les provocations et les propos infamants envers d’autres citoyens au prétexte de leur refus de la vaccination.
On voit notamment plus bas dans ce sondage de l’IFOP, que la plupart des personnes interrogées se situant dans l’arc politique dont un représentant sera candidat lors de la présidentielle à venir, sont prêtes (à l’exception des électeurs de Mélenchon), à soutenir que les malades du covid non-vaccinés devront assumer la prise en charge de leurs frais hospitaliers.
Les écologistes étant encore plus prompts à promouvoir cette idée que le parti socialiste, ce qui en dit suffisamment sur l’autoritarisme endimanché, quoique écoresponsable, que connait désormais cette frange électorale.
Manichéisme à blouse blanche
A quand le refus de prise en charge des non-vaccinés au motif qu’ils occupent des lits de réanimation destinés aux « bons » malades ? Après tout le Président a lui même évoqué la déchéance citoyenne dans laquelle ces réfractaires se placent en se soustrayant à une non-obligation !
Et le conducteur sous l’empire de l’alcool qui tue sur l’autoroute, on le prend en charge ? Et l’amateur de sport extrême qui se brise la colonne vertébrale, on le laisse agoniser sur son rocher ? Et le kamikaze qui se fait sauter mais ne fait que blesser, y compris lui-même, on le disperse ou on le ventile ? Et l’assassin djihadiste à l’agonie, on lui retire sa nationalité française avant de prolonger ses souffrances ? Et ce salaud de fumeur qui se prépare tranquillou un petit cancer à charge pour la collectivité, on lui fait chiquer son tabac avant de l’envoyer griller en enfer ?
Oui, le risque est une abomination. Il faut que la toute la vie sous mise sous cloche, réduite, ouatée, mielleuse et surtout maitrisée, en pilote automatique. Il faut qu’elle barbote dans l’antisepsie existentielle. La vie est un risque sexuellement transmissible. Et la mort est l’insupportable aléa qui invalide notre belle assurance devant l’avenir.
Du devoir de disposer de droits
C’est ainsi que le risque d’un refus de la vaccination, aussi légal soit-il, est un évènement considéré comme un inacceptable aléa pour le Président thaumaturge, pour qui, en vertu dont on ne sait quel raccourci juridique, dispose que les « devoirs précèdent les droits ».
Une affirmation péremptoire d’une aberration juridique sans égal, puisque la Déclaration des Droits de l’Homme, préambule de la Constitution française, repose symétriquement sur son contraire.
Les devoirs ne découlent que des droits. Et si devoirs il y a pour le citoyen, sans aucun doute, ils sont logiquement énumérés par la loi. Ainsi que le stipule l’article 5 de ladite Déclaration, dans lequel il est établi que « ce qui n’est pas interdit par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce que la loi n’oblige pas ».
On n’imagine pas suffisamment la portée centrale et matricielle de cet article dans notre loi organique. Sans cette digue juridique, c’est le fait accompli et l’arbitraire qui céderaient sans délai, devant le caprice du Prince.
Il est en outre essentiel de comprendre que les droits énoncés par la Déclaration ne sont pas l’octroi d’une quelconque autorité politique. Ils sont réputés « naturels » et « imprescriptibles ». Autrement dit, ils nous sont conférés par notre seule qualité de citoyen, et en conséquence ne peuvent nous être soustraits dans le temps.
Le grand avocat pénaliste Henri Leclerc, président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme, a examiné la question des droits et devoirs dans le cadre de la Déclaration. Il en retient ceci :
Les devoirs ne sont ni naturels, comme l’avaient bien vu nos pères constituants en 1789, ni universels, comme l’avaient constaté les nations assemblées en 1948. Quels devoirs faudrait-il énoncer ? Devoirs religieux ? Ils seraient en contradiction avec la liberté religieuse, qui comprend celle de ne pas avoir ou de changer de religion. Devoirs moraux ? Mais la liberté ne peut avoir d’autres bornes que celles qui sont définies par la loi. L’ordre moral n’est pas l’ordre public. Quant à l’obéissance à la loi, elle fait partie de la définition même de la liberté. Alors on en revient au débat de 1789. Il n’y a pas besoin d’énoncer de devoirs puisqu’ils sont contenus dans la Déclaration des droits. Nous avons pour seul devoir celui de respecter les droits d’autrui. Combattre pour la défense des libertés individuelles mais aussi des droits économiques et sociaux, c’est exercer nos droits de citoyens. Et nous avons effectivement le devoir de les exercer. Les sociétés démocratiques reposent sur l’existence des droits égaux de citoyens libres d’où émane le pouvoir. Ce sont les sociétés totalitaires qui reposent d’abord sur l’obéissance, sur des devoirs de l’Homme auxquels des droits peuvent alors être concédés.
« Droits et devoirs » de Henri Leclerc
De là, une question assez élémentaire : pourquoi donc le gouvernement ne décrète-t-il pas l’obligation vaccinale ? Une solution qui aurait au moins pour mérite de mettre à mal le déluge de contrôle techno-sanitaire, en rendant caduque la logique du passe, encore qu’il soit hautement improbable que le gouvernement y renonce aisément.
Ultra moderne surveillance et punition
Corinne Lepage, ancienne ministre de l’environnement et partisane de la vaccination, expose sur l’antenne de LCI une hypothèse tout à fait crédible à ce sujet.
De ce fait, le devoir d’obéissance auquel enjoint le pouvoir politique est non seulement illégal, mais il est réfuté par le réel. Voilà des responsables politiques qui agissent pareillement aux dévots d’une religion. Ils ont foi en un vaccin, un peu comme l’on se persuadait jadis que l’éther fut l’expression d’une substance primordiale et universelle, remplissant les espaces situés au-delà de l’atmosphère terrestre.
Une idée que les scientifiques n’abandonnèrent réellement qu’à la faveur de l’élaboration de la physique quantique, à l’orée du 20ème siècle. Le réel avait été plus fort, et bien plus dérangeant, car contre-intuitif, que la croyance substantielle en l’éther.
Pourtant, ici et maintenant, le réel documente cette fois l’incapacité de l’injection à agir véritablement contre les variants, donc contre les contaminations. Le dernier surgeon viral en date profite même des personnes vaccinées ou infectées pour se diffuser davantage, ainsi que l’affirme l’orthodoxe épidémiologiste Catherine Hill.
Faut-il alors revenir sur cette politique insensée du tout vaccinal indiscriminé ? Une politique du passe vaccinal qui « détruit l’avenir des adolescents » comme le souligne nos confrères de « Reporterre ».
Bien sûr que non ! Il faut au contraire généraliser le vaccin à tous et pour tous ! Et s’il faut extorquer le consentement à la piqure par les moyens les plus ignobles, on le fera.
Il se trouve même un médecin et un avocat pour proposer que les non-vaccinés et les « désinformateurs » soient poursuivis pour homicide involontaire, mise en danger et administration de substance « nuisible » à la manière des malades du SIDA qui ont sciemment transmis la maladie. On ne sait pas vraiment ce que recouvre la notion de « substance nuisible », mais l’on peut supposer qu’il s’agit de tout traitement non officiellement admis.
Contribuer à la construction de la figure du bouc-émissaire. Le propos ordurier du chef de l’État ne suppose rien d’autre. Son « emmerder jusqu’au bout », indéfini, est une invitation au passage à l’acte. Et il pourrait être violent, que ce soit dans l’un ou l’autre « camp ».
A la manière de l’anthropologue et philosophe René Girard, il faudrait au moins supposer que ce bouc-émissaire, une fois châtié ou sacrifié, ramènera malgré lui la paix sociale ou la concorde sur la cité. Rien n’est moins vrai.
Il serait plutôt à craindre l’avènement d’une société de la sujétion perpétuelle et du contrôle technologique, à laquelle les « citoyens » se soumettent en échange d’une liberté aussi formelle que conditionnée. Rien à voir avec la situation actuelle, bien sûr !
En somme, comme le souligne l’essayiste Mathieu Slama, une « société disciplinaire », sous-titre de son ouvrage à paraitre, intitulé « Adieu la liberté »…
Ci-dessous la galerie photographique de notre photographe Martin Wilhelm :