Pho­to de Mar­tin Wilhelm

Les mots ont du sens. A les tordre pour impo­ser une inexac­ti­tude, on leur fait perdre leur sens réel… et on ne trompe per­sonne. Comme toute la presse, le DJU (Double jour­nal unique DNA-Alsace du Cré­dit Mutuel), s’efforce de mettre en avant « l’essoufflement » qui aurai gagné les mani­fes­tants du 6 juin, la « der des der » veulent-ils y voir. Comme celle de 14–18 qui devait être la « der des der » des guerres, le 6 juin n’est pas non plus la fin de l’histoire…

La jour­na­liste du JU ouvre même son article en ayant trou­vé un des mani­fes­tants qui expri­mait sa « décep­tion » de ne pas voir plus de per­sonnes dans la rue. Certes, avec 2000 mani­fes­tants à Mul­house (selon notre propre comp­tage), nous n’en sommes plus au nombre impres­sion­nant de la plu­part des autres 13 ras­sem­ble­ments mul­hou­siens. Mais tout de même…

Cette mani­fes­ta­tion du 6 juin reste une des plus impor­tante que la cité du Boll­werk ait connue ces der­nières années. Et nous n’avons pas trou­vé LE mani­fes­tant qu’apparemment L’Alsace a déni­ché, prêt à expri­mer un sen­ti­ment néga­tif : tous les témoi­gnages que nous avons recueillis com­prennent la baisse de par­ti­ci­pa­tion, mais exprime leur com­ba­ti­vi­té intacte et leur volon­té de ne pas ran­ger les ban­de­roles. Les syn­di­ca­listes, en pre­mière ligne, font tout pour pré­ser­ver leur uni­té et font état des nom­breux défis qui les attendent dans les pro­chaines semaines.

UN GOUVERNEMENT QUI NE CONVAINC PLUS

Selon un son­dage Ifop réa­li­sé pour le JDD, 57 % des Fran­çais déclarent sou­te­nir ou avoir de la sym­pa­thie pour le mou­ve­ment de grèves et de mani­fes­ta­tions du 6 juin contre la réforme des retraites. Et cela après que la loi a été pro­mul­guée et que les décrets d’application se suivent les uns après les autres.

Et sur­tout après une intense cam­pagne média­tique à laquelle tous les médias (sauf de rares excep­tions dans la presse atta­chée au plu­ra­lisme) se sont prê­tés : pas une émis­sion d’information à la télé, pas une émis­sion de diver­tis­se­ment, pas un pla­teau de la presse d’information conti­nu, avec une uti­li­sa­tion éhon­tée de la radio d’État qu’est deve­nu le ser­vice public de la radio-télé­vi­sion, sans qu’un ministre ne viennent faire la pro­mo­tion de la gran­deur de Sa Majes­té Macron ou de la per­ti­nence de nou­velles réformes à venir… Des diver­sions qui n’ont pas détour­né la colère d’une majo­ri­té de Fran­çais non pas uni­que­ment contre la loi retraite ou les réformes anti-sociales du gou­ver­ne­ment, mais éga­le­ment sur la « gou­ver­nance » avec une uti­li­sa­tion de toutes les ficelles anti­dé­mo­cra­tiques légales mais illé­gi­times pour empê­cher le Par­le­ment de voter.

Cette colère-là n’a pas dis­pa­rue et les syn­di­cats en ont encore sous le pied pour relan­cer grèves et mani­fes­ta­tions sans attendre.

DES MAUVAIS COUPS EN PRÉPARATION

Il fau­dra bien reve­nir, un jour ou l’autre, sur cette réforme des retraites qui est au béné­fice exclu­sif des grands groupes finan­ciers qui com­mencent déjà à pros­pec­ter pour pla­cer leur came­lote de « retraites complémentaires ».

Mais comme nous l’ont rap­pe­lé plu­sieurs des per­sonnes inter­ro­gées durant la mani­fes­ta­tion, de nou­veaux mau­vais coups se pré­parent. La réforme de l’assurance chô­mage et du RSA est un autre clou que M. Macron et son gou­ver­ne­ment veulent plan­ter dans le cer­cueil de la pro­tec­tion sociale en France.

D’autre part, le lan­ce­ment d’un pro­jet de loi sur l’immigration dans un contexte arti­fi­ciel­le­ment créée par une cam­pagne média­tique d’une puan­teur insup­por­table pour réveiller, auprès des citoyens, une haine de l’immigré et de l’étranger, est des­ti­né à divi­ser la popu­la­tion pour détour­ner la colère social vers d’autres objectifs.

L’Intersyndicale est à pré­sent devant un vrai défi : celui de main­te­nir le cap enga­gé lors de cette bataille contre la retraite qui ne se solde pas par une défaite pour les syn­di­cats. Ils ont gagné en confiance, en adhé­sion : leur fer­me­té et la com­pré­hen­sion dont ils ont fait preuve pour les pro­blèmes quo­ti­diens des Fran­çais leur a per­mis de pré­ser­ver l’essentiel, c’est-à-dire leur capa­ci­té de mobilisation.

Qu’ils conti­nuent d’en faire bon usage…