Les « com­mu­ni­cants », ces nou­veaux gou­rous du 21e siècle, créent des « élé­ments de lan­gage », sorte de pro­pos « pré-pen­sés » répé­tés ensuite à satié­té par les poli­tiques et aus­si, mal­heu­reu­se­ment, de plus en plus les journalistes.
Ain­si, le terme « migrants » est le terme uti­li­sé en France quand on parle de ceux qui fuient guerre, dic­ta­ture et misère en espé­rant trou­ver des cieux plus clé­ments. Dans l’article « Des mots, des murs, des morts… », Chris­tian Rube­chi rap­pelle : « Signe du temps mau­vais la vieille dis­tinc­tion entre « migrants volon­taires pour rai­sons éco­no­miques » et « réfu­giés » au sens du droit inter­na­tio­nal et de la Conven­tion de Genève de 1951 (…) est de retour dans les dis­cours et déclarations. »
En Alle­magne, on les appelle « Flücht­linge », ceux qui fuient. En France « migrants ». Un coup d’œil dans le dico : « indi­vi­du tra­vaillant dans un pays autre que le sien » ou « per­sonne effec­tuant une migration. »
Qu’on le veuille ou non l’utilisation du terme « migrants » est une démarche poli­tique : le terme « réfu­giés » qui, lui, est adap­té à la situa­tion, n’est pra­ti­que­ment pas utilisé.
Est-ce la peur que le terme « réfu­giés » éveille­rait plus de com­pré­hen­sion, voire de com­pas­sion, dans l’opinion publique ?
On ne peut éva­cuer cette ques­tion quand on voit com­ment le gou­ver­ne­ment fran­çais s’est oppo­sé au trai­te­ment de cet exode mas­sif par la Com­mu­nau­té euro­péenne. Il a fal­lu que l’Allemagne annonce qu’elle va accueillir un nombre impor­tant de « Flücht­linge » pour que Hol­lande et Valls emboîtent le pas.
Le terme « migrants » n’est pas sans rap­pe­ler « immi­gra­tion », le thème favo­ri du FN et de l’ex-UMP pour ins­til­ler la peur et le rejet de l’autre à des fins électorales.
Ce trai­te­ment séman­tique « posi­tif » de l’autre côté du Rhin et « néga­tif » de ce côté-ci, est-il une expli­ca­tion pour les 60% d’Allemands qui sou­haitent accueillir les réfu­giés alors que 53% des Fran­çais (dont 63% dans la tranche 35 à 29 ans) les rejettent ?
Un réfu­gié – au sens de la Conven­tion rela­tive au sta­tut des réfu­giés et des apa­trides – est « une per­sonne qui se trouve hors du pays dont elle a la natio­na­li­té ou dans lequel elle a sa rési­dence habi­tuelle ; qui craint avec rai­son d’être per­sé­cu­tée du fait de sa « race », de sa reli­gion, de sa natio­na­li­té, de son appar­te­nance à un cer­tain groupe social ou de ses opi­nions poli­tiques, et qui ne peut ou ne veut se récla­mer de la pro­tec­tion de ce pays ou y retour­ner en rai­son de ladite crainte. »
C’est bien ce terme que nous conti­nue­rons d’utiliser dans L’Alterpresse.

Michel Mul­ler