Gabriel Weiser, un des militants les plus actifs pour la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, nous fait part d’un événement grave et inadmissible. Ilse Martin, une autre militante de la même cause, a connu pareille mésaventure il y a quelque temps. Nous publions volontiers ces témoignages car on se pose la question du rôle d’un corps comme la gendarmerie. Est-il au service du maintien de l’ordre républicain qui intégrer le droit d’informer, de manifester ou bien serait-il une partie intégrante d’une stratégie d’Etat visant à impressionner les citoyens pour les empêcher de pouvoir librement exprimer leur avis ouvertement dans la rue. Zèle d’un pandore ou acte mûrement réfléchi ? Les deux hypothèses méritent qu’on ne taise pas de tels agissements.
« Ce vendredi 17 mars 2017, j’étais en présence d’une équipe de TV5MONDE, avec un caméraman et un jeune journaliste, Jérémy DESCOURS pour l’émission « Les Haut-Parleurs », lorsque peu après 15H, à la fin de l’interview près de la centrale nucléaire de Fessenheim, nous retournions à la voiture lorsque nous avons aperçu un véhicule de Gendarmerie garé derrière le nôtre.
L’un des 2 gendarmes qui me connaissait d’un précédent contrôle, m’a appelé par mon nom et nous a fait comprendre que le véhicule était mal stationné, qu’il représentait un danger et qu’un appel à la fourrière venait d’être fait pour qu’il soit évacué. Sauf que le véhicule était garé le long de la route dans une zone d’herbe sans aucune signalisation routière de contre-indication et qu’en rien il ne représentait un danger pour les autres usagers de la route. Finalement, le gendarme nous a dit que pour cette fois, c’était bon.
Par contre, le gendarme m’ayant appelé par mon nom s’est fâché avec moi me disant que cela commençait à bien faire de venir souvent près de la centrale nucléaire, que le dimanche d’avant j’avais déjà fait l’objet d’un contrôle. Je lui ai répondu que nous étions en zone ouverte au public et que rien ne m’empêchait de venir ici dans le cadre de mon engagement de riverain inquiet de la centrale nucléaire de Fessenheim. Il m’a indiqué que la prochaine fois, il ferait enlever le véhicule par la fourrière et que la facture me serait adressée même si je ne suis pas propriétaire de la voiture. Il m’a prévenu qu’il allait établir des renseignements judiciaires me concernant. Pour terminer, il m’a menacé de me faire emmener au poste de la gendarmerie alors que je lui avais présenté mes papiers d’identité en bonne et due forme et que mon ton durant l’échange était resté courtois mais s’il n’appréciait visiblement pas que je me permettre de lui répondre.
Je trouve insupportable de pouvoir ainsi faire l’objet d’une pression policière dans le cadre de l’exercice de ma liberté d’expression, concernant mon inquiétude à propos de la doyenne des centrales nucléaires françaises de Fessenheim. Mon engament citoyen se déroule toujours dans le cadre des lois de la République.
J’ai signalé au gendarme que d’autres rendez-vous avec des médias étaient programmés dans les temps prochain en raison de l’élection Présidentielles 2017 et que je les maintiendrai.
Pour finir, j’ai indiqué au gendarme qui avait sa carte d’identification accrochée à son uniforme (Monsieur F.F.) que j’informerai qui de droit. Il a retiré alors sa carte d’identification.
Je comprends que la gendarmerie nationale assure notre sécurité à fortiori sur un site sensible, mais je ne peux accepter les intimidations ou les pressions policières pour m’interdire d’exprimer mon opinion concernant le CNPE de Fessenheim.
Je respecte profondément le travail de notre Gendarmerie nationale très difficile dans ces temps d’État d’urgence, mais il est nécessaire d’articuler les impératifs de sécurité publique avec les libertés publiques.
Je m’interroge sur la nature de cette intervention policière et me demande si elle relève d’une initiative individuelle malheureuse ou d’une injonction institutionnelle.
Pour finir, le journaliste de TV5MONDE m’a indiqué que je devais sûrement faire l’objet d’une fiche S.
En tout cas en 2017, je ne reconnais plus la France des droits de l’Homme et du citoyen et je crains pour ma liberté !
Gabriel WEISSER
Riverain inquiet de la doyenne des centrales nucléaires françaises.
Un autre témoignage
« J’ai vécu une histoire similaire en hiver, quand j’ai rencontré deux copains un dimanche midi devant la centrale. Il pleuvait, ils avaient fixé une bannière ( « votre promesse M. Hollande ? ») d’un côté de la route longeant la centrale et leur voiture se trouvait auprès de la banque pique-nique au coin où tourne la route dans le village (avec panneau « Fessenheim »).
A cause de la pluie, je me suis assise avec eux dans leur voiture pour bavarder, la mienne étant garée devant la leur.
Au bout d’à peine 5 minutes, une voiture de gendarmerie arrivent avec deux mecs qui demandaient après le conducteur de la mienne …
- Papiers d’identité? permis de conduire?
- moi: was ist das problem? (je préférais ne pas parler français)
- lui: interdit de se garer ici !
A côté d’une table avec 2 bancs de pique-nique ? C’était évidemment un mensonge puisqu’il n’y avait naturellement pas de signe d’interdiction de stationner/ Parkverbot
Je leur ai montré mon permis de conduire ( mais pas DONNÉ, à cause d’une mauvaise expérience avec un flic-motard abusif dans le sud de la France quelques années plus tôt ).
Ceci à fâché le monsieur.
Je lui disais: « Das reicht, Sie können so alles lesen. » (« Cela doit vous suffire, vous êtes en mesure de tout lire !).
Le gendarme appela quelqu’un avec son portable et donnait à cette personne mes coordonnées. Ce qui m’a alors fâché moi !
Il me rétorqua qu’en France régnait l’état d’urgence et qu’ils avaient le droit de contrôler. (C’est donc cela la justification professionelle de leur comportement ).
Après que les flics s’en sont allés, les copains m’ont dit qu’on les avait, eux aussi, plusieurs fois contrôlés et qu’ils s’étaient entretenus avec les gendarmes : ceux-ci ont affirmé qu’ils sont payés pour embêter les gens !
Lors de mon processus de digestion de cette histoire, je me suis dit qu’au prochain gendarme qui me mentira encore, je dira qu’il ne faut pas s’étonner qu’on ne vous respecte pas car si, en tant que « Ordnungshüter » ( personne qui doit être respectable et respectueuse ) vous mentez tout le temps et abusez de votre pouvoir, on peut s’interroger comment vous vous y prendrez pour sauver la population quand la centrale « toussera ».
Et avoir la capacité de répondre à des questions sur la technique, la situation de la centrale ou sur les plans d’urgence. Je suis relativement sûre que j’en sais plus qu’eux. »