On le sait en lisant régulièrement L’Alterpresse. Le Crédit Mutuel veut, par tous les moyens, liquider deux imprimeries et licencier les 130 salariés concernés : 60 à Metz, au Républicain Lorrain, 70 à Mulhouse, à L’Alsace. Malgré les propositions et les efforts continus du Comité d’entreprise de L’Alsace, MM. Théry et Carli, respectivement président du Crédit Mutuel et directeur du pole presse, ne veulent rien entendre. La logique financière veut qu’il faut tuer entreprises et emplois. Même au prix de manières pas très ragoutantes qui feront hurler les vrais mutualistes de la banque.

Nous avons déjà dévoi­lé à nos lec­teurs les méthodes et la ges­tion des entre­prises d’un patron impri­meur de la presse pari­sienne, M. Ric­co­bo­no. Il y a quelques mois, le Cré­dit Mutuel était en pour­par­lers pour céder l’impression d’une par­tie de ses titres à cet impri­meur bien connu pour son opti­mi­sa­tion fis­cale au Luxem­bourg… Et qui mérite de figu­rer dans les Para­dise Papers. Nos révé­la­tions ont-elles fait un effet ? En tout cas, MM. Thé­ry et Car­li ont dû démen­tir tout rap­pro­che­ment avec l’imprimeur pari­sien qui pos­sède une entre­prise à Nancy.

Or, selon nos sources, l’hypothèse Ric­co­bo­no revient sur le tapis car nous appro­chons des dates fati­diques où doivent être annon­cées à des sala­riés remon­tés, la sup­pres­sion de leurs emplois et de leur imprimerie.

Les dis­cus­sions ont com­men­cé à Metz, celles à Mul­house sont pré­vues le mer­cre­di 6 décembre. Mais la fer­me­ture de l’entreprise de Metz pose­rait quelques pro­blèmes pour impri­mer la tota­li­té des édi­tions du Répu­bli­cain à Nan­cy sur les presses de son « concur­rent » l’Est Répu­bli­cain: dif­fi­cile de digé­rer l’ensemble des quelques 100.000 exem­plaires du jour­nal messin.

Subrep­ti­ce­ment, dans le dos des sala­riés concer­nés, le Cré­dit Mutuel a pris contact avec M. Ric­co­bo­no pour lui pro­po­ser d’imprimer quelques édi­tions et de les faire dis­tri­buer par la toute proche agence de messagerie.

De quoi atti­ser la colère des sala­riés du Répu­bli­cain Lor­rain d’abord qui s’interrogent sur la néces­si­té réelle de fer­mer leur impri­me­rie. Mais fureur à Mul­house, où le pro­jet du Comi­té d’entreprise de main­tien et de déve­lop­pe­ment de l’imprimerie de L’Alsace envi­sa­geait une charge de tra­vail pou­vant venir d’autres jour­naux. En effet, n’est-ce pas frap­pé de bon sens que les édi­tions de Bel­fort, Mont­bé­liard, Franche-Com­té de l’Est Répu­bli­cain pour­raient s’imprimer à Mul­house bien plus proche de ces zones de dif­fu­sion que l’établissement nan­céien. Grâce à cet apport en charge de tra­vail, l’imprimerie mul­hou­sienne peut reve­nir à l’équilibre.

M. Car­li fait donc clai­re­ment le choix de don­ner l’impression de ces jour­naux à une impri­me­rie exté­rieure à son groupe alors que celui-ci pos­sède des outils en capa­ci­té de la réa­li­ser. Com­ment le même M. Car­li va-t-il faire accep­ter aux sala­riés de L’Alsace la casse de leur impri­me­rie tout en confiant la charge de tra­vail à une entre­prise exté­rieure connue pour pra­ti­quer l’évasion fis­cale et qui pour­rait, à tout moment, rele­ver de pour­suites pénales ?

Ache­ter la paix sociale ?

Mais tou­jours selon nos recherches, il sem­ble­rait que le Cré­dit Mutuel fasse miroi­ter à une poi­gnée de délé­gués syn­di­caux, des postes dans l’entreprise de M. Ric­co­bo­no à Nan­cy. Une aubaine pour cer­tains. Car l’entreprise Ric­co­bo­no peut béné­fi­cier d’un plan social négo­cié entre les patrons de la presse pari­sienne et le gou­ver­ne­ment, per­met­tant de faire par­tir des sala­riés ayant plus de cin­quante ans dans d’excellentes condi­tions. De toute évi­dence, les entre­prises et les pou­voirs publics sont prêts à mettre un paquet d’argent pour liqui­der les emplois en s’achetant la paix social avec de l’argent public !

Evi­dem­ment, si des délé­gués syn­di­caux de l’Est Répu­bli­cain, du Répu­bli­cain Lor­rain, de L’Alsace, étaient trans­fé­rés dans l’entreprise de M. Ric­co­bo­no, ils seraient, eux, tirés d’affaire… Dans quelques mois ils pour­ront jouir d’une belle pré-retraite… et aujourd’hui, ils ne seront pas les plus viru­lents pour s’opposer à la fer­me­ture de leur entre­prise ! C’est ce qu’on appelle « ache­ter un plan social » !

Mais pour les sala­riés concer­nés et les délé­gués hon­nêtes, eux, la galère com­men­ce­ra dès la porte de leur entre­prise fer­mée. De quoi don­ner la rage et de mener la lutte pour gar­der un emploi qu’aucune « géné­reuse prime de départ » ne pour­ra jamais remplacer.

Si d’aventure nos infor­ma­tions se véri­fiaient, le Cré­dit Mutuel aura beau­coup per­du de son image… et de son hon­neur de banque soi-disant mutualiste.

Michel Mul­ler