Le 17 mars la des­serte fores­tière du Hol­schlag­kop a été inau­gu­rée par l’as­so­cia­tion fores­tière de la Dol­ler en pré­sence d’é­lus et de pro­prié­taires forestiers.

Le pré­sident des fores­tiers d’Al­sace rap­pe­lait à cette occa­sion que pas moins de onze asso­cia­tions syn­di­cales de ce type avaient été réa­li­sées dont la der­nière sera fina­li­sée à Rim­bach cette année (L’Al­sace du 3 avril 2018 « Une nou­velle des­serte fores­tière »).…soit 1892 hec­tares de forêts pri­vées, com­mu­nales et dépar­te­men­tales pour 70 kilo­mètres de routes amé­na­gées et 575 000 Euros de sub­ven­tions reçues de l’Eu­rope, de l’État, de la Région Alsace.

Par ailleurs le plan plu­ri­an­nuel régio­nal de déve­lop­pe­ment fores­tier 2012–2016 affiche en exergue du docu­ment: « Plus de ges­tion fores­tière durable pour mobi­li­ser et uti­li­ser plus de bois, maté­riau renouvelable ».

Et on rap­pelle que 68 086 euros ont été « flé­chés » pour la seule asso­cia­tion fores­tière auto­ri­sée du Spri­ckels­berg (ASA) pour « l’a­mé­lio­ra­tion de la des­serte fores­tière Kirch­berg Dolleren ».

Le plan pres­crit notam­ment le déve­lop­pe­ment des débar­dages par câbles lorsque le débar­dage clas­sique n’est pas pos­sible, rap­pelle les forts enjeux envi­ron­ne­men­taux (Natu­ra 2000, réserves bio­lo­giques, réserves natu­relles, péri­mètres de cap­tage, le plus grand sou­ci du res­pect de la « forte demande socié­tale alsa­cienne vis à vis de la pré­ser­va­tion des milieux et des pay­sages) »… et n’ou­blie pas de pré­co­ni­ser de « Pro­duire plus de bois tout en pré­ser­vant mieux la bio­di­ver­si­té, une démarche ter­ri­to­riale concer­tée dans le res­pect de la ges­tion mul­ti­fonc­tion­nelle des forêts ».

Pour­quoi donc s’é­mou­voir par­ti­cu­liè­re­ment du pro­jet de des­serte fores­tière du Sprickelsberg ?

Le 26 sep­tembre se ras­sem­blaient à Mul­house les « mar­cheurs pour la forêt » à l’ap­pel d’a­gents de l’Of­fice Natio­nal des Forêts et de leur inter­syn­di­cale  SNUPFEN (Union syn­di­cale Forêts), dans le cadre d’une action nationale.

L’ob­jec­tif ? Aler­ter sur l’a­ve­nir des forêts publiques, de toutes les forêts publiques.

Le film « Le temps des forêt, qui sera pré­sen­té à Saint-Ama­rin avec leur par­ti­ci­pa­tion dans le cadre du fes­ti­val du film enga­gé (novembre – date de prin­cipe le 22 ) concourt à cette mobi­li­sa­tion en réveillant  le débat sur la ges­tion fores­tière. Il déve­loppe un plai­doyer contre « la mal-fores­ta­tion ».

Au delà des arbres cou­pés et de leur renou­vel­le­ment, de l’ins­pi­ra­tion  « mal-fores­ta­tion » et des pra­tiques et logiques de l’a­gri­cul­ture inten­sive, le film enchaîne les focus sur les coupes rases, l’en­ré­si­ne­ment ou les forêts mono­spé­ci­fiques com­po­sées d’une seule essence d’arbre et la fré­quente sté­ri­li­sa­tion de sols  deve­nus d’é­pais tapis d’ai­guilles sans renou­vel­le­ment végé­tal ni micro – orga­nismes. Il montre l’u­ti­li­sa­tion inten­sive de machines fores­tières  tou­jours plus grosses écra­sant les sols…rentabilisation des engins oblige – , les dom­mages poten­tiels à des voies d’eau, l’é­pan­dage ponc­tuel de pes­ti­cides en forêt…et la restruc­tu­ra­tion d’un Office Natio­nal des Forêts sans doute jugé trop peu adap­té à ces nou­velles logiques.

A la lec­ture de l’é­tude d’im­pact (voir liens ci-des­sous) préa­lable à la demande d’au­to­ri­sa­tion de la des­serte fores­tière du Spri­ckels­berg on com­prend mieux pour­quoi le maire de Dol­le­ren, par ailleurs pré­sident de l’As­so­cia­tion fores­tière auto­ri­sée (ASA), regret­tait « l’a­lour­dis­se­ment des démarches admi­nis­tra­tives (étude d’im­pact envi­ron­ne­men­tal) »  dans le numé­ro de sep­tembre de « Forêts pri­vées du Grand Est »!

On com­prend aus­si pour­quoi cette étude d’im­pact n’a pas été, déli­bé­ré­ment, élar­gie aux modes d’ex­ploi­ta­tion de la forêt future, aux espèces d’arbres de rem­pla­ce­ment, aux modes d’ex­ploi­ta­tion envisagés.

L’é­tude pointe déjà des dégâts évi­dents pour la faune – dont des espèces pro­té­gées – , la flore, des risques induits pour les eaux de ruis­sel­le­ment, les zones humides, des risques pay­sa­gers, les condi­tions d’é­va­cua­tion des grumes par camions par le réseau en forêt à construire, les nui­sances dues aux tra­vaux de réa­li­sa­tion des des­sertes et aires de retour­ne­ment des engins et camions sur deux ans de réa­li­sa­tion -  mais demain ?

Et il n’y a pas d’é­tude sur les inci­dences cir­cu­la­tion en fond de val­lée (déjà lar­ge­ment inadap­tée à la cir­cu­la­tion actuelle d’au­to­cars, de camions divers, aux flux des véhi­cules de fron­ta­liers, aux risques dans les nom­breux vil­lages tra­ver­sés, etc…).

Et que dire des pro­cé­dures de concer­ta­tion de la popu­la­tion concer­née ?  Certes les consul­ta­tions légales – conduites a mini­ma –  mais aucune consul­ta­tion directe des habi­tants, pas de réponses aux inter­pel­la­tions  diverses, une dis­cré­tion inquié­tante des por­teurs du projet.

Le Pré­sident de l’A­SA  décla­rait que « des chan­tiers concer­tés vont être mis en place autour de cette des­serte » (revue pré­ci­tée). Quels enga­ge­ments pré­cis prend-il ?

Et com­ment a‑t-on pu igno­rer dans ce pro­jet  une vision glo­bale d’un amé­na­ge­ment de la val­lée où les zones indus­trielles se déve­loppent vers Burn­haupt, – et c’est bien –  et où le haut boi­sé de la val­lée connaît des condi­tions d’ex­ploi­ta­tion des forêts rai­son­nables, pour modi­fier cet équi­libre glo­bal au seul pro­fit de quelques inté­rêts financiers ?

Ce n’est pas un hasard si dans le film pré­ci­té la seule voix dis­so­nante enten­due est celle du repré­sen­tant d’ un repré­sen­tant  d’une grande scie­rie industrielle.

Il faut désor­mais mar­quer un arrêt à ces pra­tiques de sur­ex­ploi­ta­tion des forêts et don­ner tout leur sens, voire élar­gir la por­tée de ces ces études d’im­pact, qui n’é­taient pas jus­qu’à pré­sent mises en oeuvre. 

On évoque volon­tiers l’é­qui­libre « syl­vo-ciné­tique  » dans les milieux tech­niques concer­nés par ce type d’exploitation fores­tière outran­cière; on parle donc équi­libre entre chas­seurs et exploi­tants forestiers.

Et les autres ? Ceux pour qui la forêt est fac­teur majeur de l’en­vi­ron­ne­ment, du cli­mat, de la détente,  des pay­sages, d’un tou­risme pai­sible, d’un cadre de vie, d’une éco­no­mie locale spé­ci­fique riche de pos­si­bi­li­tés… liées à une véri­table forêt et pas à des ran­gées de sapins de Noël ou des arbres pour pâte à papier plan­tés sur des sols sté­ri­li­sés et où la vie ani­male a disparu.

Tant qu’à par­ler d’é­qui­libre nous en pro­po­sons un autre:

« Forêt bien com­mun, démo­cra­tie et consul­ta­tion des habi­tants, amé­na­ge­ment ter­ri­to­rial raisonné. »

« Peut-on encore appe­ler ça une forêt » ? demande un inter­ve­nant dans le film « Le temps des forêts » fil­mé devant un ali­gne­ment de rési­neux plan­tés en files avec un espa­ce­ment cali­bré de trois mètres.

Nous ne vou­lons pas de camions gru­miers dans les forêts, d’en­gins géants de débar­dage, d’emprises au sol sacri­fiées pour des voies de rou­le­ment de plus de 10 mètres de large, de risques de pol­lu­tions diverses, d’at­teintes graves à la faune et à la flore, de coupes rases telles celles de Kirch­berg et Rimbach !

Le pro­jet de des­serte fores­tière du Spri­ckels­berg ne doit pas se faire parce que c’est un pro­jet dérai­son­nable, dis­pro­por­tion­né aux besoins  col­lec­tifs, et qu’il contri­bue à un amé­na­ge­ment de la val­lée tota­le­ment  illogique.

Col­lec­tif citoyen du Sprickelsberg.

Étude d’im­pact Par­tie 1:

http://www.haut-rhin.gouv.fr/content/download/19925/128797/file/Partie%201%20Dossier%20compl%C3%A9t%C3%A9%20EI_ASA_Sprickelsberg_V4.0.pdf

Étude d’im­pact Par­tie 2: à deman­der en pré­fec­ture du Haut-Rhin, donc ! La deman­der sera déjà une marque de mobilisation.…

Ci-des­sous, l’en­tre­vue de Chris­tian Rube­chi, membre du Col­lec­tif citoyen du Spri­ckels­berg, inter­ro­gé par Jeanne sur Radio MNE: