C’est reparti ! Retour de la bureaucratie paperassière de l’auto-autorisation (prélude à l’auto-délation ?), dont celle qui atteste que je suis bien en train de faire ma promenade aussi unique que quotidienne. Attestation qui n’est en vigueur, à notre connaissance, qu’en France, en Italie, en Grèce et… en Azerbaïdjan ! Gageons que se situe là la clef du succès dans la lutte contre la pandémie !

A repris également le cirque du périmètre ambulatoire circonscrit à « un rayon d’un kilomètre autour de son domicile ». Limite fixée tant dans l’espace que dans le temps, puisque la déambulation doit s’inscrire dans une durée maximale d’une heure : si tu n’as pas marché assez vite pour profiter du périmètre circulaire théorique de 6,28 km, tant pis pour toi !

Un kilomètre, c’est dans mon cas trop court pour atteindre la forêt qui se trouve au-delà des champs, si proche pourtant : il y manquerait moins de 400 mètres.

J’aimerais être Anglais : si j’avais été Anglais, on m’aurait concédé au moins un mile, soit 1,6 km. Il ne serait venu à l’esprit d’aucun gouvernement de sa Majesté de fixer un périmètre de 0,621371 mile, équivalent britannique du kilomètre. Et d’ailleurs, au pays du Habeas corpus, une telle restriction à la liberté est difficilement envisageable.

L’Irlande voisine par contre, est, sauf erreur, le seul état à avoir mis en pratique une mesure similaire à celle prévalant en France, sauf que les limites de la prison y sont étendues à cinq kilomètres, ce qui offre déjà plus de latitude (tout en faisant voler en éclat la limite horaire), notamment aux cyclistes (j’avais croisé au printemps dernier un cycliste – de ceux qui font du vélo et non de la bicyclette, comme distinguait Michel Audiard –  qui faisait, tel un hamster dans sa cage, vingt fois le tour de mon village pour avoir son compte…).

En Belgique, pourtant durement touchée, le premier ministre Alexander De Croo affirmait récemment qu’il ne voyait pas « pourquoi quelqu’un ne pourrait pas aller se balader dans un bois à 50 kilomètres de chez lui ».

Cette impossibilité toute hexagonale de se rendre en forêt, où seuls une biche, un renard ou un sanglier inopinément sortis de derrière un bosquet seraient susceptibles d’être contaminants ou contaminés, créatures en outre connues pour respecter plus qu’il ne faut la distanciation physique et peu enclines à se livrer spontanément aux embrassades, est totalement incompréhensible, voire stupide sur le plan sanitaire.

Certes, il est moins aisé d’épier les promeneurs dans les bois, et gare au drone qui s’y aventurerait : branchages et taillis auraient tôt fait d’en abîmer une hélice !

Les riverains du Rhin que nous sommes se souviennent qu’en Allemagne et en Suisse, on incitait au contraire au printemps dernier la population à aller s’aérer dans la nature, y compris en montagne, quitte à faire attention en se croisant sur les sentiers trop étroits, pendant que nous autres, sur la rive gauche, étions contraints de faire sine die le deuil de nos randonnées dans les Vosges ou en Forêt-Noire.

Cette totale liberté de déplacement est toujours d’actualité en Allemagne, avec la seule réserve que le groupe de randonnée se limite aux membres de deux familles maximums.

Encore qu’avec la possibilité de me rendre dans les champs et les prés, je suis en quelque sorte un « privilégié ». Il est fort probable qu’en zone urbaine le même périmètre exigu ne permette pas toujours d’atteindre un quelconque espace vert (sauf au Rebberg, bien entendu), si tant est que l’accès en reste autorisé (pour mémoire, il ne le fut pas pendant la première vague).

L’inégalité de traitement s’exerce, ici comme en d’autres domaines, une fois de plus au détriment, ou au bénéfice, des mêmes.

Pourquoi cette « exception sanitaire française » ? Quelle justification peut-on lui trouver ?

Peut-être bien, tout simplement, que la non-reconduction de la mesure à l’occasion de cette deuxième incarcération de masse aurait souligné son inanité lors de la première.

Il est frappant de constater qu’en faisant une recherche « google » sur la mesure en question, on trouve essentiellement des réponses portant sur « comment calculer le périmètre » et quasiment aucune interrogeant le « pourquoi » de la chose.

Il est surprenant qu’elle ne fasse pas plus que ça l’objet d’une contestation, comme si la population, pourtant critique sur d’autres aspects liés au reconfinement se pliait à celle-ci, y consentait sans contestation. La servitude volontaire n’est plus très loin.

On pourrait aussi lire cet élément singulier du dispositif sanitaire français comme relevant d’un test d’obéissance à grande échelle, préludant à une surveillance généralisée de la population, surtout quand on le met en rapport avec l’instauration à marche forcée de la 5G qui, selon certains avis, n’a d’autre raison d’être que d’amplifier le flux nécessaire à la captation accrue de données personnelles.

On ne sait pas s’il faut redouter davantage Big Brother qui avance à pas de géant ou l’étrange docilité de nos concitoyens. Sans doute les deux.

Difficile de ne pas penser ici à la citation qui fait florès depuis quelque temps, attribuée, à tort ou à raison, mais peu importe, à Aldous Huxley :

« La dictature parfaite aurait les apparences de la démocratie. Une prison sans mur dont les prisonniers ne songeraient pas à s’évader. Un système d’esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l’amour de leur servitude. »

PS : au moment où j’écris ces lignes, vient d’arriver une pétition change.org, demandant l’extension à cinq kilomètres, en citant précisément l’exemple de l’Irlande. Revendication non de l’abrogation, mais de l’allègement de la mesure : négocierait-on le poids des chaînes ?

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