Pour rap­pel, lors du pre­mier confi­ne­ment, le ministre de l’In­té­rieur Cas­ta­ner et toute l’ad­mi­nis­tra­tion poli­cière s’é­taient féli­ci­tés d’a­voir réa­li­sé plus de 21 mil­lions de contrôles, et dres­sé 1,1 mil­lion de contraventions. 

Une autre ano­ma­lie si typi­que­ment repré­sen­ta­tive de l’exé­cu­tif auto­ri­taire fran­çais, où l’on se féli­cite ouver­te­ment et offi­ciel­le­ment d’a­voir mul­ti­plié les sanc­tions à l’en­contre de sa popu­la­tion, irres­pon­sable par nature, tout en étant vic­time d’une situa­tion sani­taire qu’elle subit de plein fouet depuis près d’une année. 

Ain­si, c’est au mini­mum 150 mil­lions d’euros de recettes qui ont été récol­tées par l’État par le tru­che­ment de ces contra­ven­tions. De quoi finan­cer immé­dia­te­ment la réou­ver­ture de quelques mil­liers de lits de réani­ma­tion, non ? 

Et les deux tiers d’entre elles étaient liées à un défaut d’attestation de dépla­ce­ment. Un chef d’oeuvre règle­men­taire authen­ti­que­ment Made in France .

A ceci près que… le bar­num ne ser­vait à rien ! Le 22 décembre 2020, un Arrêt du Conseil d’État affir­mait en effet que le for­mu­laire d’attes­ta­tion de dépla­ce­ment déro­ga­toire, impri­mé et rem­pli des mil­lions de fois par les Fran­çais lors des deux périodes de confi­ne­ment, n’a­vait aucun carac­tère obli­ga­toire, et pas plus de valeur qu’un autre jus­ti­fi­ca­tif légi­ti­mant le dépla­ce­ment !

Par consé­quent, n’importe quel docu­ment jus­ti­fiant de la néces­si­té du dépla­ce­ment suffisait. 

Ce fai­sant, il risque d’y avoir quelques bous­cu­lades, assez peu res­pec­tueuses des pro­to­coles sani­taires en vigueur, du côté du Minis­tère de la Jus­tice, où les nom­breux plai­gnants ali­gnés à rai­son de ce seul motif gro­tesque, vien­draient sol­li­ci­ter une révi­sion de leur situa­tion personnelle. 

Résu­mé de l’Arrêt du Conseil d’État ren­du le 22 décembre 2020 :

« L’o­bli­ga­tion, pré­vue par l’ar­ticle 3 du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020, pour les per­sonnes sou­hai­tant béné­fi­cier des excep­tions à l’in­ter­dic­tion de sor­tir, de se munir d’un docu­ment leur per­met­tant de jus­ti­fier que leur dépla­ce­ment entrait bien dans le champ de ces excep­tions ne pré­voit aucun for­ma­lisme par­ti­cu­lier, de sorte que tout docu­ment appor­tant des jus­ti­fi­ca­tions équi­va­lentes peut être pro­duit à cette fin…. L’o­bli­ga­tion de se munir d’un tel docu­ment, qui est dépour­vue d’am­bigüi­té et contri­bue à garan­tir le res­pect des mesures de confi­ne­ment, ne conduit donc pas à mécon­naître les prin­cipes de léga­li­té des délits et des peines et de néces­si­té des peines ».

De ce fait, ami-es lec­trices et lec­teurs, vous dis­po­se­rez désor­mais de quelques muni­tions juri­diques afin de mul­ti­plier les échanges byzan­tins auprès de la gente poli­cière, ten­tée de venir vous cher­cher des noises sur le sujet, pen­dant le couvre-feux, et dans les pro­chains jours en jour­née. Car même une crise sani­taire ne sau­raient démen­tir notre pro­pen­sion natio­nale à l’en­flure bureau­cra­tique exponentielle. 

Et puisque nos res­pec­tables confrères ont repris de concert depuis une quin­zaine de jours leur psal­mo­die claus­trale « mais-kes­kiz-attendent-pour-nous-confi­ner-le-couvre-feu-ça-marche-pas », alors que le catas­trophe covi­dique qui devait naitre en résul­tat des fêtes de fin d’an­née ne s’est pas pro­duite, et que les courbes per­sistent à ne pas s’en­vo­ler en France, nul doute qu’a­vec le défer­le­ment des variants anglais, japo­nais, afri­cains ou bre­tons, cela fera les affaires des « pani­quistes » (les adver­saires des odieux « ras­su­ristes »), les­quels chu­chotent tou­jours plus à l’oreille du gouvernement. 

De quoi assor­tir vos futurs bal­lades déro­ga­toires d’une heure sur un kilo­mètre de rayon de quelques ludiques exer­cices de vexil­lo­lo­gie, en agré­men­tant vos attes­ta­tions per­son­na­li­sées des dra­peaux d’o­ri­gine de toutes les souches virales variantes déjà appa­rues, ou encore à apparaitre. 

Et s’il vous fal­lait psal­mo­dier quelque esprit, n’o­met­tez pas de pro­duire une courte fla­tu­lence, puis répé­tez la phrase d’un divin bouf­fon, telle celle indi­quée ci-dessous : 

« S’il est vrai que l’hu­mour est la poli­tesse du déses­poir, s’il est vrai que le rire, sacri­lège blas­phé­ma­toire que les bigots de toutes les cha­pelles taxent de vul­ga­ri­té et de mau­vais goût, s’il est vrai que ce rire-là peut par­fois désa­cra­li­ser la bêtise, exor­ci­ser les cha­grins véri­tables et fus­ti­ger les angoisses mor­telles, alors, oui, on peut rire de tout, on doit rire de tout. De la guerre, de la misère et de la mort ».

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