Jusqu’au 15 février, les habitants de la région Alsace ont l’occasion DE s’exprimer sur la sortie ou non du Grand Est. La Communauté européenne d’Alsace leur donne cette occasion en votant soit sur internet, soit dans des lieux dédiés. Pas toujours faciles à trouver !
Une grande partie de la population française aimerait bien pouvoir s’exprimer sur ce qu’ils pensent de la réforme territoriale qui a engendré des structures appelées « Grandes régions » qui ont été décrétées arbitrairement sous la présidence Hollande sans que la population ne puisse dire son mot.
Quelques-unes des anciennes régions ont été épargnées : ne cherchez pas de cohérence, il n’y en a aucune. Que du rapport de force et/ou du copinage politique. Nous étions, une fois encore, en 2015, devant le fait du Prince.
UNE RÉFORME EFFICACE ?
Selon Philippe Subra, professeur à l’Institut français de géopolitique à l’Université Paris 8, le gouvernement affirmait en 2014, que « le redécoupage permettrait d’économiser « une dizaine de milliards d’euros par an, d’ici 5 à 10 ans ».
Un chiffre considérable puisqu’il représente environ la moitié du budget de fonctionnement de l’ensemble des régions.
Philippe Subra fait un constat : « De fait, selon la Cour des comptes, les dépenses de fonctionnement des régions françaises, loin de baisser, ont connu une croissance de près de deux milliards d’euros entre 2015 et 2018. Celles des régions fusionnées augmentant trois fois plus vite que celles des régions inchangées. (…) Les gains en termes d’efficacité semblent avoir été jusqu’ici très limités », conclut le chercheur.
Dans son étude, il constate froidement que ni la taille ni le découpage ne sont des facteurs de réussite d’une structure administrative.
UNE RÉFORME POPULAIRE ?
Le journal Le Pèlerin avait fait une grande enquête, en vue des élections régionales sur l’acceptation de ces nouvelles structures. On peut y lire que : « La création de ces mégarégions a donné le sentiment que cet échelon politique déjà un peu abstrait s’éloignait encore davantage de leur quotidien (des citoyens). Quand il n’a pas carrément suscité un rejet, comme chez les Alsaciens, furieux d’être dilués dans un Grand Est… sans grande identité. Et que dire des territoires les plus excentrés, désormais très éloignés des nouvelles capitales régionales ? Il faut aujourd’hui 3 h 30 de route pour rallier Strasbourg depuis Troyes, quand 1 heure suffisait pour rejoindre Châlons-en-Champagne ; autant pour aller d’Aurillac à Lyon, alors que Clermont-Ferrand n’était qu’à 2 heures de la préfecture du Cantal… »
TF1, elle aussi, a fait son enquête qui rappelle l’attachement des Français à leur Région (non pas la GRANDE région) et constate que « Le découpage territorial n’est cependant toujours pas intégré » !
En rajoutant que « cet attachement aux régions est donc bien lié au cadre de vie qu’elles offrent, au-delà de préoccupations administratives. En effet, selon l’étude, les Français sont nostalgiques de l’ancien découpage territorial et peu d’entre eux ont retenu qu’il y avait désormais 13 régions, au lieu de 22 précédemment. 37% des sondés pensent que cette réforme n’a servi à rien, quand 37% d’autres assurent que cela a affaibli l’identité des régions. »
Faisons un bilan : inefficace dans ses objectifs, rejetés par la population, éloignement des centres de décisions des citoyens… N’en jetez plus !
Que faut-il de plus pour constater qu’il faudrait d’urgence mettre en place une vraie décentralisation et une vraie régionalisation.
Les âneries sans nom… La gauche la « plus bête du monde » ?
On peut s’interroger pourquoi, avec un tel bilan, il reste des défenseurs de ces mégarégions impersonnelles et malaimées. Pourquoi le PS, les écologistes, les communistes, l’extrême droite, les syndicats dénoncent une « opération politique » dans la consultation des habitants de la CEA. Car elle est à l’initiative de Frédéric Bierry ? En voilà un argument qui est le bon ! II ne tenait qu’à eux d’en lancer une ! Ou de soutenir Unser Land dans sa quête incessante d’une expression populaire sur une réforme dans laquelle les citoyens n’ont pas été consultés une seule fois ! Ou bien d’écouter et de relayer les analyses et les arguments maintes fois développés par l’Initiative citoyenne alsacienne (ICA) présidée par Pierre Klein qui n’a cessé d’organiser, en Alsace, des réunions publiques pour faire entendre la raison !
Mais quand on ramène le « désir d’Alsace » à un prétendu égoïsme des Alsaciens, désireux de ne pas partager la richesse avec d’autres régions, on ne peut que se lamenter sur la capacité d’écoute de certains élus locaux.
Alors que la « gauche » se drape systématiquement de ses vertus démocratiques, elle considère que les Alsaciens ne devraient pas participer à une consultation qui est effectivement un acte politique, mais qui ne peut être confisqué par qui que ce soit…
Un « Oui » à la sortie ouvrira une nouvelle séquence politique
Même si la consultation n’a pas de dimension contraignante, le Président et l’exécutif de la Grande Région ne pourront pas l’ignorer. Si un grand nombre d’habitants d’Alsace s’exprime pour la sortie du Grand Est (ce que certains sondages actaient déjà), il faudra en tenir compte, d’autant plus que cela deviendra un thème pour les prochaines élections législatives !
Les forces politiques qui ont défendu l’idée de la sortie du Grand Est ne pourront se contenter d’applaudir… et éventuellement laisser les « autres » enterrer le projet durant la prochaine législature. Celles qui ont rejeté l’idée d’une sortie du Grand Est se verront désavoués par les citoyens et devront bien tenir compte de l’expression populaire lors des prochaines échéances.
Et les citoyennes et citoyens qui se sont exprimés pour cette sortie, ne pourront se contenter d’avoir exprimé un vœu : il faudra agir concrètement pour le retour à une Région Alsace.
Que pourra être sa politique régionale ? Quelle place prendra l’économie et la social, pourra-t-on développer le droit local dans toutes ses dimensions et le perfectionner alors que la République veut le maintenir « en état », la politique culturelle et linguistique prendra-t-elle un nouvel essor tenant compte de l’histoire originale de ce territoire à racine germanique, mais capable de partager son destin avec le monde latin, acceptera-t-on enfin que le Rhin ne soit plus considéré comme une frontière, mais un pont entre deux territoires qui peuvent s’enrichir de ces différences ?
Voilà des espoirs qu’une consultation peut ouvrir, mais pas combler. Pour cela il faudra déterminer les axes politiques (en associant les citoyens) qui répondent aux aspirations de tous les habitants alsaciens, quelle que soit leur origine.
L’Alsace doit-elle sortir du Grand-Est pour redevenir une Région à part entière ? – Lien vers la consultation citoyenne.
Avec (enfin) la séparation de l’Eglise et de l’Etat?