Plus de 5700 lits d’hospitalisations complète ont été fermés dans l’Hexagone en 2020, selon une étude du ministère de la Santé qui vient de paraître (-27 000 lits en 7 ans). C’est la poursuite dogmatique du « virage ambulatoire », contre vents et pandémies…
Entre fin 2019 et fin 2020, le nombre de lits diminue de 1,5 %. Ce repli poursuit une tendance observée depuis plusieurs années, qui reflète la volonté de réorganiser l’offre dans un contexte de virage ambulatoire, mais aussi de contraintes de personnel ne permettant pas de maintenir les lits.
Depuis 2013, ce sont en effet 27 000 lits d’hospitalisation complète qui ont ainsi été fermés, soit une baisse de 6,5 % en sept ans.
La crise sanitaire aura même en partie amplifié le phénomène. Symbole de cette désagrégation, la France compte désormais moins de 3.000 hôpitaux et cliniques. « Sous l’effet des réorganisations et des restructurations », 25 établissements publics et privés ont encore fermé l’an dernier, selon la Drees (la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques), qui dépend des ministères dits « sanitaires et sociaux » (affaires sociales, santé, retraite, travail, famille, logement) et du ministère de l’Économie et des Finances.
Bilan à Mulhouse
Les effets de lente agonie du service public de la santé et de la politique de fermeture de lits, se font ressentir encore plus particulièrement au GHRMSA de Mulhouse, dans lequel le plan blanc a été déclenché, et ou 10% des personnels, soit 500 agents au moins, auraient été suspendus.
Avant même l’explosion de l’épidémie de covid en Alsace en mars 2020, en raison de laquelle Mulhouse et son hôpital ont été placés en première ligne, les agents du service des urgences se trouvait en grève depuis plusieurs mois déjà. Réclamant notamment de nouveaux moyens matériels et humains, dans une quasi indifférence des pouvoirs publics.
Les statistiques de la SEA (Statistique annuelle des établissements de santé) au sein de la DREES, sont à ce titre éloquentes, à tout le moins pour ce qui concerne le secteur de l’obstétrique, dans le sillage de la fermeture des maternités de Thann et d’Altkirch :
Hospitalisations complètes dans le secteur public mulhousien, en nombre de lits, du 31/12/2019 au 31/12/2020
Médecine obstétrique | 2019 | 2020 | Evolution en lits |
Médecine | 507 | 468 | - 39 |
Chirurgie | 158 | 178 | 20 |
Gynécologie obstétrique | 70 | 70 | 0 |
TOTAL | 735 | 716 | - 19 |
A l’exception notable de l’augmentation des lits de chirurgie, peut-être corrélée à l’ouverture de l’hôpital mère-enfant sur le site mulhousien, et aux transferts des lits de Thann et d’Altkirch, la médecine obstétrique cède toutefois 40 lits en seulement une année, sur le périmètre du GHRMSA.
En revanche, la médecine ambulatoire gagne du terrain, comme cela se vérifie au niveau national. Passant de 96 lits en 2019 à 127 lits en 2020, dans l’ensemble des établissements du ressort mulhousien.
Soins de suite et de réadaptation (SSR)
Les soins de suite et de réadaptation ont également subi les fermetures de lits en hospitalisation complète. Ils passent ainsi de 144 à 126 lits au total. Le tout au profit, là encore, de l’hospitalisation partielle ou ambulatoire, qui gagne 12 lits, de 35 à 47, à l’instar du niveau national.
Une vacance de postes significative au GHRMSA
Outre la fermeture de lits, c’est l’autre indicateur majeur de la situation de désarroi rencontrée par le personnel soignant (et non-soignant) du groupement hospitalier de Mulhouse : le rapport des effectifs par spécialités, évoluant sur 12 mois, entre 2019 et 2020.
Il est sans aucun doute le plus à même de traduire les immenses difficultés humaines et fonctionnelles auxquelles le groupe public fait face ces dernières années.
En voici une ventilation sous la forme de tableau pour la période du 31 décembre 2019 au 31 décembre 2020 :
Spécialité exercée | 2019 | 2020 | Evolution en nombre de poste |
Spécialités médicales | 320 | 304 | -16 |
-dont médecins généralistes | 61 | 33 | -28 |
-dont médecins urgentistes | 33 | 23 | -10 |
Spécialités chirurgicales | 78 | 74 | -4 |
-dont gynécologues-obstétriciens | 26 | 26 | 0 |
Psychiatres | 26 | 19 | -7 |
Odontologistes | 7 | 5 | -2 |
Pharmaciens | 26 | 23 | -3 |
Autres | 13 | 19 | 6 |
Total (hors internes) | 470 | 444 | -26 |
Internes | 167 | 216 | 51 |
Sinon l’apport précieux d’internes (+ 51 postes entre 2019 et 2020), sans le renfort desquels on peut légitimement penser que les structures de soin ne fonctionneraient que très difficilement, le GHRMSA aura donc perdu 54 postes de médecins entre 2019 et 2020, auxquels s’ajoutent 4 postes de chirurgiens.
Les spécialités péri-médicales ne compensent d’ailleurs pas : 12 postes sont manquants chez les psychiatres, odontologistes, et pharmaciens, toujours entre 2019 et 2020.
En revanche, le personnel non médical (infirmiers, aides soignants, psychologues, rééducateurs…) administratif et technique, a quant à lui fait un bond, passant de 3855 à 4180 agents, soit 325 postes supplémentaires, au 31 décembre 2020.
Sources : SAE/DREES 2019–2020