Qui ne serait d’accord avec cet objectif présenté dans l’article de l’Alsace du jeudi 9 juin ?
Via une souscription publique « Forêts » le Conservatoire d’Espaces Naturels (CEN) Alsace invite les Alsaciens à l’aider à protéger les forêts anciennes réservoirs de biodiversité.
30 hectares de massif remarquables ont ainsi été récemment acquis par le CEN au Baerenloch, dans la vallée de la Doller.
Il faut hélas rappeler que dans cette même vallée de la Doller les conditions générales d’exploitation industrielle du bois ne relèvent guère du principe de protection de la biodiversité, forêts anciennes ou non !
L’exemple « édifiant » du massif du Sprickelsberg (près de 300 hectares à proximité immédiate du Baerenloch), désormais sillonné par des routes et voies de dessertes forestières pour faciliter une exploitation intensive, le rappelle.
Ce sont 10 hectares de forêt qui ont été dévastés pour la seule construction de pistes, aires de stockage et de retournement pour les engins de terrassement, de coupe, de transports des grumes.
Les largeurs totales (emprises) des voies de circulation peuvent dépasser 10 mètres et plus de 10 réseaux de circulations de ce type sont déjà réalisés pour la seule vallée de la Doller, impactant directement des dizaines et des dizaines d’hectares.
D’autres réseaux de ce type de dessertes forestières sont prévus (Sickert notamment)…sans compter les coupes rases d’un seul tenant sur plusieurs hectares (Rimbach en particulier) qui défigurent les paysages, oublient volontiers les limites légales de superficies autorisées pour ces coupes (Kirchberg), se soucient bien peu de « biodiversité » et de protection d’espèces animales !
Pour le Sprickelsberg une étude d’impact préalable aux travaux nécessaires avait été exigée par les services préfectoraux après avis des instances habilitées de protection de l’environnement dans le cadre d’une procédure trop souvent inutilisée.
En date du 24 mars 2022 le Tribunal administratif de Strasbourg vient d’annuler l’arrêté préfectoral autorisant l’Association syndicale autorisée des propriétaires de parcelles (ASA du Sprickelsberg, dotée de prérogatives de puissance publique pour faciliter les travaux et l’exploitation des bois) à réaliser ces dessertes forestières.
Le seul motif de non respect de l’obligation préalable aux travaux d’une demande de dérogation compte tenu du nombre d’espèces animales protégées menacées (cycles de reproduction, habitat, environnement de dizaines d’espèces animales diverses) est retenu par le juge.
Le Collectif citoyen du Sprickelsberg avait initié cette action devant la justice administrative
Mais la desserte forestière du Sprickelsberg est déjà terminée et l’exploitation des bois est en en cours depuis plus de deux ans !
Les enjeux économiques ne permettaient sans doute pas d’attendre l’issue de la procédure ?
Il est vrai que les intérêts des grandes scieries industrielles (la SIAT dans ce cas précis) pèsent lourd dans ces dossiers, et l’engorgement des tribunaux arrange bien leurs intérêts, la question environnementale n’étant pas exactement leur préoccupation.
L’ASA (association syndicale autorisée) du Sprickelsberg vient de faire appel du jugement du tribunal de Strasbourg devant la Cour administrative d’Appel de Nancy.
Elle conteste le principe même de l’obligation d’une demande préalable de dérogation préalable aux travaux de la desserte forestière.
Durant les quelques années que pourrait durer cette nouvelle procédure et en l’attente d’une nouvelle décision de justice, l’exploitation du Sprickelsberg sera poursuivie, en toute illégalité, puisque l’arrêté préfectoral autorisant la construction des voies de desserte nécessaires a été annulé par la juridiction administrative de Strasbourg.
S’il ne s’agit pas de s’opposer par principe à l’exploitation industrielle des forêts, il s’agit par contre de contester la toute puissance de structures d’exploitation forestières qui ne veulent pas prendre en compte les considérations environnementales, au détriment dans ce cas précis de la biodiversité…quitte à oublier un peu les règles de la légalité.
Il s’agit aussi de rappeler aux élus de la vallée que leur silence assourdissant sur ces questions pose question.
L’industrialisation de l’exploitation forestière peut dévaster des paysages, menacer sérieusement des espèces animales, oublier tous les autres usagers de la forêt que nous sommes, générer des nuisances indirectes importantes (en particulier celles dues aux transports des grumes par semi – remorques de 46 tonnes sur la seule route du fond de vallée de la Doller, dans les villages).
Les risques induits par le ruissellement des eaux facilité par des déboisements massifs et rapides rendus possibles par ces voies forestières ne sont pas exclus. Le régime des crues de la Doller pourrait en être affecté un jour…
Nous appelons à nous rejoindre tous ceux à qui la forêt « parle », pour reprendre l’excellente expression du directeur du CEN cité par l’auteur de l’article de l’Alsace.
Pour le Collectif citoyen du Sprickelsberg : C.Rubechi
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