Les « éditorialistes toutologues » de nos chaînes de télévision et de radio, actifs également dans la presse écrite, en étaient babas dimanche soir. Malgré leur soutien indéfectible depuis des mois et des mois, les partis godillots du Président n’ont pas eu la majorité absolue à l’Assemblée nationale.
Et de s’extasier sur le fait que l’extrême-droite (que les sondeurs n’ont pas vu venir ?) devient le premier groupe d’opposition, et que Jean-Luc Mélenchon n’a pu se faire “élire” Premier Ministre.
Certes, que le groupe majoritaire LREM, élu en 2017, a subi une défaite est incontestable. Tout comme le score de M. Macron aux Présidentielles indiquaient, au premier tour, que 80% des citoyens n’ont pas voté pour lui. Oui, le système Macron a du plomb dans l’aile… On pleure évidemment sur ces gentils marcheurs qui retournent là d’où ils n’auraient jamais dû sortir. Quelques arrogants et donneurs de leçons de moins ne fera pas de mal… Il en reste encore assez.
Mais est-ce que cela signifie que M. Macron ne pourra pas appliquer sa politique qu’il a esquissé dans son programme ? Bien au contraire, il aura une majorité encore plus importante, car l’Assemblée nationale s’est nettement droitisée après cette élection, à l’image de notre pays…
L’ultra-libéralisme ultra-majoritaire au Parlement
Quand on additionne le nombre de siège de ceux qui se réclament défenseur de l’économie de marché, bref du système capitaliste, on arrive à… 395 sièges au moins. Auxquels je n’ajoute pas les socialistes chancelants et les Verts déjà trop mûrs virant orange…
Il est évident que M. Macron trouvera une large majorité pour la réforme des retraites, et de quoi imposer un départ à 65 ans et tout le reste… Idem sur le pouvoir d’achat dont le projet n’est pas d’augmenter les salaires mais sa philosophie est plutôt la réduction des charges… ce qui mettra tout le système social en difficulté puisqu’il manquera de ressources.
Il saura trouver une majorité pour supprimer la redevance TV qui va conduire le service public radio-télévisée à ne plus avoir les moyens d’assumer ses tâches et il faudra, tôt ou tard, le réduire… Les amis Bolloré et Arnaud du Président, par ailleurs grands proprios de divers médias, se frottent déjà les mains…
Oui, cela sera sûrement moins aisé. Non pas pour des raisons d’oppositions à ces mesures, mais parce qu’il faudra y mettre le prix pour obtenir les voix : les Républicains souhaiteront aggraver encore les textes et monnaieront de diverses manières leur ralliement… Même le RN sera une opposition de façade, actant un jeu de rôle, pour donner l’illusion d’un affrontement sanglant au sein de la droite.
Je prends le pari que la prochaine loi macroniste pour élargir la « légitime défense » de la police lors d’un regard oblique d’un passant, sera soutenue massivement par le RN… Ou vice-versa !
Non, ne vous inquiétez pas, Macron trouvera sa majorité pour tous les mauvais coups en préparation.
La droite et toutes ses déclinaisons
Au mois les cinq années passées ont permis à tous de constater que le Macronisme est bien une forme de la droite politique… qui a le don de se travestir pour tromper le chaland…
L’histoire même de la droite est éclairante à ce sujet : qu’elle se nomme « droite », « libérale », « conservatrice », « progressiste », « boulangiste », « poujadiste », « lepéniste », ce sont là des variantes d’une seule et même idéologie qui se décline sur plusieurs registres mais avec un seul et même but : empêcher une transformation profonde de la société et de son économie.
La cible de toutes ces droites, a toujours été les citoyens et leurs organisations qui s’engagent ouvertement pour une autre économie qui ne soit pas au seul service du capital.
L’autoritarisme devient la norme
La campagne législative a été puante à bien des égards. Cette volonté du monde politico-médiatique proche du pouvoir de traiter le RN et la NUPES de la même façon, en les renvoyant dos à dos, et en constituant de toute pièce un bloc “extrêmes-gauche », est une véritable forfaiture qui permet de faire l’économie d’un débat.
Chose inouïe : la Macronie décide de celui qui revêt la qualité de « républicain » et celui qui n’en est pas. Mme Borne était donc prête à voter pour M. Roussel du PCF, lequel serait « républicain » (il est vrai qu’il était présent à la manifestation du syndicat policier d’extrême-droite Alliance) mais pas M. Mélenchon (LFI), qui a osé rappeler que la police tue…
Nous sommes là dans une grave dérive de notre société : depuis de nombreux mois, toute contestation de la parole officielle est déconsidérée et assimilée à des infox ou fausses nouvelles. Leurs auteurs, aussi compétents et talentueux qu’ils soient, sont classés dans le registre des complotistes… Là encore, le procédé est éculé et facile : on disqualifie et cela évite le débat sur des questions qui exigent discussions et confrontations d’idées.
Cette manière de qualifier d’”extrême” le positionnement politique de la NUPES durant la campagne, n’était évidemment pas innocente. En quoi ses positions était-elle “extrême” ? Avec un programme bien plus tendre que celui de François Mitterrand en 1981 ? En en se bornant à des mesures sociales généreuses, sans pour autant toucher aux prérogatives fondamentales des forces du capital ?
Non, le Prince a édicté que la NUPES était un danger car elle pouvait mettre en cause l’économie de marché ! Que cela soit vrai ou non importe peu. Du moment que tous les médias à la botte reprennent les éléments de langages des cabines de conseil Mc Kinsley et consorts qui conseillent le président, tout va pour le mieux.
Une gauche qui doit se trouver
La France ne penche pas à gauche. Malgré de bons résultats en de maints endroits et parmi les générations d’avenir (les vieux croulants aisés ont voté pour M. Macron), le rapport de force qui sort de ces élections permettra au mieux aux députés de la NUPES de mener une bataille de tranchée à l’Assemblée : elle peut être plus audible que précédemment avec 166 députés se réclamant de la gauche.
Mais quelle gauche ? Déjà les premiers craquements (prévisibles) se font entendre : il n’est donc pas exclu que M. Macron pourra même trouver dans ces 166 quelques appuis le moment venu, tout est une question de prix qu’il est prêt à mettre…
Le refus de la constitution d’un seul groupe par les composantes PS/PC/EELV de la NUPES, va évidemment affaiblir cette union de la gauche réclamée à cors et à cris par les citoyens qui attendent une alternative aux libéralisme des droites réunies. Si la présidence de la Commission des finances va au RN (comme déjà certains ministres le proposent), c’est à dire au parti de Mme Le Pen, la droite tiendra à nouveau tous les postes…
On ne sait pas encore comment les groupes de gauche vont s’organiser en intergroupe, mais ils semblent déjà vouloir le faire dans une ambiance hostile ou paranoïde, peu propice à changer en profondeur le cours des choses. Et gare à la désillusion qui suivrait un éventuel échec de cette nouvelle union de la gauche ! Ceux qui en seront tenus responsables le paieront le prix fort…
Il restera donc à ce « peuple » de gauche qui ne veut pas de régression sociale, qui voudrait bien que cesse cette politique qui crée des pauvres par millions et des ultra-riches par dizaines… à s’engager dans une mobilisation sociale pour être la véritable opposition à la droite ultra-majoritaire à l’Assemblée nationale. Un doux rêve ?