Maltraitance, déviance et dépersonnalisation instituées

La loi « plein emploi », adop­tée en pre­mière lec­ture à l’Assemblée natio­nale en octobre 2023, assure notam­ment la trans­for­ma­tion de « Pôle Emploi » en « France Tra­vail ». La loi regroupe par ailleurs les acteurs de l’insertion et de l’emploi (dont les mis­sions locales) afin de pro­po­ser un gui­chet unique aux deman­deurs d’emploi.

L’ex gou­ver­ne­ment Attal avait réso­lu d’atteindre le plein emploi d’ici 2027, avec un taux de chô­mage rame­né à 5%. Un objec­tif d’ores et déjà chi­mé­rique, compte tenu le train de plans sociaux « his­to­riques » à venir, char­riant une menace directe sur quelques 300 000 emplois selon les syndicats… 

Mais les sombres pers­pec­tives sociales pèsent tout autant sur les agents char­gés du pla­ce­ment et du contrôle (une mis­sion appe­lée à se ren­for­cer) des chô­meurs en général.

La tran­si­tion entre l’en­ti­té « Pôle-emploi » vers « France tra­vail » s’ac­com­pagne en effet de mul­tiples dégra­da­tions des condi­tions de tra­vail chez les agents. A com­men­cer par une pres­sion crois­sante liée à l’in­for­ma­ti­sa­tion et aux objec­tifs chif­frés. Une obses­sion pour l’en­ca­dre­ment de l’ins­ti­tu­tion qui se tra­duit par un mal-être gran­dis­sant du per­son­nel, dont on apprend que près de 25% des effec­tifs est soit en CDD soit en contrat aidé !

Une bonne manière de sen­si­bi­li­ser le per­son­nel à la condi­tion des chô­meurs et pré­caires, dont ils sont eux-mêmes issus… Le fait n’est d’ailleurs pas étran­ger à l’empathie dont fait preuve nombre d’a­gents, en limi­tant le « for­çage » des deman­deurs d’emploi, en matière de for­ma­tions dou­teuses des­ti­nées à « caser » cha­cun d’eux sur un dis­po­si­tif sup­po­sé­ment adap­té, de sorte à pro­cé­der à son « acti­va­tion ». Un terme de mar­ke­ting bureau­cra­tique aus­si aber­rant que mépri­sable, au regard des par­cours psy­cho­lo­giques fra­gi­li­sés des per­sonnes accueillies.

C’est pré­ci­sé­ment ce qui est récem­ment sur­ve­nu à l’un de nos membres, alors qu’il était convo­qué pour un entre­tien des­ti­né à le « remo­bi­li­ser », dans l’une des agences mul­hou­siennes de « France travail ». 

Mais les agents se plaignent tout autant de la stan­dar­di­sa­tion de l’ac­com­pa­gne­ment, et manquent de temps pour assu­rer un sui­vi véri­ta­ble­ment per­son­na­li­sé, en rai­son d’ob­jec­tifs chif­frés aus­si miri­fiques qu’in­sou­te­nables. Une poli­tique du chiffre qui génère un sen­ti­ment de « pres­sion pro­duc­ti­viste » chez les agents, notam­ment ceux char­gés du contrôle des deman­deurs d’emploi.

Sans comp­ter le manque de recon­nais­sance sala­riale dont ils sont tout par­ti­cu­liè­re­ment l’ob­jet. Car en dépit de condi­tions d’exer­cice ten­dues, cer­tains éche­lons de la grille sala­riale démarrent même sous le SMIC ! 

Préjugés tenaces contre l’allocation chômage en France : un debunkage en règle

La France est un para­dis pour les chô­meurs ! Les mou­lins à paroles ineptes qui peuplent les pla­teaux des chaînes d’in­for­ma­tion vous le répètent par rou­le­ment de canon­nades déma­go­giques. En réponse, Hélène Crou­zillat, docu­men­ta­riste, en a récem­ment conçu un film inti­tu­lé « L’ef­fet Baha­mas – en quête sur une caisse de chô­mage » (nous y revien­drons dans un pro­chain article) :

Baptiste Françon, Maître de conférences en économie à l’Université de Lorraine et Jean-Marie Pillon, Maître de conférences en Sociologie, à l’Université Paris Dauphine – PSL se livrent à une analyse comparative approfondie des systèmes d’indemnisation du chômage en Europe (parue initialement dans The conversation), afin de documenter les faits, et neutraliser au mieux les préjugés tenaces sur le sujet. 

À chaque annonce de pro­jet de réforme de l’assurance-chômage (et elles sont fré­quentes), une même ques­tion revient dans le débat public : le sys­tème fran­çais serait-il trop géné­reux, « par­mi les plus géné­reux d’Europe » selon les mots de l’ancien ministre des Finances Bru­no Le Maire  ? Simple dans sa for­mu­la­tion, cet exer­cice de com­pa­rai­son est en fait ren­du dif­fi­cile par la varié­té des cri­tères uti­li­sés dans chaque pays pour déter­mi­ner le ver­se­ment (ou non) d’une allo­ca­tion chô­mage, son mon­tant, le com­plé­ment ou la sub­sti­tu­tion par d’autres aides ou allo­ca­tions d’assistance (le RSA en France par exemple…) mais aus­si par l’évolution par­fois rapide de ces critères.

Sur­tout, les termes mêmes de ce débat appa­raissent faus­sés. N’est-il pas trom­peur de par­ler de géné­ro­si­té alors que les chô­meurs indem­ni­sés par l’Unedic (caté­go­rie A) per­ce­vaient 1093€ net par mois en moyenne en 2022, tout juste 52 % du salaire médian ? Est-il per­ti­nent de mettre l’accent sur les aides ver­sées alors que seuls 46 % de l’ensemble des ins­crits à France Tra­vail sont effec­ti­ve­ment indem­ni­sés ? Est-il urgent de recher­cher des éco­no­mies sur l’assurance-chômage alors que le taux de pau­vre­té des chô­meurs est cinq fois plus impor­tant que pour les sala­riés (35,1 % des chô­meurs sont en risque de pau­vre­té moné­taire) ? Un pano­ra­ma des sys­tèmes euro­péens d’assurance-chômage per­met d’éclairer cette carac­té­ris­tique cen­trale, et par­fois mécon­nue, de l’indemnisation des chô­meurs : celle-ci n’est « géné­reuse » nulle part, ni en France, ni chez nos voisins.

À rebours d’un prin­cipe d’exhaustivité par­fois peu per­ti­nent (et peu lisible) pour l’analyse com­pa­ra­tive, nous nous concen­trons dans ce qui suit sur les nations euro­péennes les plus com­pa­rables par la taille de leur popu­la­tion et de leur PIB (les huit prin­ci­pales éco­no­mies, plus le Dane­mark étant don­né son sta­tut de modèle incon­tour­nable dans les débats autour des poli­tiques de l’emploi). L’analyse com­pa­rée du mon­tant moyen des pres­ta­tions ciblées per­met d’établir un pre­mier constat glo­bal (Tableau 1) : les deman­deurs d’emploi per­çoivent en moyenne des indem­ni­tés infé­rieures, voire très infé­rieures aux salaires per­çus par la majo­ri­té des per­sonnes en emploi. https://www.youtube.com/embed/VCXpa6Me_nA?wmode=transparent&start=0

La position intermédiaire de la France

C’est au Dane­mark que ces pres­ta­tions sont rela­ti­ve­ment les plus fortes, la France occu­pant une posi­tion inter­mé­diaire, tan­dis que le sys­tème for­fai­taire bri­tan­nique appa­raît pour ce qu’il est : un dis­po­si­tif d’indemnisation rési­duel. Ces don­nées cor­ro­borent le fait que les dépenses d’assurance-chômage sont de second rang dans les dépenses de pro­tec­tion sociale totales : 6 % en France et moins de 5 % dans l’UE, hors crise sani­taire.

Pré­sen­tons rapi­de­ment les fac­teurs qui expliquent la fai­blesse géné­rale de ces mon­tants, com­pa­rée aux reve­nus sala­riaux de la popu­la­tion en emploi. Le fac­teur plus évident d’entre eux tout d’abord : si la plu­part des régimes ont voca­tion à com­pen­ser la perte de reve­nus selon une logique assu­ran­tielle, leurs règles effec­tives conduisent presque tou­jours à des baisses impor­tantes du niveau de vie. Le taux de rem­pla­ce­ment, c’est-à-dire le rap­port entre l’allocation et le salaire pré­cé­dent, la perte d’emploi, est variable d’un pays à l’autre, mais ne rem­place jamais tota­le­ment le salaire perdu.

Le taux géné­ral appa­raît à pre­mière vue rela­ti­ve­ment plus faible en France (57 %) que dans d’autres grandes éco­no­mies euro­péennes, même si ce constat peut être nuan­cé car pour les salaires les plus faibles il peut atteindre 75 %. Le taux géné­ral est légè­re­ment plus éle­vé en Alle­magne, et prend poten­tiel­le­ment en compte la situa­tion fami­liale à la dif­fé­rence de la France. Le Dane­mark pré­sente le taux le plus impor­tant et s’approche le plus d’un dis­po­si­tif de main­tien du niveau de vie (pour les sala­riés éli­gibles), alors que nombre de pays dis­posent de taux inter­mé­diaires (70 % à 80 %) et dégres­sifs avec l’allongement de la durée d’indemnisation : c’est le cas de l’Espagne, de l’Italie, des Pays-Bas et de la Suède (ain­si que de la France depuis 2019, mais uni­que­ment pour les hauts revenus).

L’existence, par ailleurs, d’un pla­fond éle­vé (supé­rieur à 8000€) dis­tingue le cas fran­çais de ses voi­sins euro­péens. Mais ce para­mètre reste anec­do­tique au regard de la dis­tri­bu­tion des salaires pas­sés par­mi les chô­meurs : seul 0,14 % des béné­fi­ciaires avaient atteint ce pla­fond en 2022 selon l’Unedic.

La fai­blesse des pres­ta­tions ver­sées tient ensuite à la struc­ture du chô­mage en Europe : les actifs les plus sus­cep­tibles de perdre leur emploi sont à la fois moins qua­li­fiés et moins rému­né­rés en moyenne, et per­çoivent des indem­ni­tés en rela­tion avec ces faibles rému­né­ra­tions le cas échéant.

De nombreux chômeurs travaillent

Enfin, les dépenses sont faibles en moyenne car une part impor­tante des deman­deurs d’emploi avec des droits ouverts (on parle d’indemnisables) ne per­çoivent rien ou seule­ment une par­tie rési­duelle de leur indem­ni­sa­tion… parce qu’ils tra­vaillent. À l’inverse de cer­tains dis­cours sur la sup­po­sée oisi­ve­té des chô­meurs, ces cas ne sont pas mar­gi­naux : en France par exemple, ce sont envi­ron 50 % des indem­ni­sables qui tra­vaillent en paral­lèle de leur recherche d’emploi. Lorsqu’ils per­çoivent une indem­ni­sa­tion, celle-ci est faible : 788€ par mois d’indemnisation en moyenne en 2022, un mon­tant infé­rieur à celui des chô­meurs sans activité.

Ces consi­dé­ra­tions géné­rales en tête, il n’apparaît pas per­ti­nent d’approfondir davan­tage cette com­pa­rai­son en fonc­tion du seul indi­ca­teur des dépenses moyennes, qui sug­gère au mieux des ordres de gran­deur. Les don­nées manquent pour esti­mer l’influence rela­tive de chaque fac­teur men­tion­né sur la posi­tion dans un tel clas­se­ment. Sur­tout, la notion même de béné­fi­ciaire est dépen­dante des dis­po­si­tifs eux-mêmes et de leur éten­due : elle laisse dans l’ombre l’ensemble des chô­meurs qui ne per­çoivent pas ou plus d’indemnisation.

Une couverture imparfaite des chômeurs

Pour rap­pel, moins de la moi­tié des deman­deurs d’emploi sont indem­ni­sés en France et encore ceci ne prend pas en compte l’absence d’indemnisation des non-ins­crits (prin­ci­pa­le­ment les nou­veaux entrants sur le mar­ché du tra­vail), alors qu’ils repré­sentent un chô­meur sur cinq. Les don­nées com­pa­rables manquent pour esti­mer les taux de cou­ver­ture dans les autres pays de notre panel : la notion de deman­deur d’emploi ins­crit est admi­nis­tra­tive et très dépen­dante des poli­tiques natio­nales de l’emploi. L’analyse des cri­tères d’indemnisation per­met pour­tant de dres­ser un second diag­nos­tic géné­ral : les dis­po­si­tifs d’assurance-chômage euro­péens tendent à exclure une par­tie des sala­riés qu’ils sont sup­po­sés protéger.

En effet, une logique assu­ran­tielle fon­dée sur un prin­cipe contri­bu­tif domine en Europe. L’indemnisation dépend for­te­ment des coti­sa­tions ver­sées au cours du pas­sé pro­fes­sion­nel récent, contrai­re­ment à l’assurance mala­die. De plus, la durée de ver­se­ment est limi­tée, contrai­re­ment aux pen­sions de retraite. Sur ces fon­de­ments, ces dis­po­si­tifs vont en prio­ri­té assu­rer les actifs dont l’emploi est stable, capables de rem­plir les condi­tions d’affiliation les plus longues, et béné­fi­ciant en retour des durées d’indemnisation maxi­males (sans néces­sai­re­ment les pro­té­ger contre une baisse de leur niveau de vie).

Pour­tant, c’est sans sur­prise pour les actifs dans l’emploi dis­con­ti­nu que l’incidence du chô­mage est la plus forte. La non-cou­ver­ture est alors liée à l’insuffisance de coti­sa­tions (un filtre à l’entrée) ou à l’épuisement rapide des droits acquis (un écré­mage vers la sor­tie). Les exclu­sions en rai­son de sanc­tions, très pré­sentes dans les débats, demeurent en fait des cas très mar­gi­naux. On peut enfin citer le non-recours, un fac­teur qui n’est pas com­plè­te­ment étran­ger aux condi­tions d’éligibilité, selon cette étude de la Dares.

Dif­fé­rents para­mètres (et inter­ac­tions entre ces para­mètres) limitent l’étendue de la popu­la­tion au chô­mage cou­verte : le tableau ci-des­sous pré­sente les prin­ci­paux cri­tères d’éligibilité et de durée sus­cep­tibles de res­treindre la cou­ver­ture dans les pays de notre panel. La France y occupe une posi­tion médiane sur la plu­part d’entre eux. La bar­rière d’accès à l’indemnisation, qui équi­vaut à 6 mois tra­vaillés, est plus courte que dans d’autres pays du panel mais elle est par­ta­gée par les tra­vailleurs néer­lan­dais ou sué­dois et elle est plus courte pour les tra­vailleurs italiens.

Éviction organisée

Ces contri­bu­tions sont par ailleurs appré­ciées sur des périodes dif­fé­rentes. Les coti­sa­tions s’apprécient sur une période rela­ti­ve­ment plus courte en France (24 mois) ou en Alle­magne (30 mois) qu’en Espagne (72 mois) ou en Ita­lie (48 mois), ce qui est sus­cep­tible d’accroître la dif­fi­cul­té à vali­der le cri­tère de durée d’affiliation. En ce qui concerne la durée d’indemnisation maxi­male, le Royaume-Uni et la Pologne se dis­tinguent par une évic­tion rapide. Avec 18 mois, la France se situe dans une posi­tion inter­mé­diaire, et dans une posi­tion simi­laire de la majo­ri­té des autres pays du panel pour les tra­vailleurs plus âgés.

La ten­ta­tion d’établir une hié­rar­chie claire entre les pays se heurte cette fois-ci à la dif­fi­cul­té d’appréhender les consé­quences de chaque confi­gu­ra­tion natio­nale. Aucun pays n’est sys­té­ma­ti­que­ment plus (ou moins) inclu­sif sur chaque para­mètre. En d’autres termes, chaque dis­po­si­tif orga­nise l’éviction d’une par­tie des chô­meurs à sa manière. Cette ques­tion est d’autant plus com­plexe qu’elle dépend en der­nière ana­lyse des inter­ac­tions entre ces cri­tères d’éligibilité et des condi­tions d’emploi propres à chaque pays.

La France se carac­té­rise par exemple par un recours impor­tant à des contrats courts de très faible durée : elle était le pays euro­péen le plus uti­li­sa­teur de contrats de moins d’un mois selon cette étude du Tré­sor. Cela limite d’autant la capa­ci­té de cer­tains tra­vailleurs à rem­plir la condi­tion mini­male de durée d’affiliation, alors même qu’elle est en appa­rence moins contrai­gnante qu’ailleurs. Quand ils la rem­plissent, ils sont par ailleurs sus­cep­tibles d’être for­te­ment péna­li­sés sur le mon­tant qu’ils per­çoivent : la réforme de 2021 prend en effet en compte les périodes non tra­vaillées (et non rému­né­rées) entre les contrats courts dans le cal­cul du mon­tant de l’allocation.

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Un risque incomplètement couvert

En met­tant à dis­tance la ques­tion trom­peuse de la hié­rar­chie de la « géné­ro­si­té » des sys­tèmes d’assurance-chômage, cette ana­lyse com­pa­ra­tive révèle qu’en France comme dans les autres pays euro­péens le risque de perte de reve­nu lié au chô­mage est très incom­plè­te­ment cou­vert. Ce résul­tat inter­pelle, alors que la lit­té­ra­ture en sciences éco­no­miques a depuis long­temps iden­ti­fié l’assurance-chômage comme un outil indis­pen­sable à l’efficacité de la recherche d’emploi (voir entre autres cet article de Peter Dia­mond, lau­réat du Nobel de la Banque de Suède). La fai­blesse de la cou­ver­ture du risque chô­mage sur­prend aus­si au regard de sa fré­quence : plus d’une per­sonne sur deux fait l’expérience du chô­mage au cours de sa car­rière, par­mi les géné­ra­tions en acti­vi­té. Or, les autres types d’aides sociales com­pensent très mal les pertes de salaires dues à la pri­va­tion d’emploi.

Aus­si, quels que soient les argu­ments rhé­to­riques qui les accom­pagnent, les réformes suc­ces­sives de l’assurance-chômage font en fait figure de mesures d’économie, d’autant plus simples à mener que les popu­la­tions concer­nées sont peu mobi­li­sées ou ne se per­çoivent pas comme telles. Ces éco­no­mies ne viennent pas non plus finan­cer d’autres types de dépenses ciblées, en tout cas en France.

Le bud­get cumu­lé de l’agence publique pour l’emploi et des poli­tiques de l’emploi dites actives (les mesures d’accompagnement vers le retour à l’emploi, telles que la for­ma­tion ou les contrats aidés par exemple) y pesait 0,84 % du PIB en 2022 selon Euro­stat. C’est légè­re­ment plus qu’en Alle­magne (0,53 % du PIB), mais les chô­meurs d’outre-Rhin béné­fi­cient pro­por­tion­nel­le­ment davan­tage de ces dépenses puisque le taux de chô­mage y est plus de deux fois plus faible qu’en France. C’est bien moins qu’au Dane­mark ou qu’aux Pays-Bas (1,42 % et 1,57 % du PIB res­pec­ti­ve­ment), là aus­si des pays avec des taux de chô­mage par­mi les plus bas d’Europe.

Ces consi­dé­ra­tions n’épuisent pas la ques­tion du finan­ce­ment d’une amé­lio­ra­tion de la pro­tec­tion des per­sonnes pri­vées d’emploi, alors que le régime d’assurance-chômage et son ges­tion­naire, l’Unedic, génèrent actuel­le­ment des excé­dents. Un accrois­se­ment des recettes pour finan­cer de nou­velles dépenses est ain­si pos­sible, qui pour­rait pas­ser par une ponc­tion sur les contrats courts, un res­pect du droit du tra­vail concer­nant leur usage voire une aug­men­ta­tion plus géné­rale des salaires – donc des cotisations.

Le simple res­pect de l’égalité sala­riale entre les femmes et les hommes pour­rait de ce point de vue lar­ge­ment contri­buer à un tel accrois­se­ment des recettes. Les coti­sa­tions chô­mage pour­raient, enfin, faire l’objet d’une meilleure redis­tri­bu­ti­vi­té afin de com­pen­ser les inéga­li­tés de recours aux contrats courts en fonc­tion des niveaux de qua­li­fi­ca­tions, de diplômes et de rémunérations.

Les choix poli­tiques res­tent ouverts et il n’est pas ques­tion, ici, de dire ce qui devrait être fait, et com­ment en matière d’assurance-chômage. En revanche, il paraît dif­fi­cile, en France comme en Europe, d’invoquer une sup­po­sée géné­ro­si­té des sys­tèmes de pro­tec­tion contre le risque chô­mage pour jus­ti­fier « en même temps » dif­fé­rents plans d’économie et une amé­lio­ra­tion de l’efficacité du mar­ché du travail.