Le samedi 9 janvier dernier, les membres et sympathisants du Cercle culturel Kulturkreis Nathan Katz se sont retrouvés comme tous les ans, à l’occasion de la date anniversaire de sa mort le 12 janvier 1981, sur la tombe du grand dramaturge et poète alsacien, au cimetière central de Mulhouse. Ils étaient cette année encore plus nombreux que d’habitude, ce qui montre aussi l’attachement à la culture régionale. Durant cet hommage organisé par Claude Diringer, secrétaire de l’association, Huguette Durr et Evelyne Troxler ont récité des textes du grand auteur sundgauvien, et Daniel Muringer, du groupe Géranium, en a chanté d’autres.
Le Cercle culturel Nathan Katz, présidé par Alfred Ruppé, a été créé en mai 1981 par des auteurs, artistes et personnalités alsaciennes dont René Ehni, Louis Schittly, Jean-Paul Sorg ou Gérard Leser, pour promouvoir l’œuvre du chantre du Sundgau et de la langue alsacienne. Il y a vingt-cinq ans, l’association a permis de sauver la tombe de Nathan Katz, qui était vouée à la disparition parce qu’il n’y avait plus de descendance familiale pour payer la concession. Celle-ci est actuellement réglée par le cercle.
Depuis les trente-cinq ans que se répète cette commémoration, le Kulturkreis Nathan-Katz associe à cet hommage les autres artistes, auteurs et grands personnages inhumés au cimetière de Mulhouse. C’est ainsi qu’elle a aussi sauvé la tombe de Robert Breitwieser, artiste-peintre ami de Nathan Katz. La concession est payée depuis par un descendant domicilié en dehors de l’Alsace.
Ce samedi, les participants à l’hommage à Nathan Katz ont ensuite été indignés de découvrir que la tombe d’un autre grand homme risque d’être démolie au cimetière central. C’est celle d’Auguste Lustig, poète et auteur de pièces de théâtre en alsacien du XIXe siècle, qui a sa statue au square Steinbach à Mulhouse. Sur la stèle en marbre gravée a été collé un écriteau jaune de la ville de Mulhouse annonçant la démolition de la tombe si la concession n’était pas payée à nouveau.
Evelyne Troxler, la fille du grand artiste Tony Troxler, a envoyé le soir même un mail courroucé au maire de Mulhouse Jean Rottner, aux adjoints Sylvie Grisey et Michel Samuel-Weis (lequel était présent à l’hommage) et à Jean-Marie Bockel, président de la M2A.
Elle écrivait : « Il me semble qu’au moment de la classification due à Édouard Boeglin et de la création de listes de tombes célèbres (suite à la menace de disparation de la tombe de Nathan Katz, évitée de justesse parce que quelqu’un m’a averti de la présence du fameux écriteau sur la tombe !!!), il avait été décidé que ces tombes ne pourraient plus être détruites, même si personne ne pouvait prendre en charge le renouvellement de la concession. Il n’y a sans doute plus de famille d’Auguste Lustig…. Mulhouse se doit de prendre en charge les concessions des tombes de ses hommes et femmes célèbres et pourrait aussi s’occuper d’entretenir un peu ces tombes : celle de Lustig est envahie par un laurier et les mauvaise herbes. Je vous prie de bien vouloir vous occuper de la conservation de cette tombe, sur laquelle il y a une stèle en marbre gravé…. Je suis triste d’être obligée de recommencer la travail entrepris pour la conservation de la tombe de Nathan Katz, alors que le cimetière n’était pas encore classé et que la liste des tombes à conserver n’était pas encore effectuée, ne faisait pas l’objet de visites. »
De son côté, le Cercle culturel Nathan Katz a réagi par un communiqué de presse dans lequel son secrétaire Claude Diringer demande à la Ville de Mulhouse de « mettre en place une solution qui saura pérenniser les tombes de personnages illustres qui ont contribué au rayonnement littéraire, culturel, artistique et patrimonial de notre province ».
Plus généralement, il suggère la gratuité des tombes de ces grands hommes dans toutes les villes et communes d’Alsace. Ils méritent au moins cela.
J.-M.S.
P.S.
Le jeudi suivant, 14 janvier, Sylvie Grisey, l’adjointe au maire de Mulhouse chargée des cimetières et du centre funéraire, a fait cette réponse, avec copie aux différents autres correspondants, au courriel envoyé le samedi soir par Evelyne Troxler : « Les étiquettes placées sur les monuments informent les ayants-droit de l’échéance de la concession. En aucun cas, cette étiquette ne stipule que le monument sera démoli. Nous en apposons 1500 par an. Cette pratique est commune à tous les cimetières de France. Une concession est accordée pour une durée de 30 ans, renouvelable à échéance. La personne ayant acquitté la concession pour la dernière fois ne nous donne aucune information sur son parcours de vie ni sur les éventuels héritiers de la concession. Il nous est donc quasiment impossible de retrouver les ayants-droit, héritiers de la concession.
La pose de l’étiquette est le seul moyen d’informer les éventuels visiteurs qui peuvent ainsi faire une démarche dans un délai de deux ans. Le cimetière central est protégé (non pas classé) grâce à une ZPPAUP- Zone de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager. Ce travail a été très long, démarré à la fin des années 90 pour aboutir fin 2008. Avec cette démarche, nous avons créé un comité d’experts ; en font partie entre autres, le Conseil Consultatif du Patrimoine Mulhousien et l’Association Mémoire Mulhousienne, représentés par Madame Vitoux et Monsieur Eisenegger. Une liste de 150 monuments funéraires d’intérêt patrimonial a été arrêtée par le comité d’experts du 25 avril 2007 et jointe au règlement de la ZPPAUP. Ce règlement précise bien qu’aucun des monuments y figurant ne peut être démoli sans l’accord de ce comité d’experts et de l’ABF. Malgré la protection de ces sépultures, elles restent propriété des ayants-droit qui renouvellent et entretiennent leur bien.
J’espère que ces informations vous rassurent quant à l’avenir des monuments protégés du cimetière central. »