Des personnels dévoués servent encore aux élèves des repas de qualité dans des cantines de M2A qui sont menacées. Les élus communautaires, eux, font avaler à tout le monde de la bouillie pour les chats, histoire d’entretenir opacité et confusions autour de leurs véritables intentions et responsabilités.
Spiegel ne serait pas un vrai écolo ?…
M2A a brusquement rompu il y a quelques semaines la convention de restauration du collège Jean Macé à Mulhouse. Colère et indignation des parents d’élèves et des personnels face à la possible disparition de leur cantine bio : ils ont lancé une pétition (cliquez ici) ; dans une motion (cliquez là) ils ont pointé l’attitude, qui leur paraît surprenante, de Jo Spiegel qu’ils avaient rencontré, naguère. A l’époque, il était si enthousiaste qu’ils l’ont pris pour le président de M2A ! Il exprimait alors encouragements et admiration pour les personnels de ce collège engagés dans une démarche parfaitement en phase avec la sienne, puisqu’ils ont transcrit, dans un projet pédagogique intégré, toutes les méthodes et tous les principes de la « politique de développement durable » prônée par la communauté de communes.
Une politique pilotée à M2A par Jo Spiegel. Lequel, pourtant, ne dit mot ces jours-ci sur les menaces qui pèsent sur la cantine du Jean Macé et donc sur le projet éducatif initié dans l’établissement il y a dix ans. Du coup, les pétitionnaires sont saisi par le doute. Est-ce que l’élu les aurait roulés dans la farine bio ?!… Polis, ils s’interrogent (gentiment) sur « la réalité de la politique menée par l’agglomération ». L’artisan du « Plan climat de M2A », le défenseur de « l’achat des produits éco-labellisés dans les marchés publics », le partisan de « l’agriculture paysanne de la région mulhousienne » ne serait-il pas un vrai écolo ?…
C’est pire, car s’il ne s’agissait que de cela, maintenant qu’il est pris en flagrant délit de tromperie sur la marchandise, il se serait défendu. Là, il ne dit rien : tant que c’est tenable, mieux vaut pour lui entretenir la confusion que laisser paraître la réalité.
Des efforts venant d’élus au travail ?!
Ils ne l’ont pas fait, mais les parents et les personnels du collège Jean Macé auraient pu élargir l’objet de leur pétition. En effet, d’autres cantines de M2A sont menacées, comme celles des collèges Villon (Mulhouse), de Bourtzwiller, de Rixheim… L’inquiétude grandit et des rumeurs circulent sur des décisions (lesquelles ?) prises dans une opacité complète par des élus du département et de M2A. Au point que ces derniers se sont sentis obligés de tenir, le 11 mai, une séance dite de « travail » sur le sujet. Ils ont même été contraints de répondre à des manifestants qui les attendaient à la sortie. Les édiles ont dû reconnaître que durant leur réunion, ils ont décidé un sursis de deux ans pour les cantines. Ah bon ?.. Certaines étaient donc vraiment menacées ?…
Oui, et le peuple est prié de mesurer le sens du sacrifice des élus qui « auront un travail à faire pendant deux ans pour que cela se poursuive dans le temps » (???) Il vont se mettre derrière les fourneaux ?.. Ils vont faire les courses, encadrer les élèves ?… Ils ont aussi tenu à préciser que « le Département a fait un effort pour maintenir la cuisine dans les établissements » (???) Ce n’est qu’involontairement, qu’ils finissent par nous rassurer sur leur sort en lâchant : « C’est un effort financier important qui a également été fait par M2A » (1)
Ainsi donc l’effort à réaliser est financier. On s’en doutait : nos élus ne se sacrifieront pas plus que de coutume, et ne travailleront pas plus que d’habitude, sinon pour désigner ceux qui vont devoir fournir l’effort censé compenser le fait que les caisses des collectivités sont vides. Ça, ils ne l’ont pas dit. Ils ont un peu honte, quand même. Lorsque des impayés de factures de cantines de 30 000, voire de 62 000 euros ont été évoqués publiquement, les élus de M2A ont communiqué de manière pitoyable : c’était la faute à la fusion (avec PFRS ?), puis la faute au changement de président de M2A, entendait-on successivement. Voilà qui ne serait pas arrivé à Bockel, en effet. Lui, quand il y avait un trou dans la caisse, il empruntait tous azimuts. Y compris des produits toxiques qui ont contribué à ruiner les collectivités qu’il a gérées.
« L’effort » demandé peut prendre des formes multiples : devant l’insistance des manifestants, une élue a dû reconnaître que « la télérestauration ne sera pas maintenue en l’état ». Encore une formulation volontairement confuse qui cache une décision difficilement avouable. En clair : l’offre de restauration scolaire de qualité sera supprimée dès la rentrée pour une partie (ou la totalité ?) des enfants des écoles élémentaires voisines des collèges. Au mieux, on leur fournira une bouffe industrielle livrée sur plus place (par télérestauration) Ils n’auront plus accès à cette cantine bio qui leur apportait un peu plus que l’ordinaire .
Les vraies causes et les vraies victimes
On comprend que les responsables aient du mal à assumer les conséquences de leurs choix politiques et cherchent à les occulter. En l’occurrence, ils n’ont pas encore avoué qu’avant la suppression définitive de toutes les cantines, la privatisation via une restauration industrielle genre Sodexho, – celle qu’abhorre Jo Spiegel !… – serait à leurs yeux une façon de faire génératrice d’encore plus d’économies. C’est peut-être à cela qu’ils vont « travailler » pendant deux ans. Ne leur demandez pas de l’avouer durant la campagne électorale en cours.
Entre les intérêts de la finance et l’intérêt général, il faut choisir. Ils ont choisi de s’incliner devant les diktats de la finance. Pour eux, il n’y a pas d’autres issues. Dès lors, des régressions sont inévitables. Dans l’agglo mulhousienne, par exemple, des mesures comme l’augmentation des tarifs des cantines et des transports scolaires, la restriction des périodes d’ouverture des piscines ou/et de la température de l’eau (!), et bien d’autres, ont déjà été prises dans le passé. Le but est toujours le même. Les victimes sont toujours choisies parmi les plus vulnérables. Un des moyens les plus couramment utilisés est d’organiser la détérioration progressive des services publics. C’est là-dessus que nos élus travaillent.
On comprend qu’ils cherchent à brouiller la description de l’œuvre funeste qu’ils accomplissent. Et ni les causes de la situation, ni les solutions alternatives ne doivent être connues, ni même évoquées : ils doivent éviter qu’une prise de conscience politique prenne de l’ampleur et soit source d’une contestation qu’ils ne pourraient plus contrôler.
Il peut cependant y avoir des loupés dans le camouflage. Avec un peu de bienveillance, on peut les analyser comme des velléités de mieux faire : L’Alterpresse68 a publié il y a quelques jours des aveux (ou s’agit-il d’un sursaut moral ?) de la nouvelle gouvernance de M2A qui a été interpellée par le CP68 : Budget M2A sinistré : des aveux et un désaveu. Personne n’a répondu à ce jour.
Catastrophique depuis des années, il faut bien dire que la situation budgétaire de M2A n’émeut guère l’ensemble des conseillers communautaires. Même ceux d’entre eux qui sont candidats aux prochaines législatives. Pour l’instant, ils n’ont pas réagi face à la mise en cause du service public des cantines scolaires qui va toucher dès la rentrée des enfants de familles démunies. Peut-être parce qu’ils sentent confusément qu’ils ont contribué à cette décision, comme aux précédentes ?
Ou préfèrent-ils fermer les yeux ? La campagne électorale va-t-elle les inciter à les rouvrir, au moins pour un moment ?
(1) Propos relatés dans « L’Alsace » du 12 mai 2014.
B. Schaeffer
Le 22 mai 2017
A (re)lire :
Pour bien comprendre la réalité de la situation budgétaire de M2A lisez l’article déjà signalé ci-dessus :
Budget M2A sinistré : des aveux et un désaveu (publié le 10 mai 2017). Le président de M2A et le maire de Wittenheim (chargé du budget), interpellés, n’ont toujours pas répondu à ce jour.
Straumann a choisi la finance contre l’humain. Pas (encore) l’inverse… (mars 2016). La situation n’est guère meilleure au niveau départemental.
Ah ! s’ils avaient un peu plus de courage et d’imagination politique : En Alsace, des élus locaux tétanisés face aux délinquants fiscaux (août 2016).
Mais non, ils préfèrent camoufler et bidouiller en usant d’artifices et du « levier fiscal » : Dette et fiscalité à Mulhouse : c’est Maitreau, bonneteau, gogos ! (octobre 2016).
…ou préfèrent se convaincre, le temps d’une promesse, et face à la montée du FN, que dorénavant ils feront mieux : Plus rien ne sera comme avant !?… (décembre 2015).
Un exemple d’élus M2A (O. Becht et B. Groff), candidats aux législatives, interpellés sur les régressions qu’ils coorganisent au détriments des jeunes privés de la gratuité des transports scolaires : Elections : des pirates haut-rhinois à l’assaut du fameux « piège à cons » (décembre 2016). Ils n’ont jamais réagi.
Ce service public du transport scolaire est abîmé, dans l’agglo mulhousienne comme ailleurs : Transport scolaire : des dingues au volant écrabouillent la gratuité (septembre 2016).