Cher-e‑s participant-e‑s du camp climat 2019,
Le blizzard de l’information sourcée viendra-t-il refroidir votre véhémence de braise, au moment où vous vous apprêtez à batailler fort justement contre les effets du réchauffement climatique ?
C’est que tout semble aller pour le mieux, ainsi qu’on le découvre dans l’image extraite du site « camp climat », reproduite ci-dessus. Les habitants et la municipalité de Kingersheim font un bel effort en accueillant la juvénile cohorte climatique dont vous constituez l’avant-garde, à proximité de son « poumon vert ».
A ce sujet, on vous doit cependant l’honnêteté de préciser qu’il ne nous est pas encore tout à fait possible de localiser exactement le lieu d’oxygénation champêtre, désigné ici sous le vocable « poumon vert », mais sachez que nos meilleurs enquêteurs y travaillent d’arrache-pied.
En revanche, nos poumons ont commencé à expectorer du noir, après lecture d’un détail figurant parmi les diverses qualités caractérisant la commune de Kingersheim, tel que décrit sur le site du « camp climat ». On vous l’a cerclé en fluo ci-dessous :
Une centrale photovoltaïque, bah, c’est vrai que c’est une bonne idée a priori. Même si c’est aussi polluant à fabriquer. Mais passons, c’est de l’énergie renouvelable à défaut d’être propre, et on y est favorables.
En revanche, contrairement au « poumon vert » évoqué plus haut, on a pu exactement localiser le lieu où sera installé la future centrale. Si, si.
Il se trouve que c’est une ancienne décharge à ciel ouvert de plus d’une dizaine d’hectares, située à 1900 mètres du camp climat 2019.
Constituée de remblais pollués de déchets ménagers, hospitaliers et industriels entreposés là, entre les années 60 à 73. Et dont la nature exacte de certains restent à déterminer.
Nous en avons d’ailleurs parlé en détail ici, là, et puis encore ici, en pensant justement à votre venue.
On ne voudrait pas vous gâcher la fête et la lutte qui s’annoncent, mais simplement vous inviter à considérer des situations concrètes et immédiates de pollutions écotoxiques, dont celle de la substance insecticide organochlorée lindane, largement répandue dans nos sols (et à proximité du camp climat !). De sorte à lutter contre leur dissimulation, et faire état de leurs dangers auprès des populations, alors même que l’on trouve de ces horribles sites sur l’ensemble du territoire national.
La municipalité de Kingersheim n’est d’ailleurs pas à l’origine du problème: la décharge a été créée par la ville voisine de Mulhouse.
Alors on s’est dit qu’il serait utile de vous diffuser une version papier de l’article que l’on a rédigé ici pour vous.
Dans notre esprit, il ne s’agit pas d’une alerte sanitaire, histoire de vous encourager à fuir par tous moyens le camp. Non. Mais d’une alerte de type politique. De manière à vous stimuler, et vous inviter à agir pour informer à votre tour autour de vous, cela partout en France.
Seulement voilà, ce droit à l’information vous est dénié.
En effet, après un contact pris avec vos organisateurs, nous avons appris qu’il n’était pas question pour eux de rediffuser l’article aux futurs participants au camp.
Quand on exprime un étonnement, en comparant cette façon de faire à celle de toutes les autorités, depuis 50 ans, sur le dossier « Eselacker » (c’est le nom de la décharge), vos organisateurs précisent que la décision a été prise collectivement, « comme toujours au sein de l’équipe du Camp Climat ».
C’est vrai que, puisque c’est « collectif », ce n’est quand même pas comme si on décidait abusivement à la place de tous ceux qui voudraient savoir !
Puis une autre proposition nous est faite : « vous pourriez avoir un stand à Kingersheim où vous pourriez présenter le dossier de vive-voix, mais nous craignons que votre texte effraie les participant-e‑s à quelques jours de l’ouverture du Camp Climat ».
Là, c’est plus vraiment votre épouvante éventuelle qui est l’objet du tracas de vos organisateurs, mais plutôt la gêne que la diffusion de cette lettre pourrait susciter au sein de la municipalité de Kingersheim…
En résumé : connaitre les faits, et établir des responsabilités relativement à des enjeux de santé publique et de pollution à grande échelle, il parait donc que ça « effraie » les participants au camp climat 2019, et puis que ce n’est pas très cordial pour la municipalité invitante !
Mais est-ce vraiment le problème ?
Le problème n’est-il pas plutôt de savoir que l’organisation du camp climat vous juge insuffisamment autonome pour y faire face, en adultes responsables et lucides ?
Une posture autoritaire et infantilisante des organisateurs à votre égard est-elle une manière pertinente et éclairante de vous préparer à décider librement ce qu’il vous est utile ou non de savoir ?
Avez-vous besoin d’une tutelle pour fonder votre libre arbitre et décider ce que sont vos priorités ?
Enfin, d’où parlent-ils pour s’estimer le droit de censurer de l’information d’intérêt public, et appropriée au regard de l’enjeu porté par votre manifestation ?
Si vous répondez par la négative à toutes ces questions, vous disposez alors du droit de leur réclamer des explications démocratiquement justifiables. A moins qu’ils ne craignent simplement que leur manifestation ne connaisse un cataclysme politique en forme de baudruche à pet ?
La danger du « hors-solisme » menace toujours la famille écologiste. C’est une tendance ancienne, qui survit mollement, ici, dans une certaine tradition politique alsacienne, au travers de mouvements autocentrés, souvent individualistes, et dont la faiblesse réside notamment dans l’incapacité à penser et agir sur le réel social, au moins autant que sur la menace climatique. Quand elle ne cède pas devant un penchant larvé pour l’invective moralisante, les assignations absconses ou le mysticisme à deux balles.
L’un de vos ateliers prévu le 3 aout à 17 heures s’intitule : « Mobiliser la presse, ou comment susciter l’intérêt des médias ».
Nous sommes précisément de cette petite presse indépendante et engagée qui relaie régulièrement vos actions dans nos colonnes.
Et elle vous interpelle aujourd’hui. Et vous presse de vous intéresser à ce qui presse autour de vous, sans escompter sur vos délégués pusillanimes.
Alors, participant et participante du camp climat 2019, TOI AUSSI, décroche le portrait de tes organisateurs, et élève l’étendard de l’information locale d’intérêt public, ici et maintenant, puis ailleurs et partout où tu pourras le faire !
Active la baudruche à pets et diffuse librement et largement les informations que nous avons réunies sur la décharge Eselacker située près du camp climat 2019 !