Pascal Lacombe, un ami de la rédaction, a récemment publié sur un réseau social un texte dans lequel il explique les raisons qui l’ont conduit à se rendre à la manifestation du 17 juillet, à Colmar.

Nous l’avons trouvé excellent et fort adapté au regard du contexte d’enkystement ou plutôt d’oukases et d’invectives, portant sur l’obligation vaccinale. L’enjeu des libertés fondamentales étant quant à lui devenu étrangement accessoire, alors qu’il constitue une part essentielle de notre identité commune, au même titre que la notion de soins.

Notre vocation première, en tant que média alternatif, étant précisément de faire vivre le pluralisme et le débat, nous le reproduisons intégralement ci-dessous.

Samedi plus de 100 000 personnes se sont retrouvées à manifester à travers la France «contre le pass sanitaire et contre la vaccination obligatoire» ; tel était en tous cas majoritairement désigné l’objet de cette contestation dans la presse et sur les réseaux sociaux.

J’ai personnellement fais le choix de me vacciner après un temps d’hésitation mis à profit pour essayer de m’émanciper de la soupe médiatique politique et conspirationniste nauséabonde que nous offrent à longueur de journée TV, chaines d’infos en continu et réseaux sociaux.

M’émanciper aussi des injonctions moralisatrices de la clique d’élu(e)s et ministres qui nous ‘’gouvernent’’ avec en tête de gondole tous ces crétins qui ont voté MACRON en état d’hallucination collective et qui le soutiennent, et notre bon roi lui même, un gamin qui fait joujou avec toutes les valeurs qui ont construit notre démocratie et nos avancées sociales depuis plusieurs siècles, et qui sont aujourd’hui, comme jamais précédemment, bafouées.

Qu’on redonne à cet idiot sa boite de soldats en plombs et qu’on le dégage au plus vite ! Mais je m’égare déjà de colère … J’ai fait le choix de me vacciner, disais-je, car sur la base d’informations raisonnables, recherchées, choisies et activement sélectionnées j’ai considéré que le rapport risque-bénéfice penche largement au profit de ce dernier (je n’entre pas dans les détails ici). Mon avis est clairement aussi qu’il serait raisonnable qu’un maximum de personnes y consente pour atténuer et voir disparaître enfin cette pandémie. Voilà pour ma position personnelle librement consentie, et que je crois réfléchie.

Samedi se sont retrouvées dans les manifestations des personnes opposées à la vaccination en général, des personnes opposées à la vaccination obligatoire, des personnes opposées au Pass sanitaire, des militants de longue date opposés à la casse des services publics (actée ou à venir), opposées aux réformes sociales en cours, des défenseurs des libertés, des gilets jaunes, des citoyens lucides qui disent stop au pillage de l’État et des biens publics par le Capital, des hallucinés et complotistes aussi, quelques nazillards pas très inspirés dans leurs slogans. Même un fervent défenseur de la saignée comme seul moyen d’éradiquer la COVID de nos corps. Bon ça a permis de rigoler un peu…

Mais ce qu’il fallait voir et entendre principalement dans ces manifestations spontanées, c’est le rejet des pratiques politiques autoritaires de l’État, des restrictions de libertés massives qui s’installent, la bio-surveillance systématique qu’on nous impose, la surveillance et le contrôle de nos libertés en général… et énormément DE PRIMO MANIFESTANTS qui se réveillent peu à peu de l’illusion du bonheur matériel et individuel que nous vend le capitalisme depuis de trop nombreuses décennies !

Des manifestants qui ont joué le jeu du social et de l’économie de longues années avec force promesses de la liberté du bonheur et du bien être qui en découlerait, et qui se rendent enfin compte qu’on les a baisés (je m’autorise). Et là est peut-être l’essentiel, le signe tangible que le peuple se re-politise peu à peu dans la continuité des Gilets jaunes, des manifestations d’il y a quelques mois contre la réforme des retraites.

Là est peut-être le berceau d’une contestation massive qui tarde à arriver et qu’il faut appeler à grandir. Le Pass sanitaire que nous inflige Macron n’est que le catalyseur de cette colère aux revendications multiples. Le slogan principal de la manifestation de Colmar a été ‘’Liberté’’. Alors quoi ? Et bien il faut arrêter de considérer que le verbe et la promesse politique font action. Il faut répéter que sous nos régimes autoritaires, nous ne pouvons plus compter sur aucun représentant élu pour défendre les causes pour lesquelles nous luttons, et ces régimes nous refusent tous les moyens habituels de protestation (grèves, mouvements sociaux organisés, médias dissidents, manifestations…) avec une violence policière inouïe.

Toute forme de dissidence et de contre-pouvoir nous est refusée. Rappelons nous que la majorité des grandes réformes politiques de ces 2 derniers siècles a été accompagnée de longs épisodes de désobéissance civile, d’émeutes, de transgression des lois, de perturbation de l’ordre public, voire de guerres civiles. Les tumultes de ce genre, ces ferments révolutionnaires, font peur aux élites politiques et économiques, et ont souvent été à l’origine de transformations politiques majeures.

Les manifestations de samedi n’étaient pas d’emblée portées par un parti politique, un syndicat, ou un mouvement social identifié comme tel. Elles n’étaient pas ‘’institutionnalisées’’. Et c’est tant mieux. Les manifestations de samedi ne relevaient d’aucun programme politique cohérent. Elles étaient peu structurées, un peu chaotique. Mais il en est ainsi dans tout mouvement naissant de ce type qui se construit une identité.

Elles sont pourtant, peut être, la promesse d’une vague de contestation naissante dont on espère qu’elle prendra une ampleur jamais atteinte depuis de nombreuses années pour une véritable rupture qui ne peut hélas passer que par le rapport de force.

“Et vous savez, mes amis, il vient un temps où les gens se fatiguent d’être écrasés sous le talon ferré de l’oppression, d’être sans cesse plongées dans les abimes de l’humiliation” – (Martin Luther King).

Je retournerai manifester samedi prochain, dans cet espoir, et pour ces raisons.

Souvenons nous que :

« Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés. La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première. La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres. Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. » – (Helder Camara, un évêque brésilien connu pour sa lutte contre la pauvreté).

Pascal Lacombe