Le menu du Conseil municipal du 30 septembre semblait moins politique que technique. Dotation politique de la ville pour 2021, affectation d’emplois municipaux, bons de commande pour travaux de voirie, qualité de l’eau, subventions diverses…
Cependant, quelques point saillants furent particulièrement remarquables, tant ils paraissent illustrer la perdition du personnel politique, et celle de nos édiles en particulier.
Ce faisant, les trois piliers de la novlangue : « La guerre, c’est la paix », « La liberté, c’est l’esclavage », « L’ignorance, c’est la force » qu’invente George Orwell pour le soin de son roman antitotalitaire, 1984, ont encore trouvé de quoi s’appliquer concrètement au sein de l’instance délibérative de la cité du Bollwerk.
Michèle Lutz, maire de Mulhouse, pilote seule la séance de ce jeudi 30 septembre. Jean Rottner, qui borde en général nombre de ses interventions, est quant à lui affairé hors la ville.
La maire décide d’ouvrir son conseil par la lecture d’un message qui dépassera allègrement les 3 pages bien remplies. Comme à son habitude, elle parait aussi étrangère à ce qu’elle lit, qu’affectant une espèce de stance tout à la fois martiale et théâtrale à sa diction. Sa lecture monocorde ne cessera d’être hésitante, butant au moins à 3 reprises sur quelques formules.
Elle choisit d’ouvrir sur le plan blanc déclaré à Mulhouse. Plutôt que de traiter des causes structurelles qui voit ce dispositif d’alarme sanitaire déclenché sur le GHRMSA, elle préfère désigner les urgences de la clinique du Diaconat comme étant l’élément déclencheur.
Une aberration, alors même que le groupe hospitalier expliquait récemment dans un communiqué être confronté à « une situation critique marquée par la poursuite de la gestion de la crise sanitaire, le besoin en renforts de ressources humaines, la réduction du nombre de lits liée à un absentéisme conséquent ».
« Je considère que le passe sanitaire est une contrainte qui permet d’accéder à davantage de libertés »
Michèle Lutz
Selon Mme Lutz, « nombreux sont les soignants qui ont choisi de se réorienter professionnellement ». Une pudeur de gazelle qui ira droit au coeur du personnel de soin, autoritairement suspendu.
Mais cette novlangue bureaucratique et fardée de la maire atteint rapidement son apogée. Ainsi, pour décliner les difficultés auxquelles la ville fait face, elle évoque les manifestants du samedi qui participeraient en substance de la contamination. Le tout en indiquant respecter leur point de vue.
Mieux : si l’obligation vaccinale des soignants est venue fragiliser la situation des ressources humaines du secteur des soins publics et privés, la maire de Mulhouse « considère que le passe sanitaire est une contrainte qui permet d’accéder à davantage de libertés » !
Un argument pour le moins paradoxal, et digne d’un memorandum tout droit issu du ministère de la Paix (en fait celui de la Guerre) toujours codifié par George Orwell pour 1984, et à propos duquel on supposerait qu’une explication structurée allait suivre de la part de la première magistrate :
« Je ne souhaite pas polémiquer, vu que l’on entend parler d’atteintes aux libertés, je voudrais juste rappeler que les pays qui n’ont pas de passeport ou qui n’ont pas accès au vaccin, sont soit des dictatures, soit des pays en voie de développement. Rien de comparable, en effet, avec notre nation, « Terre des droits de l’homme ». »
Personne ne semble être tombé de sa chaise à l’énoncé de cette concaténation causale totalement lunaire. Les meilleurs éléments du groupe majoritaire devaient sans doute être solidement arnachés à leur fauteuil en préparation de cette épreuve, tandis que les autres devaient avoir augmenté le volume de la musique d’ascenseur qui filait bon train dans leur caboche.
Quel serait alors le conséquent logique de cette invraisemblable déclaration ? Le passe sanitaire caractérise-t-il donc le principe démocratique ? Le vaccin n’est-il pas soluble dans un ordre politique autoritaire ? Les pays en voie de développement sont-ils réfractaires par nature à la vaccination ?
Ou bien, plus simplement encore, la « Terre des droits de l’homme » est-elle autre chose qu’une fanfaronnade de bourgeois hypocrites, qui aiment à s’en gargariser afin d’escamoter leur propre autoritarisme bouffi ?
Au reste, nous ne souhaitons pas davantage polémiquer que la maire de Mulhouse, mais il se trouve que nos voisins européens, pour ne parler que d’eux, sont tout autant des « terres des droits de l’homme » que ladite « Terre des droits de l’homme ». C’est dire s’il faut se taire quand il n’y a pas lieu de rompre le silence.
Surtout s’agissant d’entretenir continument une psychose, assimilable aux « fake news », dont la maire de Mulhouse se voudrait pourtant un antidote. Elle qui déclare constater une baisse du taux d’incidence, pour souligner aussitôt que « nous avons été fortement impactés par la 4ème vague ».
Ainsi qu’on l’observera dans le graphique ci-dessous, le choix des mots n’emporte plus le moindre scrupule pour nombre de responsables politiques. Peut-être un effet de la large adoption du passe sanitaire dans le public, lequel est d’abord un instrument politique de pilotage sanitaire.
Les motifs et déclarations anxiogènes peuvent aussi bien se répéter à l’envi depuis des mois, ils recouvrent de moins en moins la réalité qu’ils énoncent, dont le « fort impact de la 4ème vague », pour paraphraser Michèle Lutz. Son inclination à mentir la rendrait d’ailleurs éligible pour servir de porte-parole au ministère de la Vérité (département de la propagande) défini par George Orwell dans 1984. Mais jugez plutôt :

Elle achèvera son monologue en décrétant que la sécurité et la relance économique sont les principaux sujets d’inquiétude des citoyens mulhousiens. Et que la ville a évidemment tous les atouts économiques pour redécoller mieux encore. Le ministère de l’Abondance, toujours défini par George Orwell, approuve donc ce message.
Entre l’installation de Madame Mercedes Degliame suite à la démission de Madame Lara Million (cumul soutenu des mandats oblige), une parenthèse bucolique, à l’évocation des martinets à ventre blanc, par le président du groupe majoritaire, Alain Couchot, dont la période de nidification retarde la destruction de la barre des marronniers, située 28 quai d’Oran, arrive le point relatif au réseau de vidéosurveillance, appelé à être renouvelé et étendu.
Paul Quin, en parfait jésuite, annonce le chiffre de 1 million d’euros d’investissement. « Cela fait beaucoup d’argent », précise-t-il, en se tournant vers Loïc Minéry (élu d’opposition EELV), lequel s’interrogeait précisément à ce sujet, et réclame davantage de moyens humains que de caméras.
« La sécurité n’est pas un coût mais a un prix » s’esbaudit l’adjoint à la sécurité. Puis il se récrie : « Elle n’a pas de prix mais a un coût » ! Et se déleste courageusement sur le compte de la patronne : « C’est un choix politique, celui de Mme le Maire » !
Mais pour 1 million d’euros, « ce n’est pas l’alpha et l’oméga de la sécurité ». C’est le résultat d’un arbitrage. En même temps, comme on dit aujourd’hui chez les gouvernants, la municipalité est éligible aux dispositifs d’aides d’État, lequel « force » l’investissement dans le parc de vidéo-surveillance.
L’hyper-surveillance sera donc l’alpha et l’oméga du ministère de l’Amour (département de la torture et de la rééducation) ainsi que l’énonçait déjà un certain Eric Arthur Blair, alias George Orwell, dans 1984 !
A noter que le sujet divise au sein du groupe d’opposition de gauche, puisque Jean-Yves Causer votera en faveur du programme.
Enfin, à l’instar du monde décrit par Orwell, où tout est décidément cul par-dessus tête, c’est de Bertrand Pauvert (élu RN) qu’émane une proposition de bon sens démocratique : la tenue d’un conseil municipal mensuel, afin d’en finir avec les assemblées marathons de 4 heures et demies, se concluant par au moins une dizaine de points non-traités, qui font l’objet d’un vote unique entériné en 10 secondes sous la forme d’un bloc !
Il est vrai que les boites noires électorales, on connait bien à Mulhouse ! Avec les « machines à voter », Big brother veille depuis plus de 15 ans déjà sur nos suffrages…
Bonjour.
Merci pour vos articles de qualité !
Respectueuses considérations.
Maria ANCONA