Une centaine de personne manifestait devant le tribunal judiciaire de Colmar ce vendredi matin. La justice était saisie en référé, c’est à dire par voie d’urgence, sur une partie des cas (plus de 400 ayant été enregistrés) par l’avocat mulhousien André Chamy. Ce recours collectif contre l’obligation vaccinale, qui concerne essentiellement des personnels soignants, a été examiné lors d’une courte audience.
L’avocat va saisir des juges judiciaires en formation de référé aussi bien en Alsace, Lorraine, que Franche-Comté, en coopération avec d’autres confrères. Il avait d’ailleurs saisi le tribunal judiciaire de Mulhouse dès la fin septembre, et s’en était ouvert lors d’une manifestation du samedi.
L’originalité de sa plaidoirie vise à soutenir l’idée que l’obligation vaccinale des soignants est une « voie de fait » commise par l’État. Une « voie de fait » est, en matière civile, un comportement ou un acte portant atteinte aux droits de la personne ou méconnaissant à l’évidence une disposition législative ou réglementaire.
Cela justifie donc le recours à la procédure d’urgence, en vue de faire cesser le trouble réputé irrégulier.
C’est bien la notion de « consentement libre » qui se trouve au coeur de la procédure juridique de Chamy. Un consentement libre, doit donc être dénué de contrainte, et éclairé, c’est-à-dire précédé par une information claire, transparente et loyale.
La loi du 4 mars 2002, dite loi Kouchner, précise d’ailleurs à cet égard qu’« aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment ».
Le fait d’intervenir sur un citoyen contre son consentement est pour un médecin une faute qui engage sa responsabilité civile et l’expose à une sanction disciplinaire. Raison pour laquelle tout patient refusant de reconnaitre par écrit son consentement libre et éclairé lors de la vaccination se verra opposé un refus de vaccination.
Le passe sanitaire a d’ailleurs eu pour principal effet de provoquer des dizaines de milliers de vices du consentement, puisque de très nombreuses cohortes de citoyens ne sont venus à la vaccination que pour sauvegarder leurs loisirs et pratiques sociales.
La notion de consentement libre, issue de la résolution 2361/2021 du Conseil de l’Europe est par conséquent partie de l’argumentation de l’avocat Chamy devant le tribunal de Colmar.
La résolution affirme que « L’Assemblée demande donc instamment aux États membres et à l’Union européenne de :
- Article 7.3.1 – s’assurer que les citoyens et citoyennes sont informés que la vaccination n’est pas obligatoire et que personne ne subit de pressions politiques, sociales ou autres pour se faire vacciner, s’il ou elle ne souhaite pas le faire personnellement
- Article 7.3.2 – de veiller à ce que personne ne soit victime de discrimination pour ne pas avoir été vacciné, en raison de risques potentiels pour la santé ou pour ne pas vouloir se faire vacciner »
Chamy a donc plaidé la compétence du juge judiciaire, alors que seules des juridictions administratives ont été saisies jusqu’alors, avant d’accuser l’État de vouloir faire abstraction du « principe fondamental » qu’est « le consentement », « en violation de la législation européenne ».
En défense de l’État, l’avocat colmarien David Ebel a plaidé quant à lui l’incompétence du tribunal judiciaire. Selon les dires de L’Alsace, l’avocat colmarien s’est appuyé sur des arrêts du Conseil d’État pour affirmer que « le droit à un consentement libre ne saurait être mis en cause dès lors qu’il s’agit de lutter contre une épidémie ».
Affirmé ainsi, l’absurdité parait énorme, puisque le consentement libre ne saurait connaitre d’exception dès lors que le vaccin n’est pas obligatoire. Sauf à admettre que les logiques sanitaires ont décidément aboli le discernement de toute une frange de la société…
La décision a été mise en délibéré au 12 novembre.
Remerciements à J.C. Pelka pour les photos