Ce samedi soir en la salle du Cap de Saint-Amarin se tenait la projection du film « La fabrique des pandémies », suivie d’un échange avec les spectateurs, en compagnie de la réalisatrice, Marie-Monique Robin.
Journaliste et autrice de livres et de documentaires charpentés par la défense de biodiversité : « Le roundup face à ses juges », « Les moissons du futur », les effets de la chimie et des intrants sur la santé humaine (« Le monde selon Monsanto », « Notre poison quotidien », la dénonciation de la logique de croissance économique « sacrée croissance ! »), et d’autres sujets, elle est revenue à Saint-Amarin, invitée une nouvelle fois par l’association « Thur écologie & transports », à l’occasion de la diffusion en salle de son dernier opus.
Pendant deux ans, Marie-Monique Robin a parcouru au plus fort de la pandémie de covid-19 huit pays différents avec une équipe de techniciens et en compagnie de l’actrice Juliette Binoche, qui tient une fonction de personnalité candide face aux scientifiques, et assure la narration du film.
Le fil rouge du documentaire : trouver les facteurs d’émergence des maladies infectieuses, en questionnant des scientifiques du monde entier tout le long de son périple, afin de comprendre, et faire comprendre, les liens entre santé humaine et santé des écosystèmes.
Durant les dernières décennies, le monde connait une explosion sans pareil des zoonoses, c’est à dire des maladies virales ou parasitaires transmises à l’Homme par des vecteurs animaliers. Plus de 70% des maladies sont ainsi transmises par des animaux aux humains.
Les plus connues parmi elles se nomment sida, Ebola, dengue, chikungunya, Sars-cov, Mers, et covid-19…
Depuis plus de 20 ans l’humanité fait face à au moins une nouvelle maladie infectieuse chaque année. Alors que la fragilisation des milieux sauvages créée les conditions d’émergence de ces « zoonoses », de tristes sires escomptent éradiquer les virus en exterminant les espèces qui en constituent les réservoirs. Une manière de briser le thermomètre face à la maladie.
Ce remède de cheval, bien pire que le mal, précipiterait l’effondrement de la biodiversité. Les activités humaines étant seules responsables de cette « épidémie de pandémies », selon nombre de scientifiques.
La proposition soutenue par la communauté scientifique, en lien avec l’organisation mondiale de la santé (OMS) est le « Global health » ou « La santé planétaire », c’est à dire une conception holistique de la santé qui prenne tout à la fois soin des hommes, des animaux et des écosystèmes, passant par une science et des savoirs transversaux, loin d’une logique de « silos » où chaque spécialiste se cantonne sa spécialité.
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Rodolphe Gozlan et Juliette Binoche en Guyane – Photo ©M2R Films
Entre les États-Unis qui voient la maladie de Lyme et les hantavirus se propager, le Mexique et ses mangroves somptueuses, le Kenya et ses villages communautaires Maasaï, le Gabon et ses consommateurs de « viande de brousse » vectrice de maladies, la Guyane entre forêt primaire d’Amazonie et exploitation aurifère, Madagascar et ses forêts arasées à plus de 90%, ainsi que d’autres pays, on découvre comment, entre dérèglement climatique, déforestation, élevage industriel, et monocultures mortifères, des sentinelles scientifiques surveillent la propagation de nouveaux agents pathogènes, et de nombreux travailleurs internationaux collaborent avec les populations locales pour en limiter les risques, et les sensibiliser à la protection de leur patrimoine matriciel que sont les écosystèmes.
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Bauma, un village communautaire Maasaï au Kenya où hommes et animaux cohabitent – Photo ©M2R Films
Les alertes pandémiques vont s’accroitre si les causes environnementales ne pas considérées avec le plus grand des sérieux et l’urgence la plus vive.
Tout comme le covid-19, qui provient sans doute, et paradoxalement, d’un laboratoire, ainsi que le pense de plus en plus de scientifiques, les alertes aux pandémies prendront le pouvoir sur nos vies.
Non seulement en termes de contrôle social, comme on a pu l’éprouver jusqu’à la nausée avec le covid19, quand, réduisant le citoyen à un sujet infantile et irresponsable, il était commandé, supposément pour son propre bien, par les principes de la manipulation psychologique et des « nudge unit ». Sans compter les coûts écologiques, humains et financiers, qu’une telle perspective prendra.
En bref, « La fabrique des pandémies » est un film de grand intérêt, qui n’a pu être entrepris que par la voie du financement participatif, car il est apparu trop « radical » aux programmateurs de la chaine Arte, qui n’en voulurent pas…
Victor Hugo disait que « Rien n’est plus fort qu’une idée dont heure est venue ». L’idée sonne son temps, mais ce sont les sociétés humaines qui débloquent…
Un site internet de grande qualité, instructif et pédagogique, est également consacré aux thématiques du livre et du film, et permet de les approfondir. Il est accessible ici.
Le film est visionnable gratuitement ici jusqu’au 22 décembre 2023.
Détails techniques : Réalisation : Marie-Monique Robin ; avec la participation de Juliette Binoche ; Production : M2R Films ; Durée : 147 min ; Année de production : 2022