L’AEA (entreprise adapté située rue du Périgord à Wittenheim) est « une entreprise à part entière, qui permet à des personnes reconnues travailleurs handicapés orientés « milieu ordinaire de travail » d’exercer une activité professionnelle salariée dans des conditions adaptées à leurs besoins », relève le discours officiel de la structure.
« Elle emploie au moins 80% de salariés handicapés dans ses effectifs de production, et accompagne l’émergence et la consolidation du projet professionnel des salariés en situation de handicap, en vue de leur valorisation, leur promotion et leur mobilité au sein de la structure elle-même ou vers les autres entreprises ».
Colères économiquement valides
L’association Adapei-Papillons Blancs d’Alsace, qui gère le site de Wittenheim, acteur majeur dans l’accompagnement des personnes en situation de handicap, se trouve au cœur d’un conflit social. Confrontée à un déficit de 3 millions d’euros, l’organisation a pris des mesures drastiques qui suscitent l’indignation de ses employés.
Le site de Wittenheim, le plus affecté par la mesure, fournit une vingtaine d’emplois, et fabrique essentiellement des pièces pour l’industrie automobile.
Le plan « nouvel horizon 2027″, récemment adopté par la direction, prévoit la suppression de certaines primes, entraînant une baisse significative des revenus pour de nombreux salariés.
Les 20 employés d’Alsace Entreprise Adaptée à Wittenheim pourraient voir leur salaire amputé de 170 euros mensuels, soit près de 10% de leurs revenus.
Certains salariés craignant alors de devoir survivre avec 1 150 euros par mois après les diminutions, soit moins que le Smic. Certains exerçant depuis 35 ans dans l’établissement.
Une logique économique qui sert le discours entrepreneurial en vigueur dans la structure, laquelle demeure officiellement une association, mais dont l’objectif, depuis au moins les années 80, consiste à rentabiliser le travail fourni par les salariés handicapés. En témoigne la sentence édictée par le président de l’ADAPEI du Rhône : « pour gagner de l’argent, il fallait simplement botter le cul des salariés »,
Cette privation arbitraire de salaire a déjà provoqué un mouvement de grève, et les salariés envisagent de poursuivre leur mobilisation.
Trois organisations syndicales (CFDT, FO et CFE-CGC) ont signé l’accord convenu dans le cadre du plan, destiné à remédier à un déficit de 3 millions d’euros. Seule la CGT s’y est fermement opposée.
La direction affirme que les mesures d’économies sont nécessaires pour assurer la pérennité de l’association. Laurent Cusey, délégué CGT, dénonce a contrario « une régression sociale sans précédent », et s’inquiète pour l’avenir du site de Wittenheim, dont la fermeture est d’ailleurs envisagée pour juin 2025, sans assurance de reclassement pour les employés.
Si le dialogue social semble plus que jamais mis à l’épreuve dans cette structure qui accompagne depuis près de 60 ans les personnes en situation de handicap en Alsace, les employés du site wittenheimois n’envisagent pas de renoncer à la lutte pour défendre leurs droits, afin de préserver leurs conditions de travail et leur pouvoir d’achat, en dépit de ressources limitées.