Le Conseil Populaire 68 pour l’abolition des dettes publiques est le fruit d’une initiative de militant(e)s de Action contre le chômage 25, A Contre-Courant, Amis de l’Emancipation Sociale, ATTAC 68, Les Alternatifs de Franche-Comté, NPA Besançon et Mulhouse, PCF 68. Son analyse et ses objectifs sont explicités dans une charte adoptée à Thann en septembre 2011.
Contribuer à la transparence sur les dossiers publics fait partie des objectifs qu’une presse libre doit se fixer. C’est pourquoi L’Alterpresse68 relaie une nouvelle initiative du CP68 qui cherche à mettre une peu de clarté sur la gestion opaque des dettes publiques des collectivités locales alsaciennes.
Nous reproduisons ici la lettre ouverte que le CP68 adresse au maire de Mulhouse ; des courriers analogues seront envoyés à d’autres élus. Si ces derniers acceptent enfin de diffuser des informations claires sur ce sujet sensible – dont la dimension européenne, et même planétaire, va faire la une de l’actualité ces prochains mois – l’Alterpresse68 s’engage à les publier régulièrement.
Les intertitres sont du Comité de Rédaction de L’AP68.
Lettre ouverte à M. le maire de Mulhouse
Objet : Propositions pour mieux informer sur le problème des dettes publiques.
Monsieur le maire,
Les mécanismes qui régissent les dettes publiques et les effets budgétaires désastreux qui en découlent pour la Ville restent, pour l’essentiel, dans l’ombre.
Dans un souci de transparence et de pédagogie, nous voudrions offrir régulièrement à nos concitoyens quelques informations qui permettront de décrire la situation et de souligner les véritables enjeux. C’est pourquoi nous vous proposons de rendre publics, à intervalles réguliers, les sommes que la ville de Mulhouse est amenée à payer à ses créanciers.
Un rythme de publication hebdomadaire nous semble à priori raisonnable.
Enfin de la transparence ?
Merci donc de bien vouloir demander aux services compétents de la mairie de nous faire parvenir par courriel, à jour fixe, les sommes versées aux banques par la Ville dans la semaine précédent l’envoi de ces informations. Pour chaque versement, le nom de la banque, le montant des intérêts et celui du capital constituent autant de renseignements qui permettraient aux Mulhousiens d’y voir plus clair. D’autres précisions pourraient être utiles, comme par exemple le détail des contrats d’emprunts toxiques, voire leur historique s’ils ont été renégociés. Ce serait particulièrement utile, dans l’immédiat, pour cet emprunt indexé sur le franc suisse et dont il a été question au dernier conseil municipal.
Pour mener à bien cette opération transparence, nous avons déjà obtenu l’accord de l’équipe éditrice du bulletin électronique « L’Alterpresse 68 » qui s’est dite prête à nous ouvrir ses colonnes. Nous nous sommes engagés à y tenir une rubrique hebdomadaire que nous intitulerons probablement «Rançons de la semaine», reprenant un terme que vous avez vous-même utilisé lors de la cérémonies des vœux et qui nous paraît tout à fait adéquat, s’agissant des exigences exorbitantes et des méthodes insupportables de la finance. Nous nous tournerons naturellement aussi vers d’autres médias, petits et grands, connus ou moins connus, pour leur proposer de se faire également l’écho des informations que vous nous transmettrez.
Pourquoi tant de réticences et de résistances à parler clair ?
Dans un passé pas si lointain, nous avons eu l’occasion de mesurer les fortes réticences de M. l’adjoint aux finances face à de telles façons de faire, qui impliquent des médias. Mais nous voulons être optimistes : nous comptons sur l’évolution des esprits depuis l’accord conclu entre la municipalité et l’association « Démocratie ouverte » qui fait de Mulhouse un « Territoire Hautement Citoyen » (THC). Nous ferons parvenir à cette association une copie du présent courriel pour l’informer de notre démarche, parfaitement conforme à ses préconisations : « Démocratie Ouverte » suggère en effet l’émergence « de contre-pouvoirs efficaces et une éducation citoyenne continue » en appelant à garantir « la place des médias et d’autres instances de veille citoyenne, de transparence et de pédagogie ».
Les données que vous nous fournirez ne seront évidemment pas publiées sans commentaire. Comme nous l’avons déjà souligné, nous voulons absolument éviter de créer un climat anxiogène autour du problème des dettes publiques. Même si cela peut paraître paradoxal à certains esprits imprégnés d’idéologie néolibérale, l’ampleur des dettes publiques révèle en effet l’ampleur des richesses collectivement créées, et donc disponibles pour l’amélioration de la situation de tous. Le CP68 a déjà eu l’occasion de suggérer l’utilisation de ces richesses pour mettre en place la gratuité des transports publics ou pour organiser au mieux la réforme des rythmes scolaires. A chaque « rançon » versée aux banques – et dont vous nous communiquerez régulièrement le montant – nous solliciterons vos opposants au conseil municipal pour leur demander ce qu’ils feraient avec cette somme si un moratoire du paiement de ces « rançons » était courageusement décidé. Il y aurait là de quoi redonner vigueur et cohérence à votre « opposition », qui en a bien besoin. Ce serait peut-être aussi l’occasion, pour certains élus de votre majorité, de prendre leur distance avec des choix politiques qui ont montré leur nocivité et qui sont de plus en plus contestés, en Grèce, en Espagne, comme ailleurs dans le monde.
Pas que Mulhouse : l’exemple navrant de Kingersheim
Même si le statut de « THC » défini par « Démocratie ouverte » ne concerne pour l’instant que Mulhouse, l’opération transparence ne doit pas se limiter à cette ville. Nous solliciterons d’autres municipalités comme Kingersheim, Soultz, Guebwiller et Saint Louis. Il est navrant de constater, par exemple, que pour donner priorité au remboursement de la dette, le maire de Kingersheim envisage de porter atteinte au bon fonctionnement du CREA, un organisme que pourtant le maire lui-même a fondé, et qui, en vingt cinq ans d’existence, a beaucoup apporté aux jeunes de cette commune. Signe inquiétant pour l’état de notre démocratie : à Kingersheim – commune pilote en matière de « démocratie participative » – cet outrage à la jeunesse (pour rendre hommage à la finance ! ) a été décidé… à l’unanimité du conseil municipal et sans opposition visible au sein de la population.
Et les emprunts toxiques ?
Certaines communes comme Guebwiller, Saint Louis et Soultz ont souscrit des emprunts particulièrement toxiques. Le maire de cette dernière commune s’est confié récemment à la presse, dans un effort de transparence auquel il s’était refusé jusqu’ici. Mais il s’est mis dans l’incapacité de faire un choix conforme à l’intérêt général et se résigne à sacrifier sa ville pour rembourser un redoutable emprunt souscrit en franc suisse… Ce faisant, il écarte la seule solution qui serait raisonnable et que vient de rappeler un fin connaisseur des mécanismes des emprunts toxiques.
Il y aurait beaucoup de choses à dire aussi sur les dettes de la M2A sur lesquelles vous-même et d’autres élus de l’agglomération sont remarquablement discrets. Il y aurait beaucoup de choses à dire également sur les dettes du département du Haut-Rhin et le déni dans lequel s’est installé le président du Conseil Général à ce sujet. Il y aurait beaucoup de choses à dire sans doute sur les dettes du Conseil Régional d’Alsace où l’opacité est consciencieusement organisée…
Dans un tel contexte, nous espérons, M. le maire, que, comme nous, vous percevrez l’urgence d’une plus grande transparence et mesurerez l’importance des enjeux politiques et démocratiques qui lui sont attachés.
Mulhouse, le 6 février 2015
Le CP68
Articles mis en ligne de février 2015 à décembre 2015 dans le cadre de cette opération « transparence sur les dettes publiques » :
Plus rien ne sera comme avant !?… (décembre 2015)
Richert : du culot à revendre, des dettes à fourguer (novembre 2015)
Confidentialité dosée, démocratie bafouée et Mulhousiens floués (octobre 2015)
Une conférence de Robert Thys sur la régulation de la finance (septembre 2015)
Conseil municipal de Mulhouse : responsable et coupable ? (octobre 2015)
Dette toxique: Mulhouse – Soultz, choix et démocratie locale… (août 2015)
Une commisssion des finances ouverte ? Vraiment ouverte ? Chiche ! (août 2015)
Dettes publiques de Mulhouse et d’ailleurs : dossier pour informer et pour agir (juillet 2015)
Grèce, collectivités locales : même Troïka, même combat ! (juillet 2015)
Une lettre ouverte aux élus mulhousiens : un peu d’action, SVP… (juillet 2015)
Dette grecque et dette mulhousienne (juillet 2015)
Des élus hébétés face à une tentative de braquage sous la menace d’un toxique (juillet 2015)
Prêts toxiques : des « banksters » tentent de braquer 20 millions d’euros (Mulhouse) (juillet 2015)
La Grèce sacrifiée au Moloch de la finance ? (juillet 2015)
Les Grecs soulèvent la chape de plomb de la dette… Imitons-les ! (juillet 2015)
La dette grecque, et moi, et moi, et moi… (Radio MNE, juin 2015)
Dette et démocratie : L’Alterpresse68 interpelle les élus mulhousiens (juin 2015)
Dette grecque : illégale, illégitime, odieuse et insoutenable (juin 2015)
Désespérance sociale, utopie… et vision d’avenir (février 2015)
Quand toxique rime avec helvétique…(1) (mars 2015)
Quand toxique rime avec helvétique…(2) (mars 2015)
Opération transparence . Au Conseil Départemental : des toxiques qui piquent (février 2015)
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