Photographies de Karsten Paetzold (sauf amphithéâtre)
Dimanche 8 mai dernier, en fin de matinée, une cinquantaine de militants allemands et français (essentiellement d’Alsace pour ces derniers) se sont retrouvés au cimetière « Bergfriedhof » de Heidelberg (pays de Bade) à l’emplacement des stèles érigées en mémoire de résistants alsaciens, ainsi que du groupe de résistants allemand « Lechleiter », exécutés par les nazis à Stuttgart.
L’initiative d’une telle commémoration commune revient au DGB Süd-Hessen et à l’ancien Comité régional Alsace, et a déjà connu plusieurs éditions, alternativement de par et d’autre du Rhin.
L’objectif, au-delà de l’hommage au combat mené par des militants ouvriers, est de rappeler que la 8 mai n’est pas la date anniversaire d’une victoire « des Alliés sur l’Allemagne en 1945 », mais celle commune des peuples sur le nazisme.
Car la réduction de l’événement historique à la seule conclusion d’une confrontation de nations permet commodément de masquer le caractère fondamentalement anti-social, pour ne pas dire de classe, inhérent au fascisme, ainsi que la collusion et les complicités des bourgeoisies par-delà les camps – en apparence – adverses.
Pour les militants allemands, l’enjeu consiste également à imposer la date en tant que jour de commémoration officiel dans l’ensemble du pays.
Quatre intervenant-e‑s se sont succédé au cours de la cérémonie : Lars Treusch, secrétaire du DGB de Bade du nord, Silke Makowski, porte parole du VVN-BdA (Association des victimes du régime nazi- Union des antifascistes), qui insiste sur la portée symbolique de la proximité des stèles en hommage aux résistants allemands et alsaciens qui reposent côte à côte, unis dans la même lutte et la mort.
Pascal Debay, au nom du Comité régional CGT Grand-Est, relie le combat de hier avec celui à mener aujourd’hui, à l’heure d’une nouvelle montée du vote pour l’extrême-droite, dont il importe de ne pas être dupe du discours lénifiant et fallacieusement « social ».
Quant à Horst Raupp, secrétaire du DGB de Hesse du sud, il rappelle pour sa part que « le fascisme allemand n’a pas commencé à Auschwitz. Le fascisme a commencé lorsqu’on a dénié à des êtres humains leur humanité et leur dignité ». Le fascisme, partout où il est arrivé au pouvoir, est synonyme d’éviction de la démocratie, d’interdiction des syndicats et des grèves, de la suppression des conventions collectives et des droits sociaux et politiques durement acquis, de réductions de salaires, d’arrestations, de tortures et d’assassinats de syndicalistes.
Le rédacteur de ces lignes encadre les interventions de chants antifascistes allemands et français.
Après le dépôt traditionnel de gerbe, les participants quittent le cimetière du Bergfriedhof, au demeurant très beau, classé et protégé de ce fait.
À l’issue du déjeuner, la journée s’achève avec la visite de l’amphithéâtre de la « Thingstätte », construit en 1934–35 pour les grands-messes mégalomanes du régime.
Rendez-vous est pris pour l’année prochaine, sur un site de mémoire probablement lorrain.