Des médias com­plè­te­ment à l’Est 

Tan­dis que le ministre char­gé des Col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales, Sébas­tien Lecor­nu, recon­nais­sait benoi­te­ment en 2019 que « per­sonne ne se reven­dique Grand-Estois », le désir de Jean Rott­ner (son pré­sident) d’inscrire dura­ble­ment un récit régio­nal fic­tif dans l’esprit des « Grands-Estiens » passe notam­ment par la mobi­li­sa­tion de moyens média­tiques, sus­cep­tibles de don­ner corps et d’insuffler de la vie à un informe politique. 

A cet effet, nous avons consul­té ledit « contrat d’objectifs et de moyens » que la grande région a sous­crit auprès de 4 chaines locales de télé­vi­sion : « Alsace 20 », « Via Mira­belle », « Via Vosges » et « Canal 32 »

Il s’a­git du second contrat, d’une durée de 3 années, conclu entre l’ins­ti­tu­tion régio­nale et les 4 dif­fu­seurs audio­vi­suels pré­sents sur la TNT. Le pre­mier datant de l’an­née 2017. 

Ain­si, « De nou­veaux pro­grammes trai­tant de sujets divers (socié­taux, ins­ti­tu­tion­nels, cultu­rels, etc.) et
éten­dus à toute la région ont pu voir le jour appor­tant aux habi­tants des infor­ma­tions sur la vie locale
et l’actualité de tout le Grand Est »
, décline un para­graphe de la convention. 

Mais l’en­jeu essen­tiel reste expli­ci­te­ment de « co-construire » une iden­ti­té du Grand Est : « L’enjeu de ce contrat d’objectifs et de moyens est de contri­buer à la co-construc­tion d’une iden­ti­té Grand Est via la dif­fu­sion de pro­grammes adaptés ».

Sous l’angle de « l’in­té­rêt géné­ral », il y est ques­tion de faire connaitre les bien­faits concrets de la nou­velle baron­nie, en confor­mi­té avec ses pré­ro­ga­tives ins­ti­tu­tion­nelles (éco­no­mie, for­ma­tion, emploi, culture, trans­ports…), mais sur­tout de « contri­buer à don­ner du sens à l’identité du Grand Est ». Laquelle en manque cruel­le­ment, ain­si qu’on le ver­ra plus bas. 

La fin jus­ti­fiant tous les moyens, on ver­ra éga­le­ment ci-des­sous que la situa­tion épi­dé­mique peut éga­le­ment être com­prise comme une fenêtre d’op­por­tu­ni­té poli­tique, à ce titre. 

Les patrons des 4 chaines locales récusent toute atteinte à leur liber­té rédac­tion­nelle, et réfutent le terme de sub­ven­tion, pré­fé­rant celui de par­te­na­riat. A ceci près qu’elle consentent à ser­vir d’ins­tru­ment aux objec­tifs poli­tiques d’un exé­cu­tif régional.

Cela n’est pas nou­veau, bien sûr. A la manière du double jour­nal unique alsa­cien (L’Al­sace-DNA), les chaines télé­vi­suelles de proxi­mi­té demeurent étroi­te­ment tri­bu­taires de « par­te­na­riats » ins­ti­tu­tion­nels. Ain­si, sur la chaine « Alsace20 », « Mul­house agglo­mé­ra­tion » (M2A) y dis­pose d’une émis­sion régu­lière, tout comme « La Mai­son de l’Al­sace », notamment. 

Autant d’o­bli­gés qu’il faut cares­ser dans le sens du poil, et satis­faire autant que faire se peut. 

Le fait que la chaine locale alsa­cienne soit une créa­tion du Cré­dit Mutuel en 2006, sous l’ap­pel­la­tion « Alsa­tic TV » et l’é­gide du double jour­nal unique alsa­cien, en dit assez sur la capa­ci­té à en attendre autre chose qu’un dif­fu­seur ins­ti­tu­tion­nel et vertical. 

Mais avec la région Grand Est, on atteint un désir de contrôle édi­to­rial par­ti­cu­liè­re­ment ser­ré et retors. 

Si l’ob­jec­tif fixé est de par­ti­ci­per à la « valo­ri­sa­tion du fait régio­nal, de racon­ter les ter­roirs du Grand Est et son récit com­mun », l’ins­ti­tu­tion régio­nale fran­chit car­ré­ment le pas édi­to­rial, en défi­nis­sant elle-même le conte­nu des maga­zines dif­fu­sés par les 4 chaines de télé­vi­sion (article 3.1.3 du contrat). 

Mieux, l’ar­ticle 3.3.4 ins­ti­tue un « comi­té de pilo­tage », et il y est pré­ci­sé que : « Il est enten­du que les télé­vi­sions locales et les agents du ser­vice dédiés au sein de la Direc­tion de la Culture de la Région Grand Est devront éta­blir un comi­té de pilo­tage pour suivre les dif­fé­rentes étapes, de la sélec­tion à la dif­fu­sion, afin d’être en cohé­rence avec les termes du pré­sent contrat […] »

A cela s’a­joute un « comi­té de sui­vi et d’é­va­lua­tion », qui dif­fère du comi­té de pilo­tage, à l’ar­ticle 5 de la convention : 

« Afin d’assurer la bonne mise en œuvre des obli­ga­tions de ser­vice public, un comi­té de sui­vi com­po­sé des quatre chaînes locales et d’agents de la Direc­tion de la Com­mu­ni­ca­tion, se réuni­ra une fois par tri­mestre et en tant que de besoin à l’initiative de l’une ou l’autre des par­ties. Ce comi­té de sui­vi sera l’occasion de faire le bilan qua­li­ta­tif et quan­ti­ta­tif des dif­fé­rents pro­grammes réa­li­sés dans le cadre de ce contrat et d’évoquer les pro­grammes à venir. Alsace 20, Canal 32, Vià Mira­belle et Vià Vosges devront pré­sen­ter une note détaillant la réa­li­sa­tion des dif­fé­rents pro­grammes effec­tués ain­si qu’un bud­get détaillé des coûts affec­tés à la réa­li­sa­tion de leurs obli­ga­tions de ser­vice public ».

Com­plé­tons avec l’ar­ticle 6.2.1 par lequel s’é­nonce le sou­ci de bien rendre visible le logo Grand Est dans cha­cune des pro­duc­tions dif­fu­sées, et l’on sau­ra clai­re­ment (pour ceux qui en dou­te­raient encore) que le don­neur d’ordre est un par­te­naire on ne peut plus exi­geant et vétilleux. 

Exi­geant, mais éga­le­ment hypo­crite en diable. Car qu’une ins­ti­tu­tion soit sou­cieuse du denier public qu’elle dis­tri­bue sous condi­tions de moyens ou de résul­tats parait on ne peut plus légi­time. Mais que l’ins­ti­tu­tion fasse pla­ner des menaces de rétor­sions admi­nis­tra­tives et juri­diques, au nom de l’intérêt géné­ral, mais s’a­gis­sant de sa propre publi­ci­té indi­recte par voie média­tique, en est par­ti­cu­liè­re­ment piquant. C’est pour­tant ce qu’in­tro­duit le para­graphe inti­tu­lé « contrôle », à l’ar­ticle 11.

Se fai­sant juge de l’op­por­tu­ni­té de la dépense et par­tie au béné­fice très contes­table qu’elle espère en tirer, la chose équi­vaut en outre et l’air de rien, à une mise sous tutelle de fait d’en­tre­prises audio­vi­suelles privées : 

« Confor­mé­ment à la légis­la­tion en vigueur et à une juris­pru­dence constante des tri­bu­naux de l’ordre admi­nis­tra­tif comme des juri­dic­tions finan­cières en matière de ver­se­ment de fonds publics, la Région peut être ame­née à pro­cé­der ou à faire pro­cé­der à des contrôles sur pièces ou sur place concer­nant l’u­ti­li­sa­tion des fonds régio­naux, en dili­gen­tant éven­tuel­le­ment un audit por­tant sur les comptes du béné­fi­ciaire et sur l’u­ti­li­sa­tion des sommes versées.

Alsace 20, Canal 32, Vià Mira­belle et Vià Vosges devront donc, le cas échéant, mettre à la dis­po­si­tion de l’organisme de contrôle toutes les pièces admi­nis­tra­tives et comp­tables lui per­met­tant de rem­plir sa mis­sion. En ver­tu de l’ar­ticle L. 4313–3 du code géné­ral des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales Alsace 20, Canal 32, Vià Mira­belle et Vià Vosges devront four­nir chaque année, avant le 31 mai, les comptes cer­ti­fiés de l’année n‑1″.

Le tout repré­sen­tant plus de 1 200 000 euros de sub­ven­tions régio­nales annuelles, auprès des 4 médias, dont 505 000 euros pour la seule Alsace20. 

Nous avons sol­li­ci­té quelques éclair­cis­se­ments à ce sujet auprès de deux de ces chaines de télé­vi­sion locale, dont « Alsace20 », sans obte­nir de réponse. 

Grand Lest

Quoi qu’il en soit, on ne peut que sou­hai­ter bon cou­rage à qui devra s’atteler à la tâche her­cu­léenne de fabri­quer un « récit com­mun » au Grand-Est, il(s) ou elle(s) aura tout contre lui (ou elle) : l’histoire, la géo­gra­phie, (dont le cli­mat), la culture, les langues.

Né d’un grif­fon­nage de l’ex-monarque répu­bli­cain Hol­lande sur un coin de table, pour tran­cher  l’inextricable casse-tête posé par la réduc­tion du nombre de régions admi­nis­tra­tives, non sans prendre en compte les affi­ni­tés ou ini­mi­tiés poli­tiques avec ou à l’encontre des pré­si­dents en exer­cice, le Grand Est est sans doute la plus pro­blé­ma­tique et la plus aber­rante de toutes les mons­truo­si­tés engen­drées par la loi NOTRe.

À tel point qu’elle est la seule dont la déno­mi­na­tion ne com­porte aucune réfé­rence topo­ny­mique, dési­gnée uni­que­ment par une indi­ca­tion car­di­nale, toute rela­tive, et rela­tive évi­dem­ment par rap­port à Paris, centre qui est lui, aus­si abso­lu que le pou­voir de la monar­chie pas si abo­lie que ça.

L’adjectif « Grand » peut, quant à lui, faire réfé­rence à la taille impres­sion­nante de la nou­velle enti­té, sans com­mune mesure avec ce qu’on avait jusqu’à pré­sent cou­tume d’appeler « région » en France, mais peut éga­le­ment ren­voyer à une grande géné­ra­li­té aus­si floue que confuse, un « grand » fourre-tout en quelque sorte.

Géo­gra­phi­que­ment, rien ne lie les trois régions mariées de force : l’Alsace regarde, comme ses rivières, vers le bas­sin rhé­nan, la Cham­pagne est tour­née vers le Bas­sin pari­sien dont elle est d’ailleurs géo­lo­gi­que­ment consti­tu­tive. Ce sont trois cou­loirs nord-sud sans lien entre eux. Sur le plan démo­gra­phique, il n’y a pas davan­tage d’homogénéité quand on com­pare la den­si­té des dépar­te­ments alsa­ciens (Bas-Rhin 236,7, Haut-Rhin 216,73),  de la Haute-Marne (28,28) ou de la Meuse (30,14).

Cli­ma­ti­que­ment, même si l’Alsace n’a plus un carac­tère conti­nen­tal aus­si pro­non­cé qu’autrefois, les Vosges res­tent une bar­rière aux entrées mari­times, aux­quelles la Cham­pagne est par contre sou­mise, tem­pé­ra­ture océa­nique comprise.

Il convient encore de men­tion­ner la dis­pa­ri­té éco­no­mique frap­pante entre les trois anciennes régions.

Quant à l’histoire : après le « roman natio­nal » (voir la « courte his­toire de l’histoire de France » publiée dans l’Alterpresse68), voi­là qu’on entre­prend la fabri­ca­tion du roman « régional » !

Si la Lor­raine et l’Alsace se trou­ve­ront ensemble dans l’éphémère Lotha­rin­gie (de Lothrin­gen, Lor­raine) avant que les deux régions n’intègrent l’Empire ger­ma­nique, leurs des­tins seront néan­moins dis­tincts. Même si elle est convoi­tée – et occu­pée par inter­valles – par la Cou­ronne de France, ce n’est qu’en 1766 que la Lor­raine intègre le royaume de France, soit, para­doxa­le­ment, plus d’un siècle après l’annexion de l’Alsace par Louis XIV.

La Cham­pagne, pour sa part, entre très tôt dans le domaine royal (13è siècle) : ce sont donc trois par­cours his­to­riques entiè­re­ment différents.

Ajou­tons que l’association ter­mi­no­lo­gique bien connue d’« Alsace-Lor­raine » est abu­sive, puisque ce n’est que la Moselle, soit un seul des quatre dépar­te­ments lor­rains, qui a par­ta­gé avec Haut- et Bas-Rhin le des­tin tour­men­té que l’on sait, et ce, parce qu’ils avaient en com­mun l’usage de la langue alle­mande : sans doute, si ce n’est déjà fait, la fable « com­mune » consis­te­ra à dire qu’on a obli­gé ces popu­la­tions à la parler…

Évo­quons aus­si de vieilles ran­cœurs, qui laissent des traces aus­si durables que sou­ter­raines dans la mémoire popu­laire  : « Hütet euch von den Lothrin­gern » (« gar­dez-vous des Lor­rains », disait ma mère), sans savoir que l’expression remon­tait à la féroce répres­sion de la Guerre des pay­sans alsa­ciens en 1525 par les troupes du duc Antoine de Lor­raine (épi­sode his­to­rique qui, bien que majeur, ne fait pas par­tie du roman natio­nal, et ne figu­re­ra pas davan­tage dans le récit hyper-régio­nal, puisqu’elle révèle les liens de l’Alsace avec l’histoire allemande). 

L’histoire reli­gieuse n’est pas non plus à négli­ger, l’écart est en effet béant entre la très-catho­lique Lor­raine des ducs de Guise et la tolé­rance en la matière qui pré­vaut en Alsace après la Réforme, où coha­bitent trois reli­gions et où vivent, à l’aube de la Révo­lu­tion, plus de la moi­tié des Juifs du royaume.

C’est jus­te­ment la par­ti­cu­lière incon­grui­té, le non-sens de la construc­tion admi­nis­tra­tive bap­ti­sée Grand Est qui oblige ses diri­geants à mener ins­tam­ment une opé­ra­tion de bidu­lage idéo­lo­gique visant à lui en don­ner un, de sens, pour ten­ter de gom­mer au plus vite l’artificialité du bri­co­lage territorial. 

Le pire, c’est que ça peut mar­cher. Pas for­cé­ment tout de suite, bien sûr, la mémoire col­lec­tive est dotée de résis­tance, et ce n’est pas du jour au len­de­main qu’on arri­ve­ra à nous convaincre que nous devrions sou­dain nous sen­tir plus proches d’un Arden­nais que d’un Bre­ton ou d’un Basque, voire d’un Franc-Com­tois, d’un Badois ou d’un Suisse, alé­ma­nique ou romand, avec les­quels, en Alsace du sud, nous avons bien plus d’atomes crochus.

Le Roman de Bobards

Mais le matra­quage média­tique fini­ra par avoir rai­son de ces réti­cences  : le « récit  natio­nal » fran­çais, par exemple, n’est pas très vieux, il est écha­fau­dé à par­tir de la conquête du pou­voir poli­tique par la bour­geoi­sie dans la fou­lée de la Révo­lu­tion de 1789. À l’histoire de l’Ancien régime, et son aris­to­cra­tie sup­po­sée des­cen­due des Francs, on sub­sti­tue­ra celle du « peuple » (bour­geois, pay­sans et ouvriers confon­dus, s’entend) issu, lui, des Gaulois. 

C’est tout au long du XIXème que l’on res­sus­cite, réin­vente et glo­ri­fie les per­son­nages de Ver­cin­gé­to­rix et de Jeanne d’Arc, Miche­let et fouilles sur le site d’Alésia sous le Second Empire aidant.

À l’orée de ladite Grande guerre, en un siècle à peine, à la faveur de la sco­la­ri­sa­tion obli­ga­toire et sous la hou­lette des « hus­sards noirs de la Répu­blique » qui auront dans le même temps à charge d’éradiquer les « patois » consti­tuant autant d’outils de résis­tance à l’inoculation du venin natio­na­liste, ce sera chose faite : l’histoire mythi­fiée et réduc­trice, la fable natio­nale aura creu­sé son che­min dans les cer­veaux et l’on pour­ra sans pro­blèmes mener les trou­peaux humains se faire mas­sa­crer sur les champs de bataille au nom de la « nation », voire de la « race ».

La place aujourd’hui de plus en plus réduite qu’occupe la dis­ci­pline de l’histoire dans les cur­sus sco­laires, et notam­ment l’histoire régio­nale, n’arrange évi­dem­ment rien et favo­rise ce type de manipulation.

Alexandre Mora, chef de cabi­net de Jean Rott­ner et pro­bable orches­tra­teur de l’opération des­ti­né à fabri­quer le concept de « nos ancêtres les Grand-Estiens », s’était féli­ci­té de ce qu’on ait jamais autant par­lé de Grand-Est que durant la pan­dé­mie de covid-19. Un mal­heur com­mun for­geant une iden­ti­té, pour­quoi pas ? Sauf que la conta­gion du virus a été loin de coïn­ci­der avec l’hyper-région : elle a frap­pé essen­tiel­le­ment l’Alsace – dont le nom est effec­ti­ve­ment pas­sé à la trappe dans les médias durant l’épisode – et la Moselle, soit, iro­ni­que­ment autant que curieu­se­ment, l’ancien Reichsland :

Cet ancien direc­teur du mémo­rial de Colom­bey-les-Deux-Églises dis­pose au demeu­rant d’une riche expé­rience en matière d’entretien des mythes historiques.

« Don­ner du sens à l’identité du Grand Est » – la for­mule ne laisse pas de plon­ger dans une pro­fonde conster­na­tion – consis­tant à inven­ter un pas­sé autant qu’un pré­sent com­muns, aus­si fic­tifs soient-il, ce qui jus­ti­fie­rait et ren­drait iné­luc­table leur fusion. 

À l’instar d’une France des­ti­née depuis la nuit des temps à coïn­ci­der avec l’hexagone actuel, qui serait le fruit d’affinités élec­tives et non du hasard des conquêtes mili­taires et des acqui­si­tions dynastiques.

Coco­ri­co­nisme pathologique 

En guise d’épilogue, cette pré­sen­ta­tion de l’Alsace dans le guide Miche­lin de 1920, monu­ment à la gloire du cré­ti­nisme cocoricon :

« La race alsa­cienne, mal­gré les inva­sions mul­tiples que le pays a subies à tra­vers les âges, est res­tée à base cel­tique, ou tout au moins voi­sine du type celte : crâne large et peu pro­fond, yeux et che­veux noirs ou foncés.

C’est ce qu’après une vaste enquête por­tant sur les enfants dans les écoles, les Alle­mands ont eu la sur­prise de consta­ter. D’ailleurs, même le type blond alsa­cien, carac­té­ri­sé par un ton clair et des che­veux drus d’un blond cen­dré, ne sau­rait être confon­du avec le type pur ger­ma­nique, de car­rure plus mas­sive, de teint plus colo­ré, de che­veux plus fins et plus colorés.

Les mêmes obser­va­tions s’appliquent aux femmes d’allure géné­ra­le­ment plus sveltes que les Alle­mandes : elles res­semblent assez aux Fran­çaises de la région du Nord. »

Pour­quoi pas, puisque nous sommes cen­sés res­sem­bler ici aux Chtis, une nou­velle sim­pli­fi­ca­tion avec une région « Grand Nord-Est » ? Et tant qu’à faire, puisqu’on a pris l’habitude en France de déshu­ma­ni­ser les ter­ri­toires en leur don­nant des numé­ros, pour­quoi ne pas reprendre la divi­sion par zone téléphonique ?

A lire : Faut-il décou­per les grandes régions de France ?

Le Nom de la Chose 

Quant à la consé­cra­tion bap­tis­male « Grand Est », elle aura déles­té l’ectoplasme régio­nal de quelques autres ridi­cu­li­tés topo­ny­miques par­ti­cu­liè­re­ment savou­reuses, digne d’un 4ème de cou­ver­ture de l’hebdomadaire « Char­lie Heb­do », au tra­vers de sa rubrique « les titres aux­quels vous avez échappé » :

Ain­si, rap­pe­lons pour la bouche que le cli­nique « Nord-Est » dis­pu­tait l’avantage à la chaine hôte­lière « Grand Est Europe », laquelle ployait sous le fro­mage cou­lant « Cœur d’Eu­rope », nour­ri de la resu­cée méro­vin­gienne « Nou­velle Aus­tra­sie », elle-même aux prises avec la tech­no infra­struc­tu­relle « Euro­ré­gion Est », oppor­tu­né­ment occise par la rétro-char­le­ma­gnesque « Lotha­rin­gie », laquelle para­dait à la gale­rie com­mer­ciale « Est Europe », alors qu’elle s’en venait (et ce fut l’une des pistes les plus sérieu­se­ment envi­sa­gée) d’Aca­lie [pour Alsace, Cham­pagne-Ardenne, Lor­raine], dont l’a­cro­nyme sem­blait ren­voyer (incons­ciem­ment ?) au mythe pas­to­ral de l’Arca­die.

Daniel MURINGER & Mario DI STEFANO 

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