Auseinandersetzung eines Elsässers mit dem französischen Bildungswesen
Richard Weiss, président-fondateur de l‘association ABCM Zweisprachigkeit a fait paraître tout récemment un ouvrage dont le titre, « Quand je serai grand, je serai bilingue ! », est doublé en toute cohérence de son équivalent allemand, « wenn ich einmal gross bin, werde ich zweisprachig sein! ».
L‘ancien professeur de lettres classiques et lui-même parent d‘élève y retrace le combat difficile et de longue haleine pour faire (ré)admettre l‘enseignement substantiel de l‘allemand et de ses versions dialectales dans les écoles d‘Alsace.
Le livre survole les étapes dans le domaine faites d‘avancées, mais également de reculs, allant d‘une loi Deixonne de 1951, première prise en compte par l‘Education nationale des langues régionales jusqu‘alors minorisées, voire entièrement ignorées, sinon méprisées – mais qui excluait alors du périmètre concerné le corse-italien et l‘alsacien-allemand, à la toute jeune CEA, dont le développement du bilinguisme est explicitement une des missions et dont on attend la mise en oeuvre concrète.
Ce sont autant de péripéties et d‘ obstacles divers auxquels les parents ont dû faire face pour permettre enfin à leurs enfants de bénéficier pleinement du double héritage linguistique régional et de la richesse intellectuelle et culturelle qui en découle. L‘objectif à ce jour n‘est qu‘imparfaitement atteint et la lutte continue.
Au fil des pages abondent les exemples de la duplicité, des faux-fuyants d‘une administration qui cache mal le jacobinisme viscéral à l‘oeuvre en son sein; on la découvre affligée d‘une vision aussi étroite que paranoïaque de la République. Ces comportements ne sont pas nécessairement du seul fait de „Français de l‘intérieur“ : ainsi, une institutrice de l‘auteur parle l‘alsacien avec les parents de celui-ci, mais en interdit l‘usage à l‘école !
Le livre évoque également quelques personnalités, élus politiques ou aux commandes au ministère ou au rectorat, qui ont contribué, au moins partiellement, à faire avancer les choses.
L‘accent est mis sur l‘évidence que l‘alsacien est une forme de l‘allemand, qui a besoin pour survivre de sa „langue-toit“, sa „Dachsprache“, dont elle est inséparable. L‘allemand n‘est pas la „langue du voisin“, mais la version „haute“ des langues d‘Alsace (et de Moselle). Une langue „alsacienne“ distincte de l‘allemand standard est une pure invention revancharde d‘après 1871.
Autre idée-force : seule l‘immersion (en maternelle et en CP) peut compenser le déséquilibre qui s‘est formé entre les deux langues, cette même immersion qui a été mise en oeuvre avec succès au lendemain de la guerre – l‘allemand „provisoirement“ interdit– pour transformer les générations suivantes en quasi-monolingues français et qu‘il importe de faire fonctionner désormais à rebours.
Richard Weiss évoque encore le retard alsacien en la matière sur la Bretagne et le Pays basque, auprès desquels les militants régionaux vont chercher retours d‘expérience et argumentaires (retard dû tant au manque de courage des élus nationaux de la région qu‘à des suspicions rémanentes liées à la communauté linguistique des deux rives du Rhin que les administrations françaises se sont évertuées à gommer depuis 1918).
Au-delà du bilinguisme, il s‘agit encore de rétablir dans ses droits, car étouffées par la situation de monopole d‘un „roman national“ monolithique et uniformisant, l‘histoire et la culture spécifiques de la région, dont la connaissance et l‘enseignement restent à promouvoir en milieu scolaire.
Le livre au demeurant agréablement écrit porte en couverture le dessin bien connu du regretté Tomi Ungerer, qui fut lui-même président d‘honneur d‘ABCM-Zweisprachigkeit. Il recèle un grand nombre de documents, illustrations, dont des caricatures de Raymond Piela. L‘ouvrage devrait être dans les bonnes librairies avant Pâques (pensez à le réserver) et est également disponible chez l‘éditeur breton Yoran Embanner qui se consacre de longue date aux langues et cultures en danger, de France et d‘ailleurs.